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Un drone amphibie et des feuilles de carbone d’un atome d’épaisseur

Laboratoire dédié à l’essai des matériaux et à la recherche, l’Empa se concentre de plus en plus sur cette dernière. Visite à deux scientifiques qui travaillent sur des solutions pour demain.

Ce printemps, quelques riverains du Lac de Zurich ont peut-être vu un gros insecte métallique se poser délicatement sur l’eau, au moyen de ses rangées de flotteurs rouges et blancs. C’était le vol – et la plongée – d’essai de MEDUSA, (Multi-Environment Dual Robot for Underwater Sample Acquisition), un drone qui comme son nom l’indique, est aussi capable d’envoyer une petite sonde explorer en profondeur les eaux du lac et y prélever des échantillons.

«Les drones savent déjà faire des tas des choses, mais ce qu’ils ne font pas encore très bien, c’est interagir avec l’environnement, prendre des échantillons par exemple», explique Mirko Kovac, qui dirige à la fois le labo de robotique aérienne à l’Imperial College de Londres et celui de robotique à l’Empa.

MEDUSA est un produit de la collaboration entre ces deux institutions, qui travaillent sur des robots (et pas seulement des drones) capables d’interagir avec les humains et l’environnement en alliant la fermeté d’une main de fer et la douceur d’un gant de velours. Le nouveau drone va intéresser les spécialistes de l’environnement qui veulent prendre des échantillons d’eau pour les ramener au laboratoire, mais il pourra aussi faire des analyses de pH ou autres en temps réel.

Comme pratiquement tous ses collègues de l’Empa, Mirko Kovac se sent très concerné par les enjeux climatiques et la nécessité de miser sur la durabilité. «Je pense que les robots et l’intelligence artificielle peuvent nous aider à affronter cette crise. Et MEDUSA en est un exemple: un robot qui peut collecter plus de données utiles aux scientifiques qui travaillent pour l’environnement, avec moins de risques et moins de coûts. Ce genre de technologies sera particulièrement utile dans les pays en développement, qui n’ont pas les moyens d’avoir de gros robots très chers», résume le jeune scientifique.

La feuille de carbone aux propriétés miracle

Chef du groupe de recherche nanomatériaux, Oliver Gröning travaille quant à lui sur un matériau pressenti comme une future star de la technologie: le graphène. Il s’agit de carbone pur, comme le diamant, sauf que ses atomes ne forment pas des cristaux, mais des couches, tellement fines (3 dixièmes de milliardièmes de mètre), que la nature les empile pour former le graphite des mines de nos crayons.

La difficulté, c’est de séparer ces couches empilées. Les physiciens Andre Geim et Konstantin Novoselov, ont inventé pour cela un procédé similaire à une série d’arrachages au moyen de bande adhésive, qui leur a valu un Prix Nobel en 2010. Deux ans plus tard, l’Union européenne a choisi d’allouer un milliard d’euros à la recherche sur le graphène.

Ce matériau extrêmement résistant peut, par exemple, servir à en renforcer d’autres, à fabriquer des composants électroniques ou à stocker de l’électricité en grandes quantités sur de très petites surfaces, une propriété qui pourrait en faire le matériau des batteries du futur.

Considérant ces promesses technologiques, c’est sur les propriétés électroniques du graphène que travaille Oliver Gröning. «Pour faire un appareil électronique, on a besoin de trois composants de base: un métal, qui conduit le courant, un isolant, qui sépare les différents canaux conducteurs et un semi-conducteur, qui permet de commuter d’un canal à l’autre. Et on peut construire ces trois composants avec du graphène», explique-t-il.

Avec son équipe, ils testent donc différentes formes de feuilles de graphène, dont chacune a des propriétés électroniques différentes. Pour autant, le chef du groupe de recherche ne voit pas les puces au graphène envahir le marché dans les cinq prochaines années, même si elles pourraient être plus petites et moins gourmandes en énergie que celles au silicium.

«Ce que nous faisons ici, c’est de poser les bases pour construire une technologie basée sur ce matériau», résume Oliver Gröning. «C’est encore de la recherche fondamentale, mais inspirée par des applications».

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