Les géants suisses de la pharmacie se portent bien
Les résultats semestriels de Roche et de Novartis, les deux géants bâlois de la chimie, sont étonnamment bons dans le climat de morosité ambiante.
Et les deux rivaux comptent bien continuer à croître plus vite que le marché. Mais chacun de son côté.
En tant que piliers de l’industrie suisse, Roche et Novartis sont parmi les entreprises les plus observées du pays.
Avec leur staff global de 130’000 personnes, les deux multinationales ont réalisé l’an dernier des ventes cumulées pour 62 milliards de francs et leur capitalisation boursière atteint 252 milliards.
Roche plus dynamique
Mercredi, Roche annonçait une chute de 24% de son bénéfice au premier semestre 2003, à 1,6 milliard de francs.
Malgré cela, Martin Flückiger, analyste spécialisé dans les produits pharmaceutiques auprès de la Banque Leu, considère que Roche en ce moment est «certainement la plus dynamique» des deux rivales.
Comme pour lui donner raison, Roche confirme vendredi le rachat – pour 1,9 milliard de francs – de la firme américaine Igen International. Une fusion qui met fin à un long conflit de licence entre les deux groupes.
Novartis, de son côté, boucle son premier semestre sur un bénéfice réjouissant de 3,24 milliards de francs, mais c’est Roche qui a enregistré la plus forte hausse des ventes sur la période, avec une croissance de près de 20%.
Comme un phénix
Selon Martin Flückiger, les résultats récents montrent que Roche, après une année difficile, est en train «de renaître de ses cendres, tel le phénix.»
Il y a seulement six mois, peu d’analystes auraient parié que le groupe s’en sortirait aussi bien. En 2002 en effet, Roche avait enregistré une perte sèche de 4 milliards, son plus mauvais résultat en 107 ans d’existence.
Mais cette contre-performance ne devait pas grand chose aux ventes de médicaments.
Célèbre pour ses best-sellers comme le Valium, l’Aspro ou le Rennie, Roche n’en réalise pas moins depuis quelques années un tiers de ses bénéfices sur ses investissements en bourse.
La chute des marchés lui a donc fait perdre des milliards. Et même en ce début d’année, le groupe a déjà perdu 277 millions de francs à la corbeille.
Des lauriers pour Novartis
Par contraste, Novartis est un des rares géants helvétiques à être sorti pratiquement indemne des turbulences boursières de ces deux dernières années.
En 2002, le groupe a engrangé un bénéfice net de 7,3 milliards de francs. Du coup, son patron Daniel Vasella a été porté aux nues par la presse financière comme un des managers les plus performants au monde.
Mais tandis que Novartis récoltait des lauriers, son rival Roche se concentrait sur ce qu’il sait le mieux faire: vendre des médicaments et des produits diagnostiques.
William Burns, chef de la division pharmaceutique de Roche, prédit que le groupe va continuer à enregistrer une croissance de ses ventes à deux chiffres jusqu’à la fin de l’année.
«Nous allons nous concentrer principalement sur trois produits qui prolongent l’espérance de vie des patients cancéreux, explique William Burns. Ils seront des moteurs pour notre croissance.»
Roche a misé gros sur le succès futur du Pegasys, un traitement contre l’hépatite et du Fuzeon, son nouveau médicament révolutionnaire pour les personnes frappées par le virus du sida.
A côté de ces deux best-sellers potentiels, Roche attend également beaucoup du MabThera, un nouveau traitement contre le cancer, qui pourrait un jour lui rapporter jusqu’à quatre milliards et demi de francs par année.
Meilleurs spécialisations
William Burns est également confiant dans l’avenir à plus long terme. Les produits actuellement en développement devraient eux aussi s’avérer un jour très rentables.
Ainsi, certains analystes estiment que l’Avastin, un traitement très prometteur contre le cancer, qui est actuellement en phase de tests, pourrait un jour valoir des milliards de dollars.
Pour Martin Flückiger, ce dynamisme de Roche est encore renforcé par le fait que le groupe a mieux su se spécialiser que son rival.
«Alors que Novartis produit des médicaments pour les généralistes, Roche se concentre surtout sur le cancer, les transplantations et les anti-virus», fait remarquer l’analyste de la Banque Leu.
La fusion dont Roche ne veut pas
Voisines sur le terrain, liées par leur histoire et par leur poids dans le monde économique suisse, Roche et Novartis font régulièrement l’objet de spéculations sur leur prochaine fusion.
Récemment, Daniel Vasella a multiplié les appels au mariage, mais on sait que les descendants de la famille qui a fondé Roche y sont fermement opposés.
Commentant ses premiers résultats 2003, Novartis n’a pas manqué de rappeler que son bénéfice aurait pu être encore meilleur si le groupe n’avait pas enregistré une perte sur les 20% de capital qu’il détient dans Roche
La réponse de Franz Humer ne s’est pas fait attendre. Pour le patron de Roche, les résultats financiers de son groupe confirment que celui-ci est parfaitement capable de s’en sortir seul.
swissinfo, Jacob Greber à Zurich
(traduction, Marc-André Miserez)
– Ensemble, Roche et Novartis ont une capitalisation boursière de 252 milliards de francs suisses
– Les deux groupes emploient 130’000 personnes dans le monde
– En 2002, les deux rivaux ont réalisé ensemble des ventes pour 62 milliards de francs
-Au premier semestre 2003, le bénéfice de Roche a chuté de 24%, à 1,6 milliard de francs
-Durant la même période, Novartis a réalisé un bénéfice de 3,24 milliards de francs
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