Hugo Loetscher aime les peuples pour leurs rêves
L'écrivain zurichois était mercredi au Salon du Livre l'hôte du stand de la diplomatie suisse. Pour y évoquer quelques souvenirs brésiliens.
Le Brésil, c’est un pays qu’Hugo Loetscher a commencé à découvrir au Portugal. Et qu’il a rencontré plus tard et décrit entre autres dans «Wunderwelt», son reportage personnel dans un village perdu du Nordeste. Auprès d’une famille pauvre parmi les pauvres. Ce qui ne l’empêche pas de dire et répéter, avec optimisme, qu’il faut «aimer les peuples pour leurs rêves».
Dès ma première rencontre avec le Brésil, nous dit-il, «mon idée était de voir qui ne connaît pas de problèmes raciaux. La démocratie raciale, c’est une idée magnifique. À cause du mélange des races, ce n’était pas possible dans ce pays de vivre un racisme comme en Afrique du Sud.»
Dans la vie ordinaire du Brésil, «ça joue vraiment entre les races et les prémices de la démocratie sont là, malheureusement le rêve ne s’est pas vraiment réalisé, la réalité économique et sociale est différente, il y a encore et toujours une différence des chances entre les races».
Hugo Loetscher avoue sa déception. Il a connu le Brésil avant et après la dictature. Comme nombre de Brésiliens, il a cru à l’avenir. Pourtant les choses ne changent guère, dit-il en évoquant les problèmes de la réforme agraire.
Malgré tout, les «prémices magnifiques existent et peut-être va-t-on tout de même en profiter pour réaliser ce rêve qu’on a dans la tête».
Et le rêve suisse?
Hugo Loetscher élargit son propos à la Suisse. Il estime qu’il importe aussi de montrer qu’il y a des faux rêves. «Le rêve suisse, c’est d’avoir une démocratie comme personne au monde, ce serait évidemment magnifique,»
Sa formule à lui, c’est qu’«il n’y a jamais eu une démocratie suisse, mais qu’il y a toujours une histoire de cette démocratie», Et cette histoire, c’est vraiment cela dont il rêve pour la Suisse.
Il rappelle que dans ce pays «la démocratie sociale existe depuis 50 ans, celle des femmes depuis 20 ans, celle des Juifs depuis 100 ans, mais avec la démocratie il faut toujours recommencer, c’est toujours nécessaire d’en refaire la définition.»
«Tout le monde a besoin des autres»
Et pour lequel de ses rêves Hugo Loetscher serait-il «aimable»? Le mot rêve, à son propos, n’est peut-être pas le mieux approprié, nous répond-il. Il préfère parler de curiosité. «Je suis très curieux du monde global et de la simultanéité de toutes les cultures et de toutes les races.»
«Le multiculturalisme, c’est quand tout le monde a besoin des autres. Chacun, personnellement, ne vit qu’une seule potentialité humaine. Les autres hommes en vivent d’autres.»
«J’aimerais connaître toutes ces potentialités», conclut-il tout en déplorant que son âge (il est né en 1929) ne lui permettra pas de vivre tout cela. L’important, cependant, «c’est que le monde marche dans cette direction-là».
swissinfo/Propos recueillis par Bernard Weissbrodt
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