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Christoph Blocher défend la neutralité armée

Christoph Blocher devant quelque 1500 personnes sur le Grütli. Keystone

Le ministre de justice et police a appelé les Suisses à s’en tenir fermement à leur neutralité. Il s’exprimait lors du 65e anniversaire du rapport du Grütli.

En 1940, le général Guisan avait réuni ses officiers supérieurs pour galvaniser la nation et présenter la nouvelle stratégie de défense contre les nazis.

Le discours du conseiller fédéral Christoph Blocher était très attendu dimanche, à deux mois de la votation sur l’extension de la libre circulation des personnes aux dix nouveaux membres de l’Union européenne.

Peu avant la votation sur Schengen/Dublin en juin, le ministre avait en effet pris le contre-pied de la position gouvernementale lors d’un discours prononcé dans des conditions semblables.

Qui plus est, la fête à laquelle ont participé entre 1500 et 2000 personnes dimanche était organisée par des organisations nationalistes conservatrices. Principal message du ministre: la Suisse doit s’exprimer avec assurance en faveur de son indépendance.

Dans son allocution, le chef du Département fédéral de justice et police (DFJP) a rappelé les circonstances dans lesquelles le général Guisan a réuni ses officiers sur la prairie du Grütli, le 25 juillet 1940. A ses yeux, Henri Guisan a expliqué à cette occasion la stratégie qui a protégé la Suisse durant la guerre

La neutralité armée

Naturellement, la Suisse a également commis à cette époque ce que l’on considère aujourd’hui comme des erreurs, a reconnu le conseiller fédéral. Néanmoins, «la stratégie a eu du succès et cela est décisif», a-t-il ajouté.

Dimanche, Christoph Blocher a dit ne pas comprendre pourquoi l’annonce des célébrations du 65e anniversaire du rapport du Grütli ont soulevé des critiques (des politiciens, des médias). Selon lui, les opposants ont craint les effets d’un événement qui place l’indépendance et la neutralité armée au centre des débats.

Pour le conseiller fédéral, la neutralité armée constitue la meilleure garantie de survie pour la Suisse. C’est grâce à elle que sa stabilité – un atout décisif dans les luttes d’influence internationales – a été assurée.

Comme il y a 65 ans, la Confédération doit pouvoir se protéger aujourd’hui des attaques des armées étrangères, a encore affirmé le ministre. S’exprimer en faveur de l’indépendance a toujours permis, selon lui, de trouver des moyens pour assurer la liberté et le bien-être du pays.

Le réduit national

Soixante-cinq ans: le rapport du général Henri Guisan a en effet eu lieu le 25 juillet 1940, un mois après le début de la Deuxième guerre mondiale. La France venait d’être défaite par l’Allemagne nazie et la Suisse se retrouvait prise en tenaille.

Face à une population au moral éprouvé et une armée divisée, son chef a alors réuni 650 officiers sur la prairie du Grütli. Un lieu doublement symbolique, représentant à la fois le berceau de la Confédération et le coeur du «réduit national».

Le but du général était à la fois de présenter la nouvelle stratégie du réduit à ses officiers supérieurs, de galvaniser le moral de la troupe et stimuler l’esprit de résistance.

Dans son discours, le général Guisan avait évoqué la gravité de la situation: «Nous pouvons être attaqués sur tous les fronts à la fois». Sa réponse stratégique: le repli dans le réduit national. Il s’agissait de concentrer les troupes encore mobilisées dans le massif alpin, plus facile à défendre que le Plateau ou la Jura, sacrifiés.

Condamnant vivement le défaitisme, le général avait exhorté à la résistance et à la préparation militaire, avec pour simple consigne le mot «tenir». Il a aussi mis en avant le patriotisme ainsi que la volonté d’indépendance et d’unité nationale.

Selon les historiens, le texte du discours montre également le scepticisme de Guisan envers la démocratie et la liberté de la presse. Le général y dénonce les risques émanant des mouvements communistes et socialistes «inspirés de l’étranger» mais ignore les sympathisants suisses du nazisme.

Une voix critique

Georg Kreis a pour sa part critiqué le discours de Christoph Blocher. L’historien basé à Bâle accuse le ministre de Justice et Police de cultiver le «mythe de l’indépendance».

«Je peux seulement conseiller à Mr. Blocher et à ceux qui l’ont applaudit de lire le préambule de la constitution fédérale, a-t-il déclaré au quotidien Tages-Anzeiger. Ce préambule ne se réfère pas seulement à l’indépendance, mais aussi à la solidarité et à l’ouverture sur le monde… La vision qu’a Mr. Blocher de l’histoire n’est tout simplement pas actuelle.»

swissinfo et les agences

– Henri Guisan a été fait général et choisi comme chef de l’armée par l’Assemblée fédérale en 1939.

– Son rapport du Grütli de 1940 est devenu le symbole de la volonté de résistance du peuple suisse contre l’axe fasciste-nazi, Guisan personnifiant cette attitude.

– A cette occasion, le général a formulé la stratégie du réduit national, qui voulait que le dispositif de défense se concentre sur la région alpine.

– En Suisse, le grade de général n’existe qu’en temps de guerre. Guisan a remis sa démission le jour de l’armistice – le 8 mai 1945.

– Selon la tradition, les cantons primitifs ont passé sur la prairie du Grütli un pacte d’assistance réciproque pour contrer la puissance féodale des Habsbourg. Il s’agit du mythe originel de la Confédération helvétique.

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