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Aucune preuve contre la banque cantonale de Genève

Keystone Archive

Le mois dernier, Bernard Bertossa a classé la plainte pour blanchiment contre la BCGe. Depuis, des plaignants ont déposé un recours.

C’est Bernard Monnot, l’ancien directeur de la Banque cantonale de Genève à Lyon, licencié en 1996, qui a déclenché les hostilités.

«Je sais qu’on m’a révoqué pour pouvoir faire du blanchiment d’argent à grande échelle dans cet établissement que j’avais contribué à créer», dénonce-t-il dans la presse lyonnaise en février 2001.

Dans le rapport de la mission parlementaire française, intitulé «La Suisse, un prédateur de la finance mondiale», Bernard Monnot citait le chiffre de 573 millions de francs français blanchis entre 1996 et 1999 par la filiale française de la BCGe.

Les bénéficiaires? Des entreprises actives «dans l’hôtellerie, des boîtes de nuit dont certains cas sont connus à Lyon», déclare-t-il.

Pas de trace d’une telle société financière

Dans ces conditions, pourquoi la justice genevoise, pourtant réputée pugnace, a-t-elle classé la plainte pour blanchiment déposée en mai 2000 par des petits actionnaires de la BCGe?

L’«Ordonnance de soit-communiqué» signée par le juge d’instruction Laurent Kasper-Ansermet le 4 octobre 2001, et que swissinfo a pu se procurer, est particulièrement éloquente: elle ne reprend aucune des accusations de Bernard Monnot.

L’ancien directeur affirmait que la BCGe, qui «faisait du blanchiment à échelle industrielle» avait créé une fiduciaire regroupant tous les avoirs des clients français qui souhaitaient blanchir leur argent. Or, la justice n’a jamais trouvé trace d’une telle société financière ou fiduciaire!

En fait, la seule affaire connue et embarrassante pour la BCGe en France concerne un ancien importateur de voitures installé à Lyon, Patrick Minguez.

La Banque cantonale de Genève lui aurait consenti, en mars 1995, un prêt de 5 millions de francs français en France après que ce dernier a déposé la même somme, dans des conditions étranges, en Suisse.

Patrick Minguez a d’ailleurs été jugé en 1998 par le Tribunal de grande instance de Lyon. Fort curieusement, on y apprend que Bernard Monnot, alors directeur, avait donné son «accord favorable au prêt», et qu’il aurait tenté «de faire admettre qu’aucun lien n’existait entre ledit prêt et le dépôt en espèces d’une somme du même montant»!

La justice genevoise a classé la plainte

Bref, ne pouvant pas démontrer qu’il s’agissait de blanchiment d’argent, et non d’évasion fiscale, la justice genevoise a préféré classer la plainte. L’Ordonnance de Laurent Kasper-Ansermet n’est toutefois pas très tendre pour la BCGe.

Elle évoque «des rapports de police des 9 mars et 10 avril 2001 faisant état de renseignements défavorables concernant certains clients dits transfrontaliers», et parle dans ses conclusions de «quelques éléments troublants».

Toutefois, les doutes ne sont pas des preuves. Enfin, l’Ordonnance cite un courrier d’Etienne Subra, ancien directeur régional de la Banque de France à Lyon, révélant «qu’à aucun moment», Bernard Monnot, l’accusateur de la BCGe, ne lui avait «parlé d’opérations de blanchiment d’argent sale».

Ian Hamel

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