Réforme de l’AVS: les femmes devraient travailler un an de plus
(Keystone-ATS) Les femmes devraient travailler jusqu’à 65 ans avant de prendre leur retraite. Le Conseil des Etats a accepté lundi par 31 voix contre 13 le projet de réforme de l’AVS. Il a aussi serré la vis sur les compensations devant accompagner cette mesure.
Une réforme est urgente et nécessaire, a expliqué Erich Ettlin (Centre/OW) au nom de la commission. Depuis 2014, les recettes et les dépenses de l’assurance sont en déséquilibre. Il faut trouver 26 milliards de francs d’ici 2030 pour garantir le niveau des prestations et assurer le financement de l’AVS.
Les sénateurs n’ont pas remis en question ce tableau, dû au vieillissement de la population. Les modalités du projet ont en revanche été controversés.
L’harmonisation de l’âge de la retraite des femmes avec celui des hommes devrait rapporter 10 milliards de francs. Depuis la 10e révision de l’AVS, en vigueur depuis 1997, le peuple y a toutefois toujours dit « non ».
Ce relèvement de 64 à 65 ans est inévitable, a défendu le camp bourgeois. Les jeunes générations seront pénalisées si nous échouons encore, a estimé Hannes Germann (UDC/SH). L’égalité passe par un âge de référence harmonisé, d’autant plus que l’espérance de vie des femmes est plus élevée que celle des hommes, a ajouté Brigitte Häberli-Koller (Centre/TG).
Inégalités pointées du doigt
La réforme prône la solidarité, mais n’atteint pas son objectif, a répondu Marina Carobbio (PS/TI). Les femmes touchent des rentes globalement inférieures d’un tiers à ce que perçoivent les hommes.
Cet écart est le reflet des inégalités salariales et des inégalités subies tout au long du parcours professionnel. Les femmes sont perdantes, car elles interrompent souvent leur carrière, travaillent à temps partiel ou ont des bas salaires, a poursuivi Maya Graf (Verts/BL).
Le relèvement de l’âge de référence n’est ni une évidence, ni un acquis, mais c’est une année de rentes à verser en moins, a estimé le ministre des affaires sociales Alain Berset. Et des compensations accompagneront cette mesure. Elles concernent les femmes de la génération transitoire. C’est un élément essentiel du compromis, à la hauteur de l’enjeu, a indiqué le conseiller fédéral.
Modèle en « trapèze »
Les compensations devraient être accordées aux femmes nées entre 1959 et 1967 si la réforme entre en vigueur en 2022. Mais par 19 voix contre 12 et 13 abstentions du camp rose-vert, le Conseil des Etats a intégré un modèle « en trapèze », moins généreux que le Conseil fédéral.
Les femmes de la génération transitoire devraient obtenir un supplément à la rente de 150 francs par mois. En fonction du moment du départ à la retraite, ce dernier augmenterait, avant de se stabiliser puis de diminuer à nouveau. Les coûts de ce modèle, amené par le Centre, seraient de 430 millions de francs. La version du gouvernement porte sur 700 millions.
La Chambre des cantons a encore serré la vis dans la flexibilisation de la retraite. Les femmes devraient pouvoir prendre leur retraite anticipée entre 63 et 70 ans, alors que le gouvernement proposait 62 ans. Une mauvaise idée pour gagner en votation, a mis en garde Alain Berset.
Autre adaptation apportée par les sénateurs: si quelqu’un a gagné moins de 56’880 francs par an, la réduction en cas de perception anticipée de la rente devrait être de 40% moindre par rapport à ce qui serait adéquat du point de vue actuariel.
Contre l’avis de sa commission, le Conseil des Etats a encore refusé par 18 voix contre 13 et 13 abstentions de faire une fleur aux couples mariés en relevant le plafond de leurs rentes de 150 à 155% de la rente maximale.
Hausse limitée de la TVA
Grâce à la réforme de l’imposition des entreprises couplée au financement de l’AVS, acceptée par le peuple en 2019, le fonds AVS bénéficie de 2 milliards par an. Mais la réforme devrait aussi passer par une hausse de la TVA que le Conseil des Etats ne veut pas trop élevée. Par 29 voix contre 13, il a décidé de limiter l’augmentation à 0,3 point de pourcentage, à 8%.
Sa commission proposait une hausse de 0,3% dans un premier temps, puis de 0,4% supplémentaire si le fonds de compensation AVS devait tomber en dessous du seuil correspondant à 90% du montant des dépenses annuelles. Le Conseil fédéral préconisait à l’origine une hausse unique de 0,7 point.
Le dossier passe au Conseil national.