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Seul un miracle peut sauver Nicolas Sarkozy

Pour les socialistes français, la victoire de François Hollande au deuxième tour ne fait guère de doute. Keystone

Pour la presse suisse de lundi, l’affaire semble d’ores et déjà entendue: François Hollande sera le prochain président de République française. Les commentateurs constatent que le candidat sortant Nicolas Sarkozy peine à rassembler au-delà de sa seule famille politique.

De manière générale, la presse suisse joue quand même la prudence en soulignant que les jeux ne sont pas encore faits. La Berner Zeitung, par exemple, souligne qu’une nouvelle phase commence et que les dés ne sont pas encore jetés. D’autant plus que personne ne sait quels thèmes surgiront durant les deux semaines qui nous séparent du deuxième tour.

Le Temps estime pour sa part que «Nicolas Sarkozy réalise un mauvais résultat pour un candidat sortant mais somme toute honorable dans une Europe traversée par la crise». La Neue Zürcher Zeitung (NZZ) rappelle que trois anciens présidents (Mitterrand, Chirac et Giscard d’Estaing) ont finalement réussi à l’emporter, bien qu’ayant terminé au deuxième rang au premier tour.

Les chances de Nicolas Sarkozy seraient-elle dès lors intactes? Une analyse plus en profondeur des résultats ne permet guère d’y croire, selon les commentateurs. En effet, le locataire actuel de l’Elysée cumule les handicaps. Celui-ci a «de l’eau jusqu’au cou», comme l’illustre La NZZ.

Désir de changement

Le premier de ces handicaps, c’est le bilan très contesté du quinquennat qui s’achève ainsi que l’image de Nicolas Sarkozy.

Le quotidien populaire romand Le Matin note que les électeurs ont voulu «mettre fin au bling-bling de Sarkozy qui les a écœurés au fur et à mesure que leur pouvoir d’achat s’amenuisait». Le Journal du Jura estime pour sa part que le président a lassé les Français «à force de multiplier les réformes et de s’agiter tous azimuts».

Outre-Sarine, le constat est tout aussi sévère. Le Tages Anzeiger ne pense ainsi pas que Nicolas Sarkozy puisse l’emporter. Outre l’essoufflement du camp bourgeois en France et la crise de la zone euro qui a fait tomber d’autres gouvernements, le journal zurichois cite aussi un motif plus subjectif: «les Français ne peuvent tout simplement plus supporter Nicolas Sarkozy, un président qui a divisé, qui a fait le lit de l’extrême droite en radicalisant son discours jusqu’à flirter avec la xénophobie.»

Pour la presse, ce mécontentement face à Nicolas Sarkozy profite à son rival. «François Hollande a, à l’inverse, réalisé un parcours sans faute, tout en rondeur, comme pour mieux se démarquer d’un rival excité et impatient. A l’évidence, François Hollande ne suscite aucune ferveur, ni de réelles passions mais il rassure une France qui se sent brutalisée par un pouvoir peu respectueux des formes», écrit Le Temps. Le quotidien valaisan Le Nouvelliste voit quant à lui dans le candidat socialiste «le dépositaire des inquiétude et du ras-le-bol.»

Exercice d’équilibriste

L’autre handicap de Nicolas Sarkozy est la difficulté à récolter maintenant des voix au-delà de sa propre famille politique, l’UMP. Deux possibilités s’offrent à lui: les centristes de François Bayrou (environ 10% des voix) et le Front national de Marine le Pen (près de 20%).

Pour Le Courrier, Nicolas Sarkozy va tenter un «délicat exercice d’équilibrisme» consistant à «séduire les électeurs du Front national sans effaroucher ceux du centriste François Bayrou». Le quotidien genevois de gauche estime que le risque est élevé de voir Nicolas Sarkozy se livrer à «une surenchère de déclarations sécuritaires, identitaires, voire franchement xénophobes». «Il est probable qu’il ne lui reste pas d’autre option, pour espérer l’emporter, que de durcir encore sa position pour embrasser encore plus fort les électeurs du Front national, comme en 2007, mais cette fois sans garantie de succès», note pour sa part le Tages Anzeiger.

Opinion plus minoritaire, la NZZ estime en revanche que le président sortant fera «toutes les avances possibles» aux centristes.

En tout cas, les commentateurs ne s’y trompent pas. Avec le score historique enregistré dimanche, le Front national est l’une des clefs de l’élection. Le quotidien populaire alémanique Blick pose d’ailleurs franchement la question: «Le Pen va-t-elle sauver Sarkozy?».

Bon nombre de commentateurs estiment que le report des voix de l’extrême droite n’est de loin pas acquis. Notamment parce que le Front national a davantage intérêt à se profiler désormais comme la vraie opposition à un pouvoir de gauche plutôt que d’aider à faire réélire une droite traditionnelle en perte de vitesse. C’est notamment la thèse du commentateur des journaux vaudois 24 heures et genevois la Tribune de Genève qui estime que Marine Le Pen espère «ramasser les débris de l’UMP pour construire le grand parti de la droite dure».

Or en face, la gauche présente un front très uni. Le cumul des voix ouvre donc à François Hollande «un véritable boulevard», juge le quotidien fribourgeois La Liberté.

Un mou à la tête de l’Etat

A l’issue de ce premier tour, la presse suisse pose un regard un peu pessimiste sur la France: un président décrié, une percée de l’extrême gauche, un score historique de l’extrême droite…

Par ailleurs, la très probable élection de François Hollande ne suscite guère l’enthousiasme. «Les Français seront ainsi débarrassés de Sarkozy le 6 mai prochain. Mais, à la place, d’un président bling-bling, ils se retrouveront avec un mou à la tête de l’Etat. Est-ce vraiment mieux?», se demande Le Matin.

François Hollande (Parti socialiste): 28,63%

Nicolas Sarkozy (UMP): 27,08%

Marine Le Pen (Front National): 18,01%

Jean-Luc Mélenchon (Front de gauche): 11,13%

François Bayrou (Modem): 9,11%

Eva Joly (Verts): 2,28%

Nicolas Dupont-Aignan (Debout la République): 1,8%

Philippe Poutou (NPA): 1,15%

Nathalie Arthaud (Lutte ouvrière): 0,57%

Jacques Cheminade (Solidarité et Progrès): 0,25% 

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