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Une cérémonie de la Shoah pour réveiller l’ONU

Une flamme en mémoire des millions de victimes du génocide nazi. Keystone

A Genève, les cérémonies du Jour de la Shoah se sont déroulées lundi en face du siège européen des Nations Unies, où se tient la conférence de l'ONU sur le racisme. Reportage.

L’entreprise de destruction industrielle des juifs et des Tsiganes par les Nazis est un crime contre l’humanité entière. Mais il se trouve toujours des gens comme le président iranien pour nier cette évidence et considérer l’holocauste comme une affaire qui ne concerne que les Juifs et les Occidentaux.

En commémorant sur la place des Nations – devant le siège européen des Nations Unies – le jour de la Shoah (Yom HaShoah en hébreu), les communautés juives de Genève ont symboliquement rappelé que le désastre de l’Holocauste a fortement contribué à la création des Nations Unies et de la Déclaration universelle des droits de l’homme.

Ceux qui sont resté assis

«L’Organisation des Nations Unies s’est construite sur le ‘plus jamais ça’ d’Auschwitz et des massacres nazis. Nous sommes devant le Palais des Nations pour commémorer l’esprit même qui devrait y présider. Mais aujourd’hui, cet esprit est sur la place des Nations, non pas au sein du Palais des Nations et chez ceux qui sont restés assis lors du discours du président Ahmadinejab», déclare à swissinfo l’écrivain Bernard-Henri Levy, l’un des orateurs de la cérémonie.

Dans son discours genevois qui rappelait, par sa teneur et les inflexions de sa voix, le ton vibrant d’André Malraux, l’écrivain français a ajouté: «Je rêve d’un Durban II qui se serait ouvert sur le témoignage d’un Indien Dalit. Ou d’un survivant du Darfour. Ou d’un Rwandais rescapé des massacres d’il y a quinze ans… Et c’est pourquoi, ce soir, depuis cette belle ville qui est, par tradition, symbole d’hospitalité et de liberté (…) j’appelle à une autre conférence, vraiment antiraciste, vraiment fidèle aux idéaux des Nations Unies, car scellant la Grande Alliance des ébranlés d’hier et d’aujourd’hui. Oublions Durban 2. Préparons Genève 3. »

Un appel entendu par Martine Brunschwig Graf . «Ce que j’attends de la Suisse, c’est qu’elle fasse savoir de façon très forte sa désapprobation totale du discours du président iranien et qu’elle se retire des travaux de cette conférence qui a perdu tout son sens», confie la parlementaire genevoise, alors que les quelques 3000 participants quittent lentement la cérémonie à la lumière des bougies.

Les mots avant les meurtres

Associer l’opposition à la conférence sur le racisme et la commémoration du jour de la Shoah n’a pas beaucoup plu à certains membres de la communauté juive de Genève. La seule désignation d’Israël telle qu’elle figure dans la déclaration de la Conférence mondiale sur le racisme de Durban en 2001 – et dont se prévaut celle de 2009 – rappelle pourtant la stigmatisation des Juifs par la propagande nazie. Et ce quelles que soient les motivations politiques et stratégiques de l’Etat israélien à l’encontre des conférences Durban I et II.

Car les grands massacres sont toujours précédés par des discours. «Quand on commence par brûler des livres, on finit par incendier des être humains. Lorsque les droits humains sont bafoués, nous savons où cela peut conduire. Cette manifestation est donc un témoignage, plus qu’un acte politique», souligne le rabbin François Garaï, fondateur de la Communauté israélite libérale de Genève.

Un témoignage également porté à Genève par le Prix Nobel de la paix Elie Wiesel. «Après la guerre, j’étais optimiste. Je pensais qu’on ne connaîtrait plus jamais cela, que le monde avait appris. Jamais je n’aurais pensé que je passerai ma vie à combattre l’antisémitisme», a raconté ce rescapé du camp d’extermination nazi d’Auschwitz devant la nombreuse assistance.

Transmettre la mémoire

Avant de prononcer ces paroles d’un lumineux pessimisme: «Je pense que l’homme n’a rien appris… C’est parce qu’il n’y a pas d’espoir qu’il faut l’inventer».

Elie Wiesel a aussi rappelé l’importance de ce combat pour les génération futures, «pour les enfants». Une transmission d’autant plus importante que les rescapés des camps nazis sont de moins en moins nombreux.

«Un jour, ils ne seront plus là, relève François Garaï. Si nous ne gardons pas la mémoire de ces événements, on oubliera, comme on a oublié certains pans de notre Histoire. Et à force d’oublier les pans de notre Histoire, nous répétons les même erreurs.»

Une transmission qui tient également à cœur Martine Brunschwig Graf: «Demain, il n’y aura plus de témoins de la Shoah. Il revient donc aussi à l’école et aux communautés de veiller à la transmission de cette mémoire.»

swissinfo, Frédéric Burnand, Genève

Silence. Les sirènes ont retenti mardi en Israël et deux minutes de silence ont été observées à l’occasion de Yom Hashoah la journée de commémoration annuelle de l’Holocauste. Durant ces deux minutes, les piétons se sont arrêtés sur place ainsi que les autobus et les voitures.

Mémorial. Une cérémonie à la mémoire des six millions de juifs victimes du génocide nazi a ensuite eu lieu à Yad Vashem, le Mémorial de l’Holocauste à Jérusalem.

Rescapés. Les chaînes de télévision ont diffusé films et documentaire historiques, tandis que les radios programmaient de la musique classique, ainsi que des entretiens avec des rescapés de l’Holocauste. Quelque 250.000 d’entre eux vivent aujourd’hui en Israël.

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