Le TPIY ferme ses portes après près de 25 ans d’existence

(Keystone-ATS) Le TPIY, tribunal de l’ONU qui a jugé nombre de personnes accusées d’atrocités durant les guerres des années 1990 en ex-Yougoslavie, a mis fin à ses activités jeudi après 25 ans d’existence. S’il a pu rendre justice, il n’a pas permis une réconciliation.
Ce que l’on doit au Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), c’est qu' »aujourd’hui, il est courant que le Conseil de sécurité de l’ONU exige que les responsables des pires crimes rendent des comptes (…). La notion de devoir rendre des comptes s’est enracinée dans la conscience collective », a déclaré le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres lors d’une cérémonie à La Haye.
A la création du TPIY, en 1993, la guerre faisait toujours rage dans les Balkans. Rares étaient ceux qui pensaient que les poursuites engagées par le tribunal avaient des chances réelles d’aboutir. Pour autant, le TPIY a réussi à obtenir le transfert des 161 suspects qu’il avait inculpés, puis à les juger.
Première depuis Nuremberg
Cette série de procès marque la première entreprise sérieuse de juger des criminels de guerre depuis les procès de Nuremberg, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale.
Le TPIY était quelque peu tombé dans l’oubli ces dernières années, mais le procès Ratko Mladic l’a replacé sur le devant de la scène en novembre. L’ancien chef de l’armée bosno-serbe a été reconnu coupable de génocide pour le massacre de milliers de musulmans non armés dans l’enclave de Srebrenica, dans l’est de la Bosnie, à l’été 1995.
Quelques jours plus tard, le général bosno-croate Slobodan Praljak absorbait du cyanure après le maintien en appel de sa peine de 20 ans de prison. Il est mort peu après son hospitalisation.
Le TPIY a compté aussi parmi les suspects qu’il a jugés l’ancien dirigeant bosno-serbe Radovan Karadzic, reconnu coupable de génocide et condamné à 40 ans de prison en 2015. En 2006, l’ancien président serbe Slobodan Milosevic, dont le procès traînait depuis des années, est mort d’une crise cardiaque dans sa cellule avant que la cour ait pu rendre son verdict.
Pas de réconciliation
Certaines victimes ont assisté jeudi à la cérémonie de clôture, notamment Munira Subasic, venue représenter les « mères de Srebrenica », organisation qui a fait pression afin que justice soit rendue pour les quelque 8000 victimes du massacre commis par les forces bosno-serbes en 1995.
Les artisans du TPIY espéraient que l’établissement de la vérité historique et le jugement des responsables des pires atrocités aiderait les différentes communautés de la mosaïque de l’ex-Yougoslavie à se réconcilier.
Mais si le tribunal a pu rendre justice, il n’a pas, de l’avis du procureur Serge Brammertz, pu permettre une réconciliation. « Dans toute la région, les criminels de guerre sont considérés comme des héros et les victimes sont ignorées », a-t-il constaté.
Haendel convoqué
Lors de cette cérémonie au ton doux amer, Alfons Orie, le juge qui a présidé les débats au procès de Ratko Mladic, a interprété une partie de l’oratorio de Georg Friedrich Haendel, « Solomon », inspiré du roi d’Israël resté célèbre pour son « jugement de Salomon ».