Objectifs du Millénaire: bien du chemin reste à faire
«Nous devons atteindre ces objectifs, nous voulons et nous pouvons y parvenir», a déclaré lundi à New York le nouveau Président de l’Assemblée générale de l’ONU. Joseph Deiss ouvrait un sommet qui a vu la ministre suisse des Affaires étrangères rappeler la nécessité des droits de l’homme.
Jusqu’à mercredi, les Etats membres de l’ONU sont réunis en sommet pour débattre des fameux objectifs sur lesquels ils se sont entendus en 2000.
Ce dispositif de huit objectifs est censé susciter le développement à travers la planète et, en particulier, obtenir une réduction de moitié de la pauvreté et la faim dans le monde d’ici 2015. Mais à ce stade, le bilan est mitigé, un élan nouveau semble urgent.
«Nous n’avons pas le droit d’échouer», a souligné Joseph Deiss en lever de rideau. «Les regards de la planète sont dirigés vers nous. Nous ne devons pas les décevoir.»
Le Suisse, qui vient d’endosser son nouvel habit de Président de l’Assemblée générale, a appelé les politiciens de haut rang présents à débattre de manière «calme et constructive» de la manière de renforcer les efforts pour atteindre ces objectifs.
Le Secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon a de son côté parlé de progrès tangibles mais toujours fragiles observés dans de nombreux pays pauvres. Améliorer la vie de milliards d’êtres humains est possible au prix d’une volonté politique et de moyens financiers supplémentaires, selon lui.
«Malgré tous les obstacles, malgré le scepticisme», les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) peuvent encore être atteints, a estimé Ban Ki-moon. Mais l’aiguille tourne et d’ici 2015, «beaucoup reste à faire».
Avant le sommet, le Secrétaire général avait du reste chiffré le financement additionnel nécessaire à plus de 100 milliards de dollars.
Passages obligés
A la tribune, la ministre suisse des Affaires étrangères Micheline Calmy-Rey a insisté sur le respect des droits de l’homme et sur le développement durable, indispensables pour atteindre les Objectifs.
Les «Objectifs du Millénaire pour le développement sont le reflet d’un consensus historique», a observé la ministre. Ils reflètent l’optimisme qui régnait au tournant du millénaire.
Si aujourd’hui «je mets un bémol à l’euphorie d’alors, c’est que, en dépit des succès enregistrés dans bien des domaines, nous n’avons pas atteint ce que nous voulions atteindre», a-t-elle poursuivi.
La réalisation des Objectifs doit rester une priorité de la communauté internationale, et avant tout des pays riches. Les progrès dans la réduction du nombre de personnes pauvres à travers le monde, l’accès à l’éducation primaire et à l’eau potable, l’égalité des sexes sont insuffisants, a martelé Micheline Calmy-Rey.
Symptôme plutôt que cause
«Peut-être nous sommes-nous trop concentrés sur les symptômes et pas assez sur les causes de la pauvreté et de la misère», a aussi lancé la ministre, rappelant que le développement, c’est bien plus qu’aider les personnes en détresse.
En clair, la communauté internationale doit parler plus ouvertement et plus directement des causes de la stagnation du développement ou de sa lenteur et définir ses objectifs en conséquence.
Parmi ces causes, Micheline Calmy-Rey signale la situation de nombreux Etats, confrontés à la violence et aux conflits. Les pays donateurs doivent aussi se demander s’ils ne font pas fausse route dans le cadre de leur aide au développement, suggère-t-elle.
Commerce et production
Pour la ministre suisse, les Etats partenaires des pays donateurs doivent eux aussi s’interroger sur leur action. Car la responsabilité de tenir les engagements et d’en rendre compte lie toutes les parties.
Autre jalon posé par la ministre, le développement exige l’établissement de conditions cadre dans le domaine politique mais aussi économique, permettant aux pays pauvres de se faire une place dans le système international (et local) de production et de commerce.
C’est aussi offrir au secteur privé les règles d’un État de droit et augmenter les revenus des collectivités par une imposition fiscale adéquate des entreprises et des particuliers, afin que les prestations étatiques en matière de santé et d’éducation puissent être financées.
La Suisse maintient ses engagements, assure Micheline Calmy-Rey. Son aide au développement se concentre essentiellement sur les pays les plus pauvres et l’atteinte des Objectifs du Millénaire. La ministre a précisé devant les médias suisse que le dispositif helvétique s’avère efficace «mais que nous apprenons toujours».
Droits de l’homme
En lien avec le développement économique, le changement climatique, qui pose de nouveaux problèmes dans les pays les plus pauvres surtout, contraint la communauté internationale à se fixer des objectifs clairs. La transition vers une économie verte est, selon la ministre, plus que jamais nécessaire et urgente.
«Le risque est réel qu’une modification des conditions climatiques engendre une migration forcée dans de nombreux pays, cela conjugué avec des conflits potentiels pour l’accès à l’eau et aux terres arables», avertit Micheline Calmy-Rey. D’où exigence de répartir l’eau et les autres ressources naturelles de manière équitable entre tous les humains de la planète.
Dans ce contexte de changement climatique, des efforts accrus doivent être faits pour stabiliser la concentration des gaz à effet de serre dans l’atmosphère. Selon la ministre, la réussite économique de la Chine, de l’Inde, du Brésil et d’autres pays émergents «nous force à reconnaître que les limites de ce qui est écologiquement supportable seront rapidement atteintes si sept milliards de personnes devaient consommer autant de CO2, d’eau et d’autres ressources naturelles que nous le faisons déjà aujourd’hui dans les pays de l’OCDE».
Dans le même ordre d’idée, la violence, les conflits et le non-respect des droits de l’homme sont un frein au développement. Ce qui fait dire à Micheline Calmy-Rey que «le respect des droits humains, la non-discrimination, le droit de participer à la vie politique, économique et sociale du pays sont absolument fondamentaux, si nous voulons atteindre les Objectifs du Millénaire.»
Les huit Objectifs du Millénaire pour le Développement doivent être atteints d’ici 2015. Ils ont été avalisés par tous les Etats-membres de l’ONU et par de nombreuses organisations internationales.
Ces huit objectifs sont:
Réduire l’extrême pauvreté et la faim
Assurer l’éducation primaire pour tous
Promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes
Réduire la mortalité infantile
Améliorer la santé maternelle
Combattre le VIH/sida, le paludisme et d’autres maladies
Préserver l’environnement
Mettre en place un partenariat pour le développement
Avant le sommet sur les Objectifs du millénaire pour le développement ouvert lundi, Micheline Calmy-Rey a pris part comme vingt autres décideurs de la politique et de l’économie à la première séance du nouveau comité de l’ONU pour le développement durable.
Ce comité, formé par le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon a pour but de formuler une stratégie en vue d’un développement dégageant moins de CO2 et donc moins dommageable pour le climat.
Lundi, la ministre a aussi rencontré une délégation chinoise à New York. Ses interlocuteurs ont souligné l’importance que la Chine accorde au dialogue sur les droits de l’homme entamé en 1981 déjà avec la Suisse.
Le développement rapide de la Chine a aussi des conséquences sur les relations économiques, a relevé la cheffe du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) lors d’un point avec la presse. La Chine manifeste un intérêt croissant pour les échanges techniques et scientifiques.
(Traduction et adaptation de l’allemand: Pierre-François Besson)
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