Bernard Stamm, nouveau héros suisse de la voile

Bernard Stamm a fabriqué sa «coquille de noix» de ses propres mains. Bernard Stamm a fabriqué sa "coquille de noix" de ses propres mains

Le skipper Vaudois a coupé jeudi en vainqueur la ligne d'arrivée d'Around Alone, la course autour du monde en monocoques en solitaire avec escales.

Un succès de prestige et une belle récompense pour cet ancien bûcheron exilé en Bretagne.

Bernard Stamm a fabriqué de ses propres mains son bateau dans un hangar de la bourgade bretonne de Lesconil. Et sa «coquille de noix» (Bobst Group – Armor Lux) n’a pas beaucoup à envier aux F1 des mers d’Alinghi.

Pourtant, le périple du skipper vaudois, parti à la conquête du globe en solitaire sur son monocoque, est moins glamour et médiatisée que celui d’Ernesto Bertarelli.

Un homme bâti dans le roc

L’histoire de Bernard Stamm n’a rien à voir non plus avec le faste, les millions et la lumière des projecteurs. C’est celle d’un homme solitaire, bâti dans le roc, qui repousse sans cesse ses limites pour faire de son pari fou une réalité.

Et, à moins d’une avarie de dernière minute, comme celle qui fut fatale au pauvre Stève Ravussin lors de la dernière Route du Rhum, il va remporter l’Around Alone en milieu de semaine.

«Je ne sais pas lever le pied, même le bateau ne comprend pas ce qui lui arrive… il n’aime pas cela du tout», concède le skipper suisse qui s’obstine à ne pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué.

Tous derrière et lui… devant

Son ultime souci: ne pas s’endormir. Surtout si proche de Newport, à moins de 500 milles du but.

Surtout qu’il s’agit des derniers milles d’un périple de plus de sept mois qui l’a vu franchir la ligne d’arrivée de chaque étape en leader, à Torbay (GB), au Cap (Afrique du Sud), à Tauranga (Nouvelle-Zélande) et à Salvadore de Bahia (Brésil).

Depuis le début de cette aventure en solitaire le 15 septembre dernier, le skipper Vaudois n’a jamais laissé la moindre chance à ses adversaires. Il vogue désormais vers le triomphe.

Et le bonheur. Celui d’embrasser en héros sa petite famille qui vient juste de s’agrandir, de faire un grand pied de nez au destin qui l’a si souvent chahuté et de dire merci à sa façon à tous ceux qui l’ont soutenu et qui ont cru en lui.

Un sponsor pas comme les autres

Comme Bobst Group, par exemple. Spécialisée dans les machines d’emballage, cette entreprise vaudoise s’est lancée, pour la première fois depuis sa naissance (1890), dans le sponsoring d’un sportif. Etonnamment, cette opération est avant tout destinée à ses 5000 employés.

«Nous avons trouvé en cet homme un symbole rassembleur pour notre personnel, explique ainsi Olivier Gurdiol, membre de la direction. Il vivent cette aventure très positivement et le climat de l’entreprise s’en ressent.»

En plus de ce sponsoring atypique, plusieurs anonymes ont ouvert leur porte-monnaie pour en sortir quelques liasses symboliques. D’autres ont trempé bénévolement leurs mains dans le carbone et la résine. Pour donner vie au bateau, dans le hangar de Lesconil.

Un vrai bonheur

Demain, les heures de travail et d’entraînement incessant au large du petit port breton entre les chalutiers vont enfin payer. Et effacer d’un coup la déception de l’abandon dans le Vendée Globe 2000.

«Aujourd’hui, c’est du vrai bonheur, explique Véronique Guillou, son attachée de presse depuis près de six ans. Une concrétisation et la preuve que Bernard n’est pas qu’un doux rêveur.»

Après le succès d’Alinghi lors de la Coupe de l’America et la chevauchée fantastique de Stève Ravussin sur la route du Rhum, Bernard Stamm est effectivement en train d’écrire une nouvelle page dans le livre d’or suisse de la voile.

swissinfo, Mathias Froidevaux