Mauvaise consommation des antibiotiques
Les Suisses connaissent toujours mieux la problématique de la résistance aux antibiotiques. Malgré cela, ils ne s'en inquiètent pas et la consommation inappropriée de ces médicaments est en augmentation.
Ce constat émane d’un sondage représentatif de l’institut de recherche gfs.bern mandaté par le par le Fonds national suisse de la recherche scientifique (FNS).
64% des Suisses ont entendu parler de la résistance aux antibiotiques. Ils sont encore plus nombreux à connaître les raisons de ce phénomène: 85% affirment en effet que l’utilisation inutile et la consommation erronée d’antibiotiques sont responsables du problème.
Cette augmentation de la perception s’accompagne paradoxalement d’une diminution de l’inquiétude liée à la résistance bactérienne.
Alors qu’en 2003, seuls 4% des sondés affirmaient avoir consommé de façon inappropriée les antibiotiques qui leur avaient été prescrits, cette part est passée à 11% en 2007, indique mardi le FNS. Or plus une personne est inquiète, plus elle s’en tient à la posologie du médecin.
Disparités en fonction des régions linguistiques
Le degré de consommation erronée d’antibiotiques est avant tout défini par la région linguistique.
Au Tessin, 34% des 1226 personnes sondées par gfs.bern ont affirmé ne pas avoir suivi la posologie. Cette proportion est de 12% en Suisse alémanique et de 4% en Suisse romande.
Seuls 22% des Tessinois sont conscients du problème de la résistance bactérienne. Ceci est clairement en dessous de la moyenne, alors que la part d’indifférents y est de 42% et donc supérieure à la moyenne.
«La Suisse est le pays qui a la plus faible consommation de médicaments par personne en Europe. Le problème de la consommation erronée d’antibiotiques est très helvétique. Il est urgent de sensibiliser la population suisse au problème de la résistance», estime Jean-Claude Piffaretti, responsable de l’étude menée par le FNS.
«Parallèlement, ajoute ce dernier, il est tout aussi urgent de poursuivre l’établissement en Suisse du Centre national de la résistance prévu à Berne.»
Un tel centre, avec son programme SEARCH (Sentinel Surveillance of Antibiotic Resistance in Switzerland), permettra d’assurer un monitorage de l’évolution de la résistance dans notre pays et de proposer rapidement des mesures préventives concrètes et efficaces.
Toujours plus de décès
Alors que 59% des sondés en Suisse croient que la médecine moderne réussira à garder la haute main sur le problème de la résistance bactérienne en renouvelant sans cesse les méthodes de traitement, la résistance aux antibiotiques entraînera pourtant toujours plus de décès.
Dans ce cadre, l’optimisme de la population suisse est dangereux et sa perception doit être modifiée. D’autant plus que, ici comme ailleurs, la médecine est impuissante dans certains cas et que la résistance aux antibiotiques entraîne chaque année un millier d’infections graves et quelque 80 décès.
Selon Karim Boubaker, chef de section «Maladies infectieuses» de l’Office fédéral de la santé publique (OFSP), les résultats de cette étude concernent en premier lieu la relation médecin/patient.
Contrairement à ce qui peut se faire pour l’alcool ou le tabac, l’OFSP ne prévoit aucune campagne de sensibilisation sur le thème des antibiotiques. L’idée est plutôt de renforcer la surveillance épidémiologique et d’accroître la collaboration grâce au futur Centre national de la résistance prévu à Berne.
swissinfo et les agences
Une substance antibiotique est un médicament qui a pour effet de tuer des bactéries de façon ciblée. Il se distingue d’un antiseptique qui détruit tout germe et parfois même la cellule, de manière non ciblée.
De nos jours, beaucoup d’antibiotiques sont connus, mais leur surconsommation ou leur consommation erronée entraînent des résistances de certaines bactéries à certains d’entre eux, et même des multirésistances qui rendent à nouveau incurables les premières maladies que nous avions traitées avec succès avec les antibiotiques.
En conformité avec les normes du JTI
Plus: SWI swissinfo.ch certifiée par la Journalism Trust Initiative
Vous pouvez trouver un aperçu des conversations en cours avec nos journalistes ici. Rejoignez-nous !
Si vous souhaitez entamer une conversation sur un sujet abordé dans cet article ou si vous voulez signaler des erreurs factuelles, envoyez-nous un courriel à french@swissinfo.ch.