Les jeunes pourront travailler la nuit dès 18 ans
Après les sénateurs, les députés ont approuvé jeudi la révision de la Loi sur le travail qui prévoit une réduction de l'âge de protection des apprentis et des jeunes travailleurs.
Ils pourront désormais travailler la nuit et le dimanche dès l’âge de 18 ans, contre 20 ans actuellement. Les syndicats sont en colère.
Au Conseil national (Chambre basse), le camp rose-vert a plaidé en vain pour le statu quo, considérant cet abaissement comme dangereux pour la santé des jeunes travailleurs, en particulier pour les apprentis qui doivent affronter en même temps travail et formation. Son compromis visant à maintenir à 20 ans l’âge limite pour les seuls apprentis a été rejeté.
«Le travail n’est pas moins pénible qu’auparavant et nous ne voyons pas pourquoi les apprentis seraient désormais moins protégés», a argumenté le président de l’Union syndicale suisse Paul Rechsteiner. Selon lui, les dispositions actuelles sont déjà beaucoup plus flexibles que dans d’autres pays.
Chômage des jeunes
L’apprentissage doit rester une formation de qualité et les apprentis ne pas devenir une main d’œuvre bon marché, a ajouté la socialiste Chantal Galladé. Il ne s’agit pas de les exploiter, mais de les introduire dans le marché du travail, a rétorqué le radical (droite) Eduard Engelberger.
Pour le camp bourgeois, l’abaissement de l’âge de protection à 18 ans offre en effet aux jeunes la possibilité de travailler comme des adultes et donc d’être plus concurrentiels. De plus, des étudiants pourront travailler le soir ou le week-end pour financer leurs études. Cela contribuera à réduire le taux de chômage chez les jeunes, a dit démocrate-chrétien (centre droit) Josef Leu.
Une fausse argumentation selon le syndicaliste Jean-Claude Rennwald. «La lutte contre le chômage passe d’abord par une politique économique au service de la croissance et par des mesures en faveur de la création de places d’apprentissage», a-t-il affirmé.
Santé en danger
Mais c’est surtout en mettant en avant les dangers pour la santé que peut représenter une flexibilisation du travail chez les jeunes que la gauche a tenté de faire pencher la balance. Bien sûr, il faut qu’ils puissent intégrer le marché du travail, mais il faut d’abord préserver leur santé, a plaidé l’écologiste Ruth Genner.
Et de rappeler que les jeunes sont extrêmement vulnérables, notamment sur le plan psychique. Ils sont dans une période difficile de leur vie et «il est inacceptable» d’augmenter encore la pression sur leurs épaules. De plus, les jeunes sont plus souvent victimes d’accidents que les autres.
Les jeunes ne seront pas démunis, puisqu’ils disposeront des mêmes protections que les autres travailleurs, a répliqué Hansruedi Wandfluh (UDC, droite dure). Personne ne peut être contraint à travailler la nuit, a-t-il rappelé.
Si ce n’est pas suffisant, le gouvernement pourra toujours édicter de nouvelles dispositions sur le travail de nuit, a précisé le ministre de l’Economie Joseph Deiss. Il pourrait par exemple réglementer le nombre maximal de nuits par année pour les apprentis de certaines branches.
Syndicats en colère
De leur côté, les syndicats sont outrés. «Cette nouvelle attaque contre la jeunesse suisse est purement et simplement scandaleuse», ont écrit jeudi dans un communiqué la Jeunesse socialiste et la Jeunesse syndicale, réunies dans l’Alliance pour une protection efficace de la jeunesse.
La Jeunesse syndicale va demander au comité de l’Union syndicale suisse (USS) de lancer un référendum, a indiqué son président Jean Christophe Schwaab. La décision sera prise le 28 juin.
Les deux organisations font un rapprochement entre l’abaissement de l’âge de protection pour les jeunes et la récente proposition de Thomas Daum, le nouveau directeur de l’Union patronale suisse, de réduire le nombre de jours d’indemnités de chômage pour les jeunes de moins de 25 ans.
Pour l’USS, la décision des Chambres détériorera les conditions de travail des jeunes travailleurs, en particuliers des apprentis. Pareille dégradation de l’apprentissage professionnel est inacceptable, estime l’USS.
swissinfo et les agences
– Les jeunes travailleurs de moins de 19 ans et les apprentis de moins de 20 ans bénéficient d’une protection particulière.
– Il est, en principe, interdit d’employer des mois de 15 ans pour un travail régulier.
– L’engagement de jeunes dès 13 ans est permis pour des travaux légers qui sont d’une durée limitée.
– Enfin, les jeunes ne peuvent pas être exposés à des activités dangereuses (risque élevé d’incendies, d’explosion ou d’accidents et travail dans les mines).
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