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Sur la trace des guérisseurs en Suisse romande

Après la Suisse romande, Magali Jenny veut poursuivre sa recherche en Suisse alémanique SP

Jadis considérés comme des sorciers, les guérisseurs ont aujourd'hui droit de cité. Magali Jenny, universitaire fribourgeoise, les a suivis en Suisse romande. Résultat: un livre vendu à 45'000 exemplaires. Un best-seller.

Ce qui était au départ un mémoire de licence en anthropologie sociale, préparé à l’Université de Berne, est devenu par la suite un best-seller. « Best-seller », est-il dit en couverture du livre de Magali Jenny : « Guérisseurs, rebouteux et faiseurs de secret en Suisse romande ». Un guide très prisé, si l’on prend en considération le chiffre de vente : 45 000 exemplaires. Ça aussi, c’est indiqué en grand sur la page de couverture du livre, paru chez Favre (Lausanne) en novembre dernier, mis à jour en février 2009 et édité sept fois depuis.

Même son auteur n’en revient pas. « Pendant plusieurs mois, j’étais en tête de placement, aussi bien dans la presse que chez les libraires, confie Magali Jenny. Et jusqu’à présent, mon ouvrage est mis en valeur sur les étals des librairies ».

Un effet crise économique

Détail cocasse : « Guérisseurs… » est exposé et vendu dans les bureaux de poste de Suisse romande. En clair, le bouquin fait exploser le box-office livresque, mais pas la tête de Magali Jenny. Laquelle reste modeste en affirmant que le succès de son livre, elle le doit surtout à son éditeur qui lui a soufflé l’idée d’intégrer à son ouvrage une liste de guérisseurs établis en Suisse romande. Soit 250 adresses triées par canton et par spécialité.

Autres raisons de cet engouement : la conjoncture. « Nous sommes en pleine crise économique, commente Magali Jenny. Or les guérisseurs coûtent trois fois rien comparativement aux médecins. Il y en a même qui ne touchent pas un centime de leurs consultants. A cela s’ajoute un phénomène psychologique : la déception qu’éprouvent certains patients face à la médecine traditionnelle, et le besoin, très en vogue, d’un retour à la nature ».

Magali Jenny est passée par là. Enfant, elle a été soignée par une rebouteuse, à la suite d’un accident de ski qui lui a valu une fracture. « On m’a remis les muscles dans leurs gaines », raconte-telle, toujours confiante en ces pratiques naturelles, millénaires, qui remontent « à la nuit des temps », comme elle le dit dans son livre.

La foi plutôt que la science

Pour autant, l’auteure ne tombe pas dans l’admiration béate. Elle sait que les guérisseurs ont leurs limites, qu’ils se basent bien plus sur la foi que sur la science. Beaucoup d’entre eux affirment avoir reçu le don de guérir de Dieu. Cinquante portraits de rebouteux, faiseurs de secret et autres praticiens émaillent la deuxième partie du livre de Magali Jenny et reflètent la manière de procéder de ces hommes ou femmes chez qui la religion est souvent très présente.

Longtemps, l’Eglise les a poursuivis via des procès en sorcellerie. Aujourd’hui encore, elle a du mal à les reconnaître officiellement. « Qu’à cela ne tienne. A l’heure de la toute-puissance scientifique et technologique, écrit l’auteure, ces méthodes naturelles n’ont pas disparu et c’est grâce aux consultants qui y ont de plus en plus recours qu’elles peuvent survivre à travers les temps ».

Leur survie dépend en partie des mentalités, différentes d’un canton à l’autre. Le Jura est celui qui compte le plus grand nombre de guérisseurs et de consultants. A cela, une explication qui tient à un phénomène climatique. Magali Jenny lâche : « C’était dans le temps un canton isolé par la neige. L’accès aux hôpitaux restait donc difficile pour les habitants qui ont pris l’habitude de se faire soigner par des guérisseurs et qui ont gardé ce pli ».

Magie blanche ?

Le cas est presque le même pour la Gruyère et les vallées du Valais. Genève, en revanche, « canton urbain par excellence est moins attiré par les pratiques paramédicales, observe Magali Jenny. Les guérisseurs qui s’y sont installés, pour la plupart d’origine étrangère, ont suivi des cours et sont inscrits comme thérapeutes ».

Autre motif de différence : la confession. « Dans les cantons catholiques, les gens, habitués à adresser leurs prières aux saints, consultent plus facilement un praticien », affirme l’auteure. Avant d’ajouter que, selon les régions, certains hôpitaux soumettent aux malades une liste de guérisseurs. « Je l’ai observé, dit-elle, surtout dans les services de radio-oncologie où les formules de faiseurs de secret sont appréciées par le patients ».

Magie blanche ? Oui et non, c’est selon que l’on soit sceptique ou confiant.

Magali Jenny, elle, a foi dans son travail. Elle veut absolument poursuivre sa recherche qu’elle étendra à la Suisse alémanique où elle a déjà commencé à « traquer » les guérisseurs. Sa démarche aboutira à la publication d’un livre. Pour quand ? Elle ne nous le dira pas. Elle aussi a ses secrets.

Ghania Adamo, swissinfo.ch

«Guérisseurs, rebouteux et faiseurs de secret en Suisse romande » de Magali Jenny. Editions Favre, Lausanne, 287 pages.

«Née à Fribourg, en octobre 1971, je vis actuellement à Fribourg et j’ai obtenu ma licence en anthropologie sociale, en 2005, à l’Université de Berne.

Ma passion est l’ethnologie sous toutes ses formes.

Mes hobbies sont la lecture, le sport, la moto, le cinéma et l’apprentissage des langues.

Voyageuse dans l’âme, je sais apprécier les moments passés avec ma famille et mes amis (…).

Mon expérience professionnelle riche et hétéroclite, des aptitudes rédactionnelles et verbales, des compétences dans le domaine de l’enseignement (…) me permettent d’être à l’aise dans des fonctions pluridisciplinaires et des milieux multiculturels.

Alliant rapidité de compréhension, curiosité intellectuelle et capacité d’intégration, j’ai assimilé de bonnes connaissances dans des domaines aussi divers que l’hôtellerie, les soins médicaux et le journalisme ».

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