Trois activistes lauréats du Prix Martin Ennals à Genève
(Keystone-ATS) Le Prix Martin Ennals couronne cette année trois activistes des droits humains. La journaliste vietnamienne Pham Doan Trang, le Burkinabé Daouda Diallo et le Bahreïni Abdul-Hadi Al-Khawaja sont récompensés, a annoncé mercredi à Genève la Fondation du même nom.
Jusqu’à présent, ce prix Nobel des défenseurs des droits humains mettait en avant un lauréat auquel s’ajoutaient deux finalistes. « La décision a été prise par le Conseil de fondation et le jury de ne plus faire de différence », a affirmé à Keystone-ATS une porte-parole. Désormais, trois militants seront honorés chaque année.
« Le jury a choisi trois figures inspirantes du mouvement des droits humains », relève le président du jury, Hans Thoolen. Au Vietnam, Pham Doan Trang a lutté pour les libertés fondamentales pendant de nombreuses années, avant d’être condamnée récemment à neuf ans de prison. L’ONU a demandé sa libération, alors que la Fondation Ennals est inquiète pour sa santé.
Cette militante « souffre de graves maladies et n’a pas d’accès à un médecin, ni à un avocat », a affirmé à la presse l’un de ses conseillers. Elle a été battue par les forces de l’ordre, une attitude qui l’a handicapée partiellement. Ce prix est « le message le plus fort » pour le régime autoritaire au Vietnam que la communauté internationale la soutient, a affirmé son proche.
Contraint à de la clandestinité
De son côté, M. Diallo documente les violations perpétrées par l’armée burkinabé et les djihadistes. Son organisation a identifié plus de 1000 exécutions extrajudiciaires de civils dans le cadre des violences.
Une situation qui lui a valu du harcèlement, des vols et des menaces pour sa propre sécurité, notamment après un massacre qui avait fait des dizaines de victimes également en 2019. « Je suis souvent obligé de vivre dans la clandestinité », a affirmé M. Diallo, dont l’habitation a été vandalisée à plusieurs reprises.
Au lendemain des violences de 2019, il dit avoir reçu de nombreux appels d’organisations à se réunir pour dénoncer les exactions. Il a alors lancé son institution qui collabore avec le Comité international de la Croix-Rouge (CICR). Ce prix renforce la « crédibilité » de l’action qu’il mène, selon lui.
Cérémonie reportée avec le coronavirus
Au Bahreïn, M. Al-Khawaja, l’un des principaux contestataires de son pays, reste emprisonné depuis dix ans. ll avait été condamné après avoir été accusé de complot pour renverser le régime et a mené plusieurs grèves de la faim. Sa sécurité en prison demande « une intervention rapide », dit la Fondation Martin Ennals.
« Il a payé le prix de son engagement », de l’exil à la prison en passant par la torture, a affirmé sa fille. « Il est difficile de savoir à quoi s’attendre » de la part des autorités après cette récompense, a-t-elle ajouté, n’excluant pas des représailles mais insistant sur l’importance de soutenir son activisme.
Elle a appelé à la libération de tous les détenus politiques et défenseurs des droits humains. Et de dénoncer l’attitude des gouvernements européens qui font affaires avec les autorités du Bahreïn.
Les trois lauréats recevront de 20’000 à 30’000 francs. Tout dépendra de la recherche de fonds, précise la porte-parole. En raison de la pandémie, la cérémonie a dû être reportée au 2 juin prochain.
Le Prix Martin Ennals, soutenu par la Ville de Genève, est remis chaque année depuis une trentaine d’années par dix ONG. Parmi elles se trouvent Amnesty International, l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH) ou encore Human Rights Watch (HRW), qui se réunissent à Genève.