Pô triste, le sexe!
Les éditions Glénat publient «Le guide du zizi sexuel», signé Zep pour les illustrations et Hélène Bruller pour le contenu pédagogique. Désormais, grâce à Titeuf, les 9 à 13 ans n'auront plus l'excuse de pécher par ignorance.
Il est loin le temps des choux et autres cigognes. Et presque tout aussi loin le temps où Pierre Perret faisait glousser en disant «tout sur le zizi». A l’époque d’ailleurs, le chanteur ne disait pas tout. Alors que Zep et Hélène Bruller offrent aux préadolescents une véritable encyclopédie du sexe, au format toutefois suffisamment modeste pour être glissée dans le premier cartable venu, entre atlas de géographie et fiches de mathématiques.
Titeuf est donc de retour, mais pas dans une vraie bande dessinée. Car si Zep signe les dessins de ce «Guide du zizi sexuel», c’est Dieu ou la Nature, au choix, qui sont les auteurs du scénario original: les zizis, les foufounes, les tripotages divers et les bébés qui en résultent éventuellement, c’est bien à l’un ou à l’autre qu’on les doit, non?
Les mots pour le dire, les dessins pour le rire
Pour raconter les choses de la vie par le bout pédagogique de la lorgnette, c’est la Parisienne Hélène Bruller qui s’y est collée. Sous le pseudonyme de Shirley Anguerrand, c’est déjà elle qui a travaillé à l’adaptation des histoires de Titeuf pour la Bibliothèque rose (6 tomes parus).
Le livre est structuré en six chapitres: «Etre amoureux», «La puberté», «Faire l’amour», «Faire un bébé», «Se protéger», «Fais gaffe!», celui-ci évoquant quelques questions sensibles telles l’inceste ou la pédophilie. Point commun de la petite centaine de pages que compte l’ouvrage: le sérieux et l’accessibilité des explications, sans tabous.
Titeuf himself signe la préface du manuel en question, et en explique fort bien la teneur: «C’est super important de tout savoir sur le zizi sexuel… Comment on embrasse avec la langue? Est-ce que les spermatozoïdes de Manu avaient déjà des lunettes? Si une femme enceinte mange des épinards, est-ce que le bébé dans le ventre se les mange aussi? Pourquoi les filles crient quand on leur pince les nénés? C’est important de le savoir, parce que si il y a un test de zizi sexuel à l’école, ça pourrait remonter ma moyenne de maths». En effet.
A noter également la présence d’un épilogue sobrement intitulé «Zizi bonus», qui nous offre notamment un joli panorama des sobriquets utilisés pour évoquer les spécificités génitales mâles et féminines, de «robinet» à «grand chauve à col roulé» en passant par «piquet», «gourdin» ou «petit oiseau» pour les uns, de «cheminée» à «coquillage» en passant par «berlingot», «con» ou «petit frisé» pour les autres.
Quand l’information prime
Evidemment, tout cela sera peut-être un peu abrupt pour certains parents, voire pour certains enfants, et on imagine mal que l’ouvrage soit un jour distribué gratuitement dans les écoles catholiques, au hasard. Cela d’autant plus que Zep est loin d’avoir renoncé à l’humour trivial qui caractérise ses personnages et la majorité des cours de récréation.
Au-delà de la morale, on peut toutefois s’interroger sur l’évacuation du mystère, et donc de la poésie, qui entouraient «la chose», comme disaient nos grands-parents. Mais il est vrai qu’en la matière, les ados de ce début de millénaire ont sans doute davantage besoin d’information honnête que de romantisme flou.
Une question toutefois. Pourquoi le zizi s’octroie-t-il sans partage le titre de l’ouvrage, reléguant la foufounette au rôle de personnage secondaire, et cela même alors que le sexe féminin a déjà tant de difficulté à trouver sa place dans le langage des bien-pensants? L’éditeur aurait-il des tabous? Car on ne peut croire que Titeuf soit déjà macho.
Bernard Léchot
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