Le Tamiflu sous surveillance
L'Agence fédérale américaine des médicaments (FDA) ne peut pas conclure à un lien entre l'antiviral de Roche et les 12 décès d'enfants recensés au Japon.
Conclusion identique de la part de l’Agence européenne du médicament (EMEA), mais les analyses des potentiels effets secondaires du Tamiflu se poursuivent, y compris en Suisse.
Dans un document présenté sous forme de questions/réponses et publié sur son site internet vendredi, la FDA a précisé qu’à partir des informations dont elle dispose, elle «ne peut pas conclure qu’il existe un lien de causalité entre le Tamiflu et les décès d’enfants rapportés».
«L’étude des informations disponibles sur l’innocuité du Tamiflu sur les enfants suggère que la hausse du nombre d’événements neuro-psychiatriques chez les enfants japonais est probablement liée à une conscience accrue de la possibilité d’encéphalopathie liée à la grippe, à un accès croissant de la population au Tamiflu, et coïncide avec une période de suivi intensif des effets secondaires» de ce traitement, précise la FDA dans ce document.
Roche confiant
Dans un rapport publié jeudi, la FDA avait fait état de la mort de 12 enfants qui prenaient du Tamiflu, tous au Japon, mais avait souligné qu’un lien entre ce médicament et les décès restait difficile à établir.
Ce rapport évoque les résultats d’une enquête conduite de mars 2004 à avril 2005 visant à établir les effets de la prise du Tamiflu sur des enfants de moins de 16 ans.
Interrogé jeudi aux Etats-Unis, le fabricant du Tamiflu, le groupe pharmaceutique suisse Roche, avait estimé «qu’il n’y (avait) pas de lien entre le Tamiflu et ces décès» et indiqué qu’il avait «confiance dans le fait que le Tamiflu (pouvait) être utilisé sans problème par les enfants et les adultes».
Le groupe évalue parallèlement à 122 le nombre d’incidents neuro-psychiatriques sur près de 24,5 millions de prescriptions de Tamiflu au Japon, dont 70 se sont produits sur des patients de moins de 16 ans. Aucun décès d’enfant n’a été recensé aux Etats-Unis, a-t-il précisé.
Globalement, Roche rappelle que le Tamiflu a déjà été prescrit à quelque 33 millions de personnes dans le monde, dont 13 millions d’enfants.
La FDA va néanmoins continuer à étudier le profil des effets secondaires potentiels liés à la prise de Tamiflu, «dont les incidents neuro-psychiatriques, chez les patients de tous les âges, y compris les enfants». Elle présentera ses conclusions sur ces effets secondaires à la commission de conseil en pédiatrie d’ici deux ans.
En Europe et en Suisse aussi
De son côté, l’EMEA annonçait jeudi par voie de communiqué avoir eu connaissances de deux cas de «présumés suicides associés au Tamiflu». Il s’agit d’un adolescent de 17 ans en février 2004 et d’un autre de 14 ans en février 2005.
«Dans les deux cas, les adolescents ont montré un comportement anormal ou perturbé, qui a conduit à leur décès», précise l’agence, ajoutant que «jusqu’à présent aucune relation de cause à effet n’a été identifiée entre la prise de Tamiflu et les symptômes psychiatriques», comme notamment des hallucinations.
En Suisse, où le Tamiflu est disponible depuis 1999, comme dans l’Union européenne, les autorités ont décidé de se pencher sur les données les plus récentes. Dans un communiqué, Swissmedic, l’Institut suisse des produits thérapeutiques, fait savoir qu’il prendra d’éventuelles mesures en fonction des nouvelles évaluations et demande aux patients qui auraient constaté des effets secondaires de les signaler aux centres locaux de pharmacovigilance.
swissinfo et les agences
Le Tamiflu a été présenté officiellement sur le marché en 1994 par les laboratoires de l’entreprise de biotechnologie Gilead, aux Etats Unis.
En 1996, Roche a acheté les droits de licence et de commercialisation du médicament.
Jusqu’à présent, 33 millions de malades de la grippe saisonnière dans 80 pays ont été soignés avec du Tamiflu.
– Pour la première fois, Roche a dévoilé récemment ses chiffres de production du Tamiflu, soit 55 millions de traitements en 2005, contre 27 millions en 2004.
– Actuellement, le Tamiflu est fabriqué sur 12 sites de production dans le monde, et Roche est en discussion avec 8 partenaires potentiels, pour leur déléguer une partie de la production.
– Le traitement avec ce médicament est considéré par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) comme potentiellement le plus efficace contre la grippe aviaire. Il ne guérit pas de la maladie, mais en atténue les effets.
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