«Le diplomate possède une nature de caméléon»

Bénédict de Tscharner consacre quelques pages, en fin d'ouvrage, à des réflexions sur «la profession» qui était la sienne.

En voici un extrait dont il conclut que de cette nature de caméléon, le diplomate doit s’accommoder et se méfier tout à la fois.

«Le plus difficile pour un diplomate, c’est, peut-être, de développer la discipline qu’exige son métier: savoir quand il faut s’effacer et sentir quand il faut se mettre en avant; exécuter des instructions la plupart du temps et agir de sa propre initiative dans les rares moments critiques, décisifs, analyser sans relâche les situations et les événements – un peu comme une antenne de radar qui tourne sans jamais s’arrêter. Il enregistre, mais en fin de compte, il ne pourra pas nécessairement imposer sa lecture personnelle; il côtoie les puissants et les ‘very important people’, mais il ne fait pas partie lui-même de ce monde; il saura tirer profit de son charisme, mais ne sera pas victime de son propre entregent. Juger sans mépriser, savoir reconnaître et mettre en évidence la valeur des choses et la qualité des gens. L’ambassadeur est, certes, loin d’être un surhomme, mais il doit à tout moment et avant tout être un homme sûr; il peut avoir toutes sortes de qualités ou de défauts humains, il peut être ou ne pas être un analyste percutant ou un négociateur hors pair; il est charmant ou terne, obséquieux ou jovial, brillant orateur ou philosophe plutôt taciturne; il peut représenter une grande puissance ou un pays qui ne pèse pas lourd sur l’échiquier mondial; la seule qualité qui lui est véritablement indispensable, c’est sa crédibilité, et son seul recours, dans des situations difficiles, c’est la confiance que lui témoigne son gouvernement.»

Bénédict de Tscharner
«Profession ambassadeur»
Editions Cabédita, 328 pages.