Amnesty International n’épargne pas la Suisse
L'organisation de défense des droits de l’homme dénonce les maltraitances commises en Suisse par la police contre des étrangers, des réfugiés entre autres.
Dans son rapport 2004, Amnesty International (AI) s’inquiète aussi de la restriction du droit d’asile et des discours xénophobes de la droite dure.
Amnesty International (AI) consacre trois pages à la Suisse dans son bilan annuel et mondial sur la situation des droits humains. L’ONG souligne en premier lieu l’évolution du climat politique en rappelant la victoire du parti de la droite dure (Union démocratique du centre / UDC) lors des dernières élections fédérales.
Citant le Haut commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR), Amnesty relève que la campagne électorale a été marquée par des slogans «parmi les plus ouvertement hostiles au droit d’asile jamais utilisés à ce jour par un parti de premier plan en Europe».
Amnesty international évoque ensuite des cas de mauvais traitements et le recours «excessif à la force» imputables aux forces de l’ordre.
«Plusieurs centaines de plaintes sont déposées chaque année auprès de la police ou auprès d’un ombudsman», détaille Manon Schick.
La porte-parole de la section helvétique d’AI précise aussi que la majorité de ces requêtes n’aboutissent pas.
«Généralement, la police mène une enquête interne, mais n’y donne pas suite. Il arrive également que le plaignant retire finalement sa plainte», explique Manon Schick.
Requérants encagoulés
Dans son rapport, Amnesty évoque en particulier une affaire qui s’est déroulée -en juillet 2003 à Glaris – dans un centre pour requérants d’asile.
«Au petit matin, détaille le rapport, des policiers ont pénétré de force dans les pièces où dormaient les demandeurs d’asile. Ils leurs ont ligoté les pieds et les mains, les ont encagoulés et les ont photographiés, alors que certains d’entre eux étaient totalement nus ou presque.»
«Comme a conclu le juge qui a enquêté sur cette affaire, la formation des policiers incriminés a souffert de graves lacunes », souligne Manon Schick.
Selon Manon Schick, «en Suisse, il n’est pas nécessaire d’améliorer le cadre juridique. Mais les autorités judiciaires cantonales doivent mieux appliquer les lois existantes. Quant aux forces de l’ordre, elles doivent veiller à la formation de leurs employés».
De son côté, Boël Sambuc va plus loin encore dans la critique. «Pour lutter contre ces violences, nous préconisons la création d’une autorité de plainte pour les victimes de ces sévices qui soit indépendante de la police», affirme la vice-présidente de la Commission fédérale contre le racisme (CFR).
«Les violences policières à l’encontre des minorités étrangères constituent l’une des principales préoccupations de la CFR », souligne Boël Sambuc.
L’ONG Amnesty international pointe, elle, d’autres dérives des forces de l’ordre : «A l’occasion de plusieurs manifestations, la police aurait eu recours à la force de manière excessive et injustifiée, en particulier lors du sommet du G8 l’été dernier».
Violence contre les femmes
Amnesty mentionne également les sévices infligés aux femmes. «En Suisse, 40 femmes meurent chaque année suite à des violences conjugales», rappelle l’ONG.
Sur ce dossier, Amnesty relève aussi «un nombre important de cas de mutilation génitale parmi les migrantes d’origine africaine».
D’une manière générale, les violations des droits humains qui persistent en Suisse s’inscrivent dans un contexte européen, selon Amnesty International.
«Un grand nombre de pays européens, conclut Manon Schick, durcissent en effet leur politique d’asile. Nous constatons également des violences policières en Allemagne par exemple.»
swissinfo avec les agences
Le rapport 2004 d’Amnesty international dénonce, tout autour de la planète, les violations des droits humains perpétrées au nom de la lutte contre le terrorisme.
Selon l’ONG, les droits humains et le droit international humanitaire ont subi en 2003 les attaques les plus systématiques depuis 50 ans, sous le feu croisé des groupes armés et d’un grand nombre d’Etats.
La doctrine de l’autodéfense préventive prônée par Washington risque d’inspirer d’autres gouvernements, ce qui entraînera une escalade des conflits à l’échelle mondiale.
Amnesty craint également que les crises opposant des Etats faibles à des groupes armés économiquement puissants se multiplient à l’avenir.
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