«Watt d’Or» pour une architecture écologique
Pour la 2e fois, le «Watt d'Or» a récompensé les meilleurs projets énergétiques de l'année dans 5 catégories. Parmi eux, celui de l'architecte fribourgeois Conrad Lutz.
L’Office fédéral de l’énergie (OFEN) a choisi de donner du glamour à son palmarès de début d’année avec un petit air de cérémonie des Oscars à la mode de Hollywood.
«Ce prix honorifique récompense la capacité d’innovation tournée vers l’avenir de personnes et d’organisations travaillant dans le sens de notre politique énergétique», explique Walter Steinmann, directeur de l’OFEN et membre du jury.
Cette année, le «Watt d’Or» a primé 7 projets sur les 19 soumis à un jury comptant, entre autres politiciens, scientifiques ou entrepreneurs, le sauteur à ski Simon Ammann ou le syndic de Lausanne Daniel Brélaz,.
Cela au cours d’une cérémonie sur la scène du Kursaal de Berne, avec petits fours, concert et remise des trophées devant un parterre de tout ce qui compte dans le domaine énergétique. Une mer de costumes sombres avec, ça et là, une silhouette «baba cool» et barbue, et même quelques femmes. Le tout sponsorisé par le groupe d’électricité EOS.
Revanche d’un soixante-huitard
Parmi les lauréats, on retiendra l’un des deux bureaux d’architectes primés dans la catégorie «bâtiment». Il s’agit de Conrad Lutz à Givisiez (Fribourg) pour ses «Green Offices», bâtiment pour lequel il a obtenu en 2007 le premier label Minergie-P-Eco de Suisse.
L’architecte fribourgeois ne cache pas sa satisfaction de voir récompenser ses «idées soixante-huitardes». «En 1973, j’étais en pleine formation et j’ai été marqué par les week-ends sans voiture et le choc pétrolier», raconte-t-il.
A l’époque déjà, il a conçu son premier bâtiment démontrant que l’isolation était rentable, financièrement. «Cela a été le départ de mon histoire dans l’écologie et le développement durable. A l’époque, on nous a traités de tous les noms d’oiseaux, mais l’histoire nous a donné raison: aujourd’hui, nous sommes tous forcés de faire attention à l’énergie.»
Rigueur dans tous les domaines
Les «Green Offices» de l’atelier Lutz démontrent qu’il est possible de construire un bâtiment à très faible impact écologique et à très faible coût. Ce volume de trois étages offre 1300 m2 de bureaux à huit entreprises soucieuses de développement durable, dont l’atelier Lutz Architecte.
Hormis les fondations, le bâtiment est entièrement en bois non traité et coupé dans la région. «Ceci afin d’économiser au maximum l’énergie grise, soit l’énergie nécessaire à la fabrication et au transport des matériaux», précise Conrad Lutz.
«L’économie réalisée correspond à l’énergie nécessaire pour chauffer le bâtiment pendant près de 100 ans!» D’où l’obtention du label Minergie-P-Eco, beaucoup plus exigeant que le déjà très convoité Minergie-P.
En outre, le bâtiment est négatif en CO2: il absorbe plus de gaz carbonique qu’il n’en a rejeté lors de sa construction. Et 94% de l’énergie consommée est renouvelable. L’eau chaude est produite par des capteurs solaires sur le toit et le chauffage par une chaudière à pellets de bois. Quant à l’électricité, elle est de source éolienne.
L’eau de pluie est récupérée et les toilettes sont sèches et biodégradables, avec des copeaux de bois qui transforment les déjections en humus. Le coût total des «Green Offices», terrain compris, s’élève à 3,2 millions de francs.
Un avenir souriant
Aujourd’hui, le savoir-faire est là, les matériaux sont sur le marché et les entreprises de construction commencent à suivre le mouvement.
Y a-t-il encore des progrès à faire? «Au niveau physique de la consommation énergétique, on est arrivé à 6% dans les ‘Green Offices’. Difficile d’aller plus loin, à cause du chauffage. Mais il y aurait d’autres domaines à explorer», s’enthousiasme Conrad Lutz.
Et les «Green Offices» vont faire des petits. «Nous allons commencer cet été la construction d’un projet de même taille pour une commune de Haute Savoie et un autre suivra en Gascogne.»
L’architecte annonce également plusieurs grands projets en Suisse, «où les gens ont sauté le pas, comme des institutions financières et publiques qui comprennent l’obligation de se lancer dans le développement durable».
swissinfo, Isabelle Eichenberger
Depuis janvier 2007, cette distinction honorifique est décernée chaque année par l’Office fédéral de l’énergie (OFEN).
Elle récompense des projets innovants et présentant un avantage énergétique en termes de confort, d’efficacité ou d’utilité pour la société. Ils doivent aussi être intéressants pour le grand public.
Les 16 jurés ont récompensé 7 projets sur 19 retenus (80 candidatures) avec un certificat et un trophée.
Catégorie «société»: projet de développement durable de Coldrerio (Tessin).
«Technologies énergétiques» et «énergies renouvelables»: centrale à biomasse de Tegra Holz & Energie de Domat/Ems (Grisons).
«Mobilité économe en énergie»: la carrosserie Hess de Bellach (Soleure) et le voyagiste Eurobus de Windisch (Argovie) pour la conception et l’exploitation d’un bus hybride.
«Bâtiment»: Viridén + Parner (Zurich) et Conrad Lutz Architecte à Givisiez (Fribourg).
Prix spécial: Josef Jenni à Berthoud (Berne), pionnier de l’énergie solaire.
Né à Vevey en 1953, il suit une formation de dessinateur en bâtiment, des études d’architecture, de construction-bois et de géobiologie.
En 1996, il crée Conrad Lutz architecte Sàrl à Fribourg.
Depuis 1989, enseigne à l’école d’architecture du bois à Bienne, puis à l’école d’architecture de Fribourg (où il crée un cours de développement durable en 2004) et à la haute école HES-SO.
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