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La Suisse abrite quelque 90’000 clandestins

Beaucoup de "sans-papiers" travaillent pour les ménages privés. Keystone

Une étude chiffre entre 80'000 et 100'000 le nombre de «sans-papiers» vivant en Suisse. Nettement moins que les estimations proposées jusqu’ici.

Le phénomène de la clandestinité est davantage lié au marché du travail qu’à la politique d’asile, constate aussi cette étude.

Le but avoué de l’étude demandée par l’Office fédéral des migrations était de vérifier les estimations très divergentes des autorités et des organisations concernées par l’immigration. Les premières faisaient habituellement état de la présence de 300’000 clandestins en Suisse.

En réalité, la Suisse compte entre 80’000 et 100’000 clandestins au plus, constate cette étude menée par l’Institut gfs. Clandestins qu’elle définit comme des personnes «séjournant plus d’un mois en Suisse sans permis de séjour régulier et qui n’ont pas la ferme intention de quitter le territoire».

Ces chiffres ressortent d’une extrapolation basée sur les estimations des experts des cantons de Genève, Vaud, Tessin, Bâle, Zurich et Thurgovie.

Préjugés déracinés

A travers cette étude, les auteurs tordent le cou à certains préjugés. Bien que le débat public porte surtout sur les requérants d’asile déboutés ou entrés dans la clandestinité, il s’agit de ne pas les assimiler aux sans-papiers en général, assurent par exemple les chercheurs.

Selon eux, les sans-papiers ne doivent pas non plus être confondus avec les travailleurs au noir, qui peuvent très bien être en situation régulière.

Un autre cliché vole en éclat. Le problème des sans-papiers n’est pas purement urbain. Il touche aussi les zones rurales, surtout dans les régions où l’agriculture est importante.

Les auteurs notent aussi que si la Suisse romande (francophone) est plus consciente de cette problématique, la Suisse alémanique (germanophone) n’en est pas moins touchée aussi.

Le marché de l’emploi

Selon cette étude, c’est le marché du travail et non la politique d’asile qui explique principalement la clandestinité.

On trouve la plus forte proportion de sans-papiers dans les cantons où le revenu est particulièrement élevé et/ou dans les endroits où vivent de nombreux étrangers.

Il n’est en revanche pas possible de démontrer une corrélation entre le taux de clandestins et la politique d’asile, affirment les experts.

Autrement dit, le nombre de sans-papiers n’est pas plus élevé dans les régions où les réfugiés sont nombreux, «pas plus qu’il ne s’accroît visiblement à ce jour avec le nombre de requérants déboutés».

Par leurs propres moyens

Le sans-papier type a entre 20 et 40 ans, selon le portrait dressé par les experts. Dans les cantons urbains, il vient plutôt d’Amérique latine, alors qu’en zone rurale, il est en général issu des Balkans et de sexe masculin.

En ville, on constate une répartition équilibrée entre les sexes. Voire une majorité de femmes.

La plupart des clandestins vivent en Suisse sans enfant, une partie les laissant au pays. Mais la plupart des enfants présents sont scolarisés, du moins dans les villes, observe l’étude.

Celle-ci relève aussi que les sans-papiers travaillent surtout dans les ménages privés, la gastronomie, la construction et la branche du nettoyage.

En moyenne, les clandestins tirent de leur travail un salaire mensuel oscillant entre 1000 et 2000 francs. Ils sont soumis à des conditions d’engagement précaires et des horaires de travail élevés. Ce qui ne les empêche pas, en général, de financer leur entretien par les revenus de leur activité.

Population non criminelle

La grande majorité des experts interrogés estiment que les clandestins constituent un groupe de population non criminel et qui ne cause pas de problème.

Ces gens sont «contraints de ne pas attirer l’attention et de se comporter aussi discrètement que possible pour éviter le risque d’être découverts et expulsés», explique l’étude.

Cela dit, l’existence même des sans-papiers a aussi des conséquences négatives pour la Suisse. L’étude cite le dommage économique inhérent au travail au noir, l’évasion fiscale et la perte de contributions aux assurances sociales qui en résultent.

Les chercheurs relèvent aussi l’incertitude de la population face à la concurrence de ces forces de travail bon marché et au dumping salarial, qui provoquent des attitudes xénophobes.

Pour l’avenir, la majorité des experts s’attendent à une augmentation du nombre des sans-papiers en Suisse. En particulier si la situation économique s’améliore. Une minorité desdits experts penche en revanche pour une stabilisation du phénomène.

swissinfo et les agences

La Suisse abrite entre 80’000 et 100’000 étrangers ne disposant pas d’un permis régulier de séjour.
Environ 20’000 d’entre eux vivent dans le canton de Zurich, 5000 dans celui de Bâle, 12-15’000 dans le canton de Vaud, 8-10’000 dans celui de Genève et 2000 au Tessin.
Entre 60 et 80% des clandestins ont entre 20 et 40 ans.
Entre 50 et 80% d’entre eux ne disposent d’aucune formation professionnelle.
Leur salaire mensuel oscille en général entre 1000 et 2000 francs.

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