La sécurité informatique passe par la lumière
Comment véhiculer des données sur fibre optique à l'abri de toute tentative de piratage? Un laboratoire genevois teste un procédé très prometteur.
Jusqu’il y a peu, la «cryptographie quantique» était un objet de recherche purement théorique. Et pourtant, derrière ce terme barbare se cache rien moins que l’éventuelle parade absolue à tous les piratages informatiques.
Aujourd’hui, un message qui circule dans une ligne téléphonique ou dans une fibre optique peut être intercepté par un pirate sans que personne ne s’en aperçoive. Bien sûr, les messages sensibles sont codés, mais même le code le plus sophistiqué n’est pas à l’abri d’un déchiffrage non-autorisé.
Tout devrait changer avec la cryptographie quantique, que le Groupe de physique appliquée de l’Université de Genève teste depuis quelque temps en grandeur nature.
Small is beautiful
Dans une transmission de donnée classique, chaque élément d’information est transporté par un grand nombre de particules (électrons ou photons). Or, avec la miniaturisation croissante, on arrivera bientôt à faire circuler l’information à raison d’un bit par particule.
Mais, les particules sont de bien curieux objets. Dans ce monde de l’infiniment petit, les lois qui régissent la matière à plus grande échelle n’ont plus cours. Lorsqu’il s’agit du comportement d’un électron ou d’un photon, on entre dans le domaine de la physique quantique.
Et l’une de ses lois veut qu’il ne soit pas possible de «regarder» une particule sans lui laisser une trace. Autrement dit, si un message où chaque particule est chargée d’un élément d’information a été lu par un tiers, il en portera forcément la trace.
e-banking en toute sécurité
Pour tester cette nouvelle technologie, le laboratoire genevois collabore avec la banque Lombard-Odier, très intéressée à sécuriser au maximum ses transmissions. Pour l’heure, on ne s’échange que des messages peu sensibles, mais d’ici à deux ans – si tout va bien – la banque pourrait introduire ce service pour ses transactions en ligne.
Reste un problème de taille: après un voyage de 10 kilomètres dans une fibre optique, la moitié des photons se sont perdus en route. Sachant que chacun d’entre eux porte un élément d’information, ceci nuit évidemment beaucoup à la qualité du message final.
«Il existe une solution, mais pour l’heure, elle est purement théorique, explique Grégoire Ribordy, chercheur au Groupe de physique appliquée de l’Université de Genève. Il faudra, comme pour les lignes classiques, installer de loin en loin des amplificateurs, mais on ne sait pas encore fabriquer un amplificateur quantique».
En effet, amplifier un signal, c’est lui rajouter des photons et cette intervention «se voit», au même titre qu’une tentative de piratage. Pour l’heure donc, les transmissions 100% sécurisées devront s’en tenir aux petites distances.
Marc-André Miserez
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