Coronavirus: la Suisse est-elle prête pour une nouvelle vague?
Avec l'augmentation du nombre de cas de Covid-19, on parle à nouveau de vaccins et de mesures pour l'automne. La Suisse est-elle bien armée pour faire face à une nouvelle vague? A quelles mesures pouvons-nous nous attendre? SWI swissinfo.ch s’est penché sur ces questions avec l'aide des autorités sanitaires et d'une experte.
L’Organisation mondiale de la santé a récemment signalé que les cas hebdomadaires de Covid-19 dans le monde sont en constante augmentation, notamment en Méditerranée orientale (+29%), en Asie du Sud-Est (+20%) et en Europe (+15%).
En Suisse, 46’025 nouveaux cas ont été enregistrés la semaine dernière, soit près de 13’000 de plus que la semaine précédente.
SWI swissinfo.ch analyse la situation en Suisse en matière de vaccination et d’immunité, et les mesures auxquelles nous pouvons nous attendre au retour des vacances d’été.
>> Les chiffres les plus récents de la pandémie en Suisse, dans le tableau de bord de l’Office fédéral de la santé publiqueLien externe.
Quel est le niveau de couverture vaccinale et d’immunité en Suisse par rapport aux autres pays?
La situation vaccinale en Suisse n’est pas très bonne par rapport au reste des pays industrialisés. 69% des personnes ont reçu deux doses. Si l’on compte également les personnes vaccinées avec une seule dose, on arrive à 70%. Comme le montre le graphique, la Suisse est lanterne rouge en Europe occidentale.
Il faut cependant tenir compte du fait que de nombreuses personnes non vaccinées ont contracté le Covid-19 et sont déjà guéries. «Mais l’immunité qui suit l’infection par Omicron n’a pas encore été bien testée en laboratoire pour la protection contre d’autres variants», tempère Samia Hurst-Majno, ancienne vice-présidente de la Task Force nationale Covid-19 et professeure de bioéthique médicale à l’Université de Genève.
Cela signifie qu’à l’heure actuelle, il n’est pas possible de savoir dans quelle mesure les personnes guéries sont réellement protégées contre les derniers sous-variants d’Omicron (BA.4 et BA.5), qui semblent être beaucoup plus contagieux que leurs prédécesseurs.
Et cela vaut également pour les personnes qui ont reçu la dernière dose de vaccin il y a plusieurs mois, elles sont moins protégées. «Les personnes exposées à un risque d’évolution sévère devraient avoir accès à une quatrième dose», estime Samia Hurst-Majno. Pour l’instant, cela n’est possible en Suisse que dans quelques cantons.
Quels sont les vaccins disponibles en Suisse et dans quelle mesure protègent-ils contre le virus?
Quatre vaccins contre sont actuellement administrés en Suisse à partir de l’âge de 12 ans: Pfizer/BioNTech, Moderna, Janssen et Novavax. Pfizer/BioNTech est le seul à être également autorisé pour les enfants 5 à 11 ans.
Ces vaccins protègent suffisamment contre les formes graves de la maladie, mais ne réduisent que de manière limitée les risques d’infection et d’évolution bénigne des variants en circulation. C’est pourquoi Swissmedic étudie actuellement une demande d’autorisation pour un vaccin bivalent de Moderna, qui devrait être plus efficace contre les nouveaux variants d’Omicron, tout en protégeant bien contre les autres variants.
Il est important de mettre à jour les vaccins au fur et à mesure que les virus mutent et de mettre en place un système qui permette de les autoriser rapidement, comme c’est le cas pour la grippe, explique Samia Hurst Majno. Cependant, Swissmedic ne dit encore rien du calendrier d’approbation de ce vaccin Moderna.
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En viendra-t-on à la quatrième dose de vaccin pour tout le monde?
L’Office fédéral de la santé publique (OFSP) estime qu’un deuxième «booster» devrait être recommandé à l’ensemble de la population, en donnant la priorité aux plus de 65 ans, aux personnes fragiles, aux femmes enceintes et au personnel de la santé. Mais il est peu probable que la décision soit prise avant l’automne. En effet, il existe encore de nombreuses inconnues, comme la protection qu’offrent les vaccins contre le nouveau variant de l’Omicron BA.5.
Toutefois, en raison de l’augmentation du nombre de cas depuis début juin et de la prévalence accrue de ce variant, l’OFSP recommande aux cantons de procéder dès maintenant à la deuxième vaccination de rappel pour les personnes gravement immunodéprimées et les personnes de plus de 80 ans.
Celles et ceux qui n’appartiennent pas à ces catégories, mais qui souhaitent néanmoins recevoir une quatrième dose pour voyager à l’étranger pourront le faire, à leurs frais.
Les enfants de moins de cinq ans pourront-ils aussi bientôt être vaccinés?
Dans certains pays, dont récemment les États-Unis, les garçons et les filles de moins de cinq ans peuvent être vaccinés contre le Covid-19. Ce n’est pas le cas en Suisse, mais Swissmedic évalue actuellement l’utilisation du Moderna de six mois à cinq ans. Là encore, le délai d’approbation n’est pas connu. Mais Samia Hurst-Majno souligne qu’il serait important que Swissmedic examine les données et prenne rapidement une décision, dans un sens ou dans l’autre.
Dans les pays où il est déjà possible des vacciner les enfants de moins de cinq ans, on a noté des effets indésirables assez semblables à ceux observés dans les groupes plus âgés. L’efficacité semble également être largement similaire. Cela signifie qu’il y a peu de protection contre les nouveaux variants, même avant l’âge de cinq ans.
A quelles mesures doit-on s’attendre pour l’automne?
En Suisse, la mise en œuvre des mesures sanitaires incombe aux cantons. Pour l’instant, les autorités n’ont émis que des recommandations concernant les vaccinations et ont invoqué la responsabilité individuelle pour d’autres mesures, comme le port du masque.
Mais dans d’autres pays, on discute déjà d’un éventuel retour du masque dans les transports publics et à l’intérieur des bâtiments. En France, le ministre de la Santé a recommandé une telle pratique.
Cette mesure pourrait être nécessaire pour permettre un accès sûr aux soins hospitaliers et pour protéger les personnes immunodéprimées. «La société doit être ouverte à tous», rappelle Samia Hurst-Majno. Chacun doit donc pouvoir accéder à la nourriture, aux transports publics et aux biens et services essentiels en toute sécurité et sans prendre de risques disproportionnés.
Faut-il s’inquiéter?
L’augmentation du nombre de cas est tout à fait normale et dépend du développement de variants plus infectieux et de leur capacité à échapper aux défenses immunitaires. En outre, aucune preuve scientifique n’indique que les mutations BA.4 et BA.5 sont plus dangereuses que les variants précédents d’Omicron.
Mais cela ne signifie pas que nous pouvons nous reposer sur nos lauriers. Outre la baisse de l’immunité de groupe, il y a le fait que les hôpitaux ne sont pas aussi bien équipés qu’en 2020. Et la durée de la pandémie reste une préoccupation, affirme Samia Hurst-Majno.
(Traduction de l’italien: Marc-André Miserez)
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