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Des crimes de guerre en Ukraine selon les enquêteurs onusiens

Le président de la Commission d'enquête internationale sur l'Ukraine Erik Møse a mis en cause l'armée russe mais aussi les militaires ukrainiens (archives). KEYSTONE/MARTIAL TREZZINI sda-ats

(Keystone-ATS) Les enquêteurs indépendants mandatés par l’ONU sur l’Ukraine ont dévoilé à Genève leur première évaluation des violations dans ce pays depuis le début de l’offensive russe. « Des crimes de guerre ont été perpétrés », a affirmé vendredi leur président Erik Møse.

Devant le Conseil des droits de l’homme, le juge norvégien a révélé les enseignements de l’investigation menée par la Commission à Kiev, Tcherniguiv, Kharkiv et Soumy. Des dizaines de sites ont été visités et plus de 150 victimes et témoins ont été entendus. En revanche, malgré son souhait, la Commission d’enquête internationale indépendante de l’ONU n’a pu dialoguer avec les autorités russes, ni se rendre dans les territoires contrôlés par Moscou.

« Nous n’avons jusqu’à présent pas conclu à des crimes contre l’humanité », a affirmé à la presse M. Møse. Il manque des preuves et des analyses pour le faire, selon lui. Son collègue Pabli de Greiff a lui fait remarquer que « les situations qui constituent de possibles crimes de guerre sont significativement plus nombreuses » côté russe.

Les trois membres de la Commission dénoncent notamment le recours russe à des « armes explosives de large portée » qui a provoqué « d’immenses dommages et souffrances pour les civils ». Autre reproche aussi, des attaques indiscriminées ont été lancées, soit lors de bombardements, soit par des armes à sous-munitions.

La Commission relève aussi le nombre important d’exécutions dans les régions dans lesquelles elle s’est rendue. Notamment à Boucha où des fosses communes ont été trouvées, a ajouté M. Møse. Les enquêteurs disent mener des investigations sur 16 différents sites, mais ils ont reçu des « accusations crédibles » sur davantage de victimes qu’ils ont chercher à authentifier. Parmi les indications de ces crimes, la Commission mentionne des détentions de victimes avant leur exécution, de même que des mains liées dans le dos ou encore des blessures par balle visibles.

Cas d’abus par l’armée ukrainienne

De même, elle a reçu des témoignages « cohérents » de torture pendant des détentions illégales par l’armée russe. Coups, chocs électriques ou nudité contrainte sont notamment dénoncés. Certaines personnes ont été acheminées dans des prisons russes où elles ont été retenues pendant des semaines. D’autres sont portées disparues.

Les militaires russes ont également perpétré des violences sexuelles, sur des personnes âgées de 4 ans comme des personnes âgées. Des enfants ont aussi été torturés, détenus illégalement ou victimes de déplacements forcés. Et la Commission a aussi relevé quelques cas d’abus par l’armée ukrainienne contre des militaires russes.

L’ONU avait dénoncé de son côté depuis des mois des actes équivalant à des crimes de guerre. Elle a notamment pu vérifier des milliers de victimes civiles, des centaines d’exécutions illégales ou encore des centaines de disparitions forcées. La Commission rendra elle un rapport à l’Assemblée générale de l’ONU en octobre, avant d’en relayer un cinq mois plus tard environ au Conseil des droits de l’homme à Genève.

Demande pour une investigation à Izioum

Vendredi devant le Conseil, la Russie n’a pas participé aux discussions. De son côté, le représentant ukrainien a appelé la Commission à mener des investigations sur les centaines de cadavres retrouvés récemment dans un charnier à Izioum.

Il a demandé également un Tribunal spécial pour les crimes russes dans son pays. « Nous souhaitons assurément regarder » la situation à Izioum, où de nombreux cadavres ont été retrouvés, a ajouté M. Møse, mentionnant la collaboration « très satisfaisante » avec le procureur général ukrainien. Les contacts avec la Cour pénale internationale (CPI) sont fréquents, a ajouté de son côté M. de Greiff.

L’ambassadeur suisse auprès de l’ONU à Genève Jürg Lauber a lui salué dans la Commission « une étape fondamentale » pour établir les responsabilités et obtenir la justice. Alors que les Etats-Unis appellent les enquêteurs à se pencher sur le « filtrage » et les disparitions forcées attribuées à la Russie.

La Commission va poursuivre ses investigations sur les régions qu’elle a abordées et sur le reste du pays. Outre les atteintes aux personnes, elle veut porter celles-ci sur la destruction d’infrastructures civiles et des ressources économiques ou encore la légalité dans les changements locaux de certaines administrations.

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