De l’ère du hasard à celui de l’adresse
Dès le 31 mars 2005, seules les machines à sous basées sur l’adresse du joueur seront encore tolérées dans les restaurants et les salons de jeux.
Les exploitants ont déjà trouvé la parade.
Pour répondre aux exigences de la nouvelle loi sur les jeux de hasard et les maisons de jeu, les exploitants de machine à sous ont tout simplement développé une nouvelle génération d’automates: le jeu d’adresse.
«Nous venons de poser notre 100e ‘Super-Jump 500’ sur le territoire fribourgeois», déclare Christian Blanquet, le patron de Proms Automates.
«Le jeu consiste à faire sauter des obstacles à un cheval qui court sur l’écran. Et ce n’est pas facile, précise l’exploitant de machines à sous. Pour gagner, il faut être adroit et bien entraîné.»
Proms n’est pas la seule entreprise à avoir fait preuve d’inventivité pour poursuivre ses activités dans le secteur des jeux d’argent. Les professionnels de la branche prévoient la création d’une dizaine de machines ces prochaines années.
Un nouveau marché
Pour l’heure, la Commission fédérale des maisons de jeu (CFMJ), habilitée à décider si les appareils doivent être considérés comme des jeux d’adresse ou des jeux de hasard, a homologué trois automates de la nouvelle génération.
Les cantons, eux, conservent la compétence d’autoriser ou non l’exploitation de ces machines sur leur territoire.
«Treize cantons, dont un seul romand (Fribourg) autorisaient l’exploitation des machines à sous traditionnelles», explique Christian Blanquet.
Fribourg et Argovie ont, selon lui «déjà donné leur feu vert pour la mise en service des nouveaux jeux. Et tout indique que les autres suivront rapidement. »
Et le directeur de Proms d’ajouter: «Par ailleurs, il est désormais envisageable d’étendre le marché à d’autres cantons. Bâle, Zurich et le canton de Vaud se penchent actuellement sur la question.»
Il va de soi que la Loterie romande (LoRo) ne voit pas d’un très bon œil le maintien, voire l’élargissement de cette nouvelle concurrence.
Une affaire de gros sous
«Les fabricants de machines ont tout simplement trouvé un habile moyen de contourner la nouvelle loi sur les jeux de hasard et les maisons de jeu, déclare José Bessard, directeur de la communication de la Loterie romande.
La Loterie romande estime, d’une part, que le statut de ces jeux d’adresse n’est pas clair tant au plan juridique que technique.
Et de rappeler que l’organisation distribue ses bénéfices à des œuvres d’utilité publique et que la concurrence des exploitants de machines à sous pèse lourdement sur ses revenus.
«Dans le canton de Fribourg, qui compte quelque 1600 machines à sous, les jeux de la Loterie romande ne rapportent qu’un tiers des recettes réalisées dans les autres cantons», souligne José Bessard
En clair, la bataille pour ou contre l’implantation des nouvelles machines d’adresse s’annonce chaude et hautement politisée.
Conforme à la loi
A la Commission fédérale des maisons de jeu (CFMJ), on affirme que la procédure de délimitation entre appareils à sous servant aux jeux de hasard et ceux servant aux jeux d’adresse est conforme à la loi.
«Ces nouveaux appareils à sous répondrent strictement aux critères de l’habileté fixés par le législateur», affirme Jean-Marie Jordan, directeur suppléant du secrétariat de la CFMJ.
«Désormais, c’est la maîtrise du jeu et non le hasard qui permet au joueur de remporter la mise.»
Et, à ceux qui répliquent que la frontière entre la chance et l’habileté est parfois mince, Jean-Marie Jordan rétorque que les jeux de pure adresse ne sont tout simplement pas concevables.
De leur côté, les exploitants de casinos ne sont pas inquiets face à l’émergence d’une éventuelle concurrence. «Il faut reconnaître que la nouvelle génération d’automate n’a rien à voir avec les anciens bandits manchots», note Jean-Marc Grosse.
Selon le directeur du casino B de Fribourg, «la Commission fédérale des maisons de jeu a les moyens de faire respecter la législation en vigueur.»
Tout dépend de sa capacité à résister aux pressions politiques, lance Jean-Marc Grosse. «L’avenir le dira. Notamment lorsqu’elle devra se prononcer sur certaines machines douteuses au tir de jeu d’adresse.»
swissinfo, Vanda Janka
– Machines à sous ou «bandits manchots»: appareils servant aux jeux de hasard qui ne seront plus autorisés en dehors des casinos dès mars 2005.
– Machines à sous d’adresse: la législation cantonale peut les autoriser, hors casino, pour autant qu’elles aient été reconnues comme jeu d’adresse par la commission fédérale des maisons de jeu.
– Tactilo: distributeur électronique de jeux de loterie de la LoRo Autorisées dans tous les cantons romands depuis 1998.
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