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Beat Richner, une vie consacrée à l’enfance cambodgienne

Beat Richner
Beat Richner examine un jeune patient, soigné dans l’un des hôpitaux qu’il a fondé au Cambodge, en février 2001. Keystone

Décédé dimanche à Zurich, Beat Richner a passé l’essentiel de sa vie au Cambodge pour y soigner des générations d’enfants, dans un pays ruiné par 30 ans de guerre dont près de quatre sous la coupe concentrationnaire des maoïstes de Pol Pot. Hommage à l’œuvre du pédiatre, publié une première fois à la suite de son départ du Cambodge l’année dernière.

Un caractère bien trempé et une foi à même de déplacer des montagnes: c’est l’impression que m’avait faite Beat Richner dès notre premièreLien externe rencontre à Phnom Penh au début des années 90. Mais sans le soutien déterminé du roi Sihanouk (mort en octobre 2012), le projet de Beat Richner au Cambodge aurait rapidement tourné court.

Exsangue, manquant de tout, le Cambodge était alors sous protectorat de l’ONU et toujours en guerre contre la guérilla maoïste de Pol Pot, malgré la présence des casques bleus et les accords de paix conclus à Paris en 1991. Les besoins en termes de santé étaient donc immenses.

Mais en pratiquant une médecine selon les normes helvétiques dans des hôpitaux dotés d’équipements de pays riches, le pédiatre suisse s’était mis à dos un peu près tout le monde les premières années de son retour au Cambodge en 1992. Un pays qu’il avait quitté en 1975 juste avant la prise du pouvoir par les Khmers rouges, après une année environ à officier comme pédiatre à l’hôpital Kantha Bopha de Phnom Penh.

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Un ministère de la Santé corrompu

Après l’avoir appelé, avec le roi Sihanouk, à réhabiliter l’hôpital Kantha Bopha (ouvert en 1962), le gouvernement cambodgien s’est assez vite montré hostile à son projet, le Suisse se montrant très critique à l’égard de la corruption, en particulier au sein du ministère de la santé, un problème toujours aigu aujourd’hui. Et ce n’est que depuis quelques années que le gouvernement reconnait pleinement l’impact décisif de ses 5 hôpitaux sur la santé des jeunes Cambodgiens et les soutient financièrement.   

Quant à la coopération suisse (DDC), elle a mis des années à soutenir de manière conséquente ses hôpitaux, alors que nombre d’ONG, suisses ou non, ont longtemps critiqué l’approche originale développée par Beat RichnerLien externe. Tant Berne que l’OMS considéraient qu’il délivrait une médecine bien trop chère et sophistiquée pour un pays si pauvre. Circonstance aggravante, les soins étaient délivrés gratuitement dès les débuts de l’aventure en 1992. Soit tout le contraire des préceptes d’alors des politiques de développement en matière de santé.

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Alors oui, les critiques qui ont ponctué l’action de Beat Richner au Cambodge étaient logiques, tant il allait à rebours de la doxa développementaliste. Oui, comme l’ont souligné des ONG, le financement des 5 hôpitaux n’est toujours pas pérenne, même si la Suisse s’est engagée à trouver une solution durable avec la Fondation Kantha Bopha et le gouvernement cambodgien, suite à la démission de Beat Richner. Mais durant 25 ans, ses hôpitaux ont sauvé les premières générations d’un Cambodge qui commençait à peine à se remettre de la guerre.

Comme me le déclarait en 2013 Vann Molyvann, ministre et architecte de Sihanouk entre 1956 et 1970: «Par son action depuis 20 ans, Beat Richner a pratiquement sauvé le Cambodge.»

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