La Suisse finance-t-elle le débarquement de migrants en Italie?
Un soutien financier du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) à l’organisation non gouvernementale MOAS fait débat. En effet, cette ONG aide des migrants à débarquer en Italie. Les autorités fédérales précisent qu’il ne s’agissait que d’une contribution pour faire face à l’urgence.
Ces derniers jours, les polémiques sur les activités de cette ONG qui a sauvé la vie à des milliers de migrants en Méditerranée a aussi touché les autorités suisses. La semaine dernière en effet, «Il GiornaleLien externe» a accusé la Suisse de «financer l’invasion de l’Italie». Il y a parmi les soutiens de l’organisation humanitaire MOASLien externe (Migrant Offshore Aid Station), qui fait la navette entre les côtes libyennes et les ports italiens avec un navire de 40 mètres, «un bureau du ministère suisse des Affaires étrangères», écrit ce quotidien appartenant à la famille Berlusconi.
Et en effet, la Direction suisse du développement et la coopération (DDCLien externe) a bel et bien versé 250’000 francs l’an dernier en faveur de l’OGN maltaise.
Opérations contestées
Député de l’Union démocratique du centre (UDC/ droite conservatrice), le député Marco Chiesa a annoncé qu’il adressera deux questions au gouvernement sur ce thème lors de la session parlementaire qui a débuté ce lundi. L’activité de l’ONG a en effet suscité l’intérêt d’au moins trois procureurs italiens.
En Italie, on soupçonne certaines associations humanitaires d’être en contact avec les trafiquants libyens qui leur communiqueraient la localisation des embarcations de migrants, facilitant ainsi les débarquements sur les côtes italiennes. On soupçonne même ces humanitaires d’être financés par des organisations criminelles.
Pas d’enquête en cours sur la MOAS
Comme d’autres ONG, la MOAS a été entendue le 4 mai dernier par la Commission de la défense du Sénat italien, à qui elle a fourni des éclaircissements.
Il convient encore d’ajouter que devant la Commission parlementaire anti-mafia, le procureur de Catane a précisé le 9 mai qu’il ne s’agit que d’hypothèses d’enquête et qu’il n’existe pour le moment pas d’éléments de preuve. La MOAS ne fait pour l’heure pas l’objet d’une enquête judiciaire. Elle a seulement participé spontanément à des auditions parlementaires, comme l’avaient fait d’autres organisations comme Médecins sans frontières et Save the Children.
Les précisions de Berne
Quoi qu’il en soit, le conseiller national Marco ChiesaLien externe demande que le gouvernement fasse toute la lumière sur le financement de l’ONG par la DDC. D’autant que dans une réponse à une interpellation du député socialiste Carlo Sommaruga datant d’août 2015, ce même gouvernement avait expliqué ne pas avoir l’intention de financer la MOAS.
Alors pourquoi ce revirement en 2016? Porte-parole du DFAE Pierre-Alain Eltschinger indique qu’il s’agissait d’un «financement d’urgence pour aider à faire face à une recrudescence des besoins de type humanitaire» qui s’était manifestée à l’automne dernier. Face à l’augmentation sensible du nombre de tragédies en Méditerranée, «la Confédération a considéré de manière favorable une contribution de 250’000 francs à MOAS», mais à condition que les opérations de sauvetage soient conduites «en totale coordination avec les autorités maritimes italiennes», déclare encore le porte-parole, qui précise qu’un nouveau financement n’est «pas prévu».
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