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Dernier hommage au jeune homme tué au Tessin

Ce sont les amis de Damiano qui ont porté son cercueil. Keystone

Plus de 2000 personnes ont pris part aux obsèques du jeune étudiant battu à mort dans la nuit de vendredi à samedi lors du carnaval de Locarno.

Au cours de la cérémonie, l’évêque Pier Giacomo Grampa a demandé le pardon pour les trois agresseurs. Il a exhorté à renoncer à d’éventuelles velléités de vengeance.

Mgr Grampa, évêque de Lugano, qui avait rendu visite à Damiano sur son lit de mort à l’hôpital «La Carità» à Locarno, a dû retenir plusieurs fois ses larmes au cours de la messe de funérailles de cet étudiant de 22 ans.

Il s’est dit conscient que les mots de consolation perdaient leur force face à une mort aussi absurde. Sauvagement frappé par trois jeunes d’origine balkanique, Damiano a finalement succombé à ses graves blessures à la tête.

«Un tel acte est absurde. Seules des personnes qui n’accordent aucun sens à la vie peuvent l’avoir commis», a déclaré l’évêque.

Il a également parlé d’un «état d’urgence éducatif». Mgr Grampa a critiqué la société actuelle et son manque de valeurs. Appelant à redécouvrir les «vraies valeurs, les valeurs chrétiennes», il a souligné que les parents de la victimes se trouvaient aujourd’hui dans le même désarroi que ceux des meurtriers présumés.

Mgr Grampa a par ailleurs fait référence à la lettre aux médias des parents et de la sœur de Damiano dans laquelle ils appelaient à ne pas instrumentaliser sa mort. Pour sa famille en effet, cette mort ne doit pas «nourrir la haine et le racisme».

«Nous aimerions que la mort de Damiano contribue à mettre fin à cette culture de violence gratuite qui règne de l’école aux manifestations sportives», écrivait notamment la famille.

Une «leçon de civisme»

Parmi les 2000 personnes venues lui rendre un dernier hommage à Gordola – un village près de Locarno où Damiano résidait – se trouvait notamment l’ancien conseiller fédéral Flavio Cotti.

De nombreux politiciens tessinois s’étaient aussi joints à l’assemblée. Pour sa part, le ministre tessinois de la justice Luigi Pedrazzini a salué la démarche des parents de Damiano, estimant qu’ils avaient donné une «leçon de civisme» à toute la société.

L’Etat doit agir avec fermeté face à des actes de violence de ce type, sans toutefois tomber dans le piège de la vengeance, a-t-il déclaré. Selon lui, «celui qui exerce la violence ou y contribue ne peut pas être toléré. La société tessinoise entend rester une société ouverte et accueillante, mais elle veut également assurer sa sécurité».

Comme Mgr Grampa, Luigi Pedrazzini a également loué le geste de la famille, qui a décidé, une fois le décès du jeune homme prononcé, de faire dons de ses organes. La vie de cinq autres personnes a ainsi pu être sauvée.

Forte affluence

En raison de la forte affluence, la cérémonie a été retransmise par haut-parleurs sur la place de l’église de Gordola. Le silence régnait dans la foule, d’où quelques pleurs s’échappaient.

Au terme de la messe, le cercueil a quitté l’église porté par les amis de Damiano. Un cortège de plusieurs centaines de personnes l’a accompagné jusqu’au cimetière.

Quant à Ivan Prusina, représentant de la communauté croate au Tessin, il a déclaré que les familles des agresseurs étaient écrasées de douleur après ce geste brutal. «Ce sont des personnes simples qui travaillent durement. Aujourd’hui, tout s’effondre autour d’eux», a-t-il ajouté.

En détention préventive

Les trois agresseurs du jeune étudiant sont actuellement en détention préventive. Il s’agit de jeunes hommes âgés de 18, 19 et 21 ans. Tous trois sont originaires des Balkans et ont grandi au Tessin. Deux d’entre eux détiennent le passeport suisse.

L’origine des agresseurs a suscité un débat très vif sur l’intégration des étrangers et la violence des jeunes au Tessin et dans toute la Suisse. Deux partis de la droite nationaliste – l’Union démocratique du centre (UDC) et la Ligue des Tessinois (Lega) – ont interpellé le Parlement tessinoins et demandé l’expulsion des agresseurs au travers de la révocation immédiate de leur citoyenneté suisse.

Le déroulement exact des faits n’est toujours pas clair. Selon les indications rendues publiques jusqu’ici, Damiano a été découvert gisant dans une rue de la vieille ville de Locarno dans la nuit de vendredi à samedi. Ses agresseurs l’avaient roué de coups de pieds. Grièvement blessé à la tête, il est décédé à l’hôpital.

swissinfo, Gerhard Lob à Gordola
(Traduction de l’allemand: Carole Wälti)

La loi fédérale sur l’acquisition et la perte de la nationalité suisse prévoit la possibilité de retirer la nationalité.

L’article 48 stipule: «L’office peut, avec l’assentiment de l’autorité du canton d’origine, retirer la nationalité suisse et le droit de cité cantonal et communal à une double national si sa conduite porte une atteinte grave aux intérêts ou au renom de la Suisse.»

Dans les faits, le retrait de la nationalité ne se conçoit que dans des cas d’une extrême gravité, par exemple pour une personne condamnée pour crimes de guerre.

En ce qui concerne les citoyens étrangers, la Loi fédérale sur les étrangers prévoit une série de mesures: interdiction d’entrée en Suisse, révocation des permis de séjour et non renouvellement de ces permis.

L’Union démocratique du centre (UDC, droite nationaliste) a lancé une initiative intitulée «Pour le renvoi des étrangers criminels». La procédure en est encore au stade de la récolte des signatures.

Pour les familles des trois agresseurs, trouver un avocat n’a pas été chose facile. Nombreux sont les hommes de loi qui ont décliné la proposition, ce qui en dit long sur le climat tendu qui règne actuellement au Tessin.

Les familles des trois agresseurs ont déjà pu avoir des contacts surveillés avec eux. Ils n’ont pas encore été entendus par le Ministère public.

En plus du déroulement des faits, la justice devra également établir la responsabilité de chacun des meurtriers présumés.

Aux deux chefs d’accusation pesant déjà sur eux – homicide intentionnel et agression – pourrait s’ajouter la non assistance à personne en danger.

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