Contre une loi sur l’asile «inhumaine»
Une Coalition pour une Suisse humanitaire va lancer un référendum contre le durcissement de la loi sur l'asile adopté par le parlement.
Selon elle, la révision de la loi porte atteinte à la Convention de 1951 sur les réfugiés et représente une violation du droit international.
«La loi sur l’asile révisée est une loi contre l’asile. Elle porte atteinte à des principes fondamentaux des droits humains», a déclaré Daniel Bolomey, secrétaire général de la section suisse d’Amnesty International, mercredi à Berne.
Après trois ans de débat, le parlement suisse a accepté, lors de sa session d’hiver, de durcir le droit sur l’asile. La loi révisée exclut par exemple de la procédure toutes les personnes qui ne peuvent pas présenter de papiers d’identité ou de voyage dans les 48 heures après leur arrivée.
Violation du droit international
Pour le directeur de l’œuvre d’entraide Caritas Suisse, il s’agit clairement d’une violation du droit international. Selon Jürg Krummenacher, la loi enfreint la Convention de Genève de 1951 sur les réfugiés.
C’est aussi l’avis de divers experts, ainsi que du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), qui a réaffirmé en septembre ses «sérieuses préoccupations» à propos de la révision du droit d’asile en Suisse.
L’absence de papiers d’identité est souvent un indice d’une situation de persécution. Or il est inadmissible que des personnes effectivement persécutées, dépourvues de passeport, se voient pour cette raison refuser l’accès à une procédure d’asile, observe Jürg Krummenacher.
Bien sûr, la loi prévoit quelques exceptions, notamment si des motifs valables expliquent l’absence de papiers ou si des investigations supplémentaires sont nécessaires. Mais les membres de la coalition trouvent ces garanties insuffisantes et craignent des décisions injustes.
La Déclaration universelle des droits de l’homme prévoit que «devant la persécution, toute personne a le droit de chercher asile et de bénéficier de l’asile en d’autres pays», rappelle Amnesty. L’exigence de papiers est donc une entrave grave au droit à une procédure équitable.
Familles à la rue
La nouvelle loi sur l’asile supprime également l’aide sociale pour tous les requérants déboutés. Elle risque ainsi de jeter à la rue des familles avec enfants qui n’ont d’autre tort que d’être originaires d’un pays qui refuse de leur fournir des documents de voyage pour rentrer chez elles, constate encore le secrétaire général de la section suisse d’Amnesty International.
Pour sa part, la Fondation Terre des Hommes craint qu’à l’avenir de jeunes requérants d’asile entrent plus fréquemment dans l’illégalité et risquent ainsi d’être les victimes de trafics et d’exploitations.
La loi menace aussi les proches de réfugiés restés au pays, note le secrétaire général de l’Organisation suisse d’aide aux réfugiés (OSAR) Beat Meiner. Les autorités suisses ont désormais le droit de contacter le pays d’origine avant même de savoir si la personne est persécutée ou non.
Valeurs fondamentales
L’heure de la résistance a sonné contre une loi qui remet en cause les valeurs fondamentales de la société helvétique, conclut François Dubois au nom des Centres sociaux protestants (CSP) actifs en Suisse romande.
La coalition à l’origine de ce nouveau référendum réunit notamment l’OSAR, Amnesty International, la Fondation Terre des Hommes et différentes œuvres d’entraide. La Croix-Rouge suisse, qui ne fait pas partie de la coalition, a déjà pris position mardi pour dénoncer une loi «contraire au principe d’humanité».
A l’issue de la session d’hiver, le Parti socialiste avait déjà décidé lui aussi de lancer un référendum contre ce qu’il appelle la «Lex Blocher», du nom de celui qui est à l’origine du durcissement du droit d’asile, le ministre suisse de justice et police Christoph Blocher.
swissinfo et les agences
La coalition à l’origine du référendum réunit notamment l’OSAR, Amnesty International, la Fondation Terre des Hommes et différentes œuvres d’entraide.
A l’issue de la session d’hiver, le Parti socialiste a aussi annoncé son intention de lancer un référendum contre la loi sur l’asile révisée.
– La nouvelle loi sur l’asile supprime l’aide sociale aux requérants déboutés et double la durée de détention possible en vue du renvoi pour la porter à 18 mois.
– La clause d’admission pour raisons humanitaires a par ailleurs été exclue. En l’absence de papiers d’identité, le requérant devrait prouver qu’il n’est pas responsable de cette situation.
– Le regroupement familial et les possibilités de travail en cas d’admission provisoire ont en revanche été assouplies.
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