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À la maison, à deux mètres de l’autoroute

Autostrada ai piedi di una bella grande casa.
A 30 mètres de la villa, l'autoroute A2 et son important trafic automobile. Mattia Lento

Beaucoup en Suisse rêvent d’un chalet de montagne romantique ou d’une somptueuse villa au bord du lac, mais plus rarement, d’un spacieux appartement au pied d’une autoroute. Reportage au Tessin, le long du principal axe routier entre le nord et le sud de l’Europe.

Zurich, le 1er mars. De la gare centrale à l’entrée nord du tunnel de base du Saint-Gothard à Erstfeld, une grisaille et de fortes pluies nous accompagnent. Dès la sortie du tunnel à Bodio, nous attend un printemps ensoleillé. Après avoir changé de train à Lugano, nous arrivons à la gare de Maroggia-Melano, non loin du lac Ceresio.

Une application smartphone nous indique que, pour atteindre l’adresse de la maison choisie, nous devons traverser l’autoroute, en un point très proche de la voie ferrée. En quelques minutes, nous sommes devant une élégante villa. Inutile de frapper à la porte car le propriétaire, David Canavesi, est à l’extérieur et nous invite à le rejoindre sur la terrasse située à l’arrière de la maison qu’il partage avec deux autres locataires, Andrea Bernasconi et Enea Sassi. 

Après les présentations, la discussion commence, dans un italien assaisonné ici et là d’expressions en dialecte lombard. Andrea Bernasconi nous supplie d’être rapides parce qu’il ne veut pas manquer la course de ski de fond qui passe.

Tre uomini seduti attorno a un tavolo su una terrazza.
De gauche à droite, Andrea Bernasconi, David Canavesi et Enea Sassi Mattia Lento

«Ul sciur Bernasconi», comme on dit en dialecte tessinois, est un jardinier d’origine tessinoise séparé de sa femme qui a choisi de venir vivre dans un des cinq appartements de la maison, un deux pièces de 80 mètres carrés. La conversation continue. Mais il devient difficile de se concentrer. À 30 mètres de la terrasse, l’autoroute A2 vrombit en permanence.

Andrea Bernasconi ne le supporte plus. Pourtant, il a bien choisi de vivre ici et paie un loyer de 1300 francs par mois. «Par rapport à d’autres tronçons de l’autoroute, il n’y a pas de mur antibruit ici. Malheureusement, notre maison est plutôt bien isolée et pour cette raison nous n’avons aucune protection. Ma chambre donne sur la route, alors je dois mettre des tampons auriculaires pour dormir. Lorsque nous sommes sur la terrasse, nous avons parfois du mal à nous sentir en harmonie les uns avec les autres», témoigne le locataire.

Facciata di una casa e ai suoi piedi un autostrada e i binari dei treni.
À quelques pas d’une autoroute et d’une ligne de chemin de fer très fréquentées, le bruit est presque incessant. Mattia Lento

L’appartement de M. Bernasconi est semblable à celui de M. Sassi, qui fait environ 140 mètres carrés. L’espace de vie est calme et l’autoroute, une fois les fenêtres fermées, ne se fait pas entendre.

Cuisinier de profession, M. Sassi a grandi à Campione. «Dans cet appartement très bien rénové, je me sens vraiment bien. J’ai aussi une bonne relation avec le propriétaire et tous les autres voisins, avec qui nous organisons souvent des apéritifs sur la terrasse ou des barbecues dans le jardin. Je ne paie que 1700 francs pour tout cet espace», témoigne-t-il.

M. Sassi a vraiment besoin d’espace parce qu’il vit avec sa femme, un golden retriver, pas très heureux d’avoir un étranger comme invité, et cinq chats.

Sala da pranzo e salotto.
Dans l’appartement d’Andrea Sassi. Mattia Lento

L’ensemble de l’immeuble a été divisé en appartements par le propriétaire actuel, qui a acheté en 2003 la villa, alors propriété de la municipalité de Maroggia. David Canavesi est également propriétaire et gérant d’un bar populaire dans la région. En plus de cela, il aime aussi investir dans l’immobilier.

Pour lui, vivre les pieds dans l’autoroute est un choix, non une nécessité: «J’ai toujours vécu à proximité de grands axes routiers ou ferroviaires et je m’y suis habitué. Ma chambre donne sur l’autoroute et en été, je dors facilement avec la fenêtre ouverte. Même pour ma femme, l’autoroute n’est pas un élément perturbant. Le problème pour elle, c’est moi, parce que parfois je ronfle, et donc on dort séparément.»

Una terrazza con tavolo e sedie, che dà direttamente sull autostrada.
En terrasse. Mattia Lento

Reste qu’il ne fait aucun doute que l’A2 est une plaie pour tout le Mendrisiotto, la région du sud du Tessin à la frontière avec l’Italie. Le cas de Roveredo, une commune grisonne récemment libérée du joug de l’autoroute, fait cependant naître l’espoir d’une solution avec le creusement d’un tunnel autoroutier.

Un uomo appoggiato al parapetto di una terrazza
David Canavesi est habitué au bruit de l’autoroute. Mattia Lento

Questionné sur ce point, M. Canavesi, est néanmoins sceptique: «La dernière proposition dont j’ai entendu parler pourrait même aggraver notre situation en tant que résidents de Melano. Le projet en question concerne le prolongement d’un tronçon de l’autoroute de quatre à six voies, son enfouissement partiel et la construction d’un grand carrefour à Melano. Nous verrons comment ça finira.»

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Traduit de l’italien par Frédéric Burnand

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