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Egalité: l’ONU épingle la Suisse

L'ONU critique l'absence d'assurance maternité en Suisse. Keystone Archive

La Suisse doit rapidement introduire une assurance maternité et réviser sa conception figée de la répartition des rôles entre les sexes.

Ces recommandations proviennent du comité de l’ONU pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes.

Le gouvernement a pris acte de ces observations mercredi. Il a chargé le Département de l’intérieur de les transmettre aux différents acteurs responsables de la promotion de l’égalité en Suisse. Et de les traduire dans les faits.

Et cela même si, comme toute recommandation onusienne, ces recommandations n’ont aucun caractère contraignant.

Loi sur l’égalité saluée

Cela dit tout n’est pas sombre en Suisse. Le comité a salué la loi sur l’égalité (LEg), entrée en vigueur en 1996.

Celle-ci s’applique à tous les domaines de la vie professionnelle, de l’embauche au licenciement, en passant par la formation continue, le salaire ou encore le harcèlement sexuel sur le lieu de travail.

«A ce niveau, la Suisse n’est pas en retard par rapport au reste de l’Europe. Elle s’est même montrée progressiste sur un point: la LEg reconnaît le harcèlement sexuel comme une forme de discrimination», précise Patricia Schulz, directrice du Bureau fédéral de l’égalité.

Des salaires encore inégaux

Il n’empêche que les salaires des femmes restent en moyenne 23% moins élevés que ceux des hommes.

«Même si le taux d’activité rémunéré des Suissesses est plus élevé que la moyenne des autres pays européens, leur pourcentage en temps de travail est très bas», explique Patricia Schulz.

Ce qui, par ailleurs, bloque toute possibilité de carrière pour les femmes.

Ceci s’explique par la répartition du travail qui est resté très traditionnel: les hommes travaillent à plein temps et les femmes à temps partiel. Celles qui ont des enfants en bas âge ont des taux d’occupation de 30% en moyenne.

Ce point a d’ailleurs été vivement critiqué par le comité de l’ONU. Et dans la foulée le manque de structures d’accueil des enfants, crèches ou parascolaire.

La violence conjugale

Par ailleurs, la Suisse a encore des progrès à effectuer – au plan pénal – dans le traitement de la violence conjugale. Elle a par exemple été très lente à reconnaître le viol au sein du couple.

Mais la directrice du bureau de l’égalité estime «qu’on est dans une phase importante de la lutte contre ce type de violence. Il y a une reconnaissance de la gravité du problème.»

A titre d’exemple, le canton de St Gall vient d’instaurer une loi qui permet d’expulser le partenaire violent du domicile conjugal. Elle protège donc mieux la victime qui jusqu’à présent devait fuir.

Il va sans dire que les autres cantons observent de très près cette nouvelle loi. Sans compter qu’une modification du code pénal, visant à poursuivre d’office l’agresseur au sein du couple, est aussi en examen.

Quant aux policiers, ils vont être formés pour intervenir efficacement dans les foyers. Ils ne se contenteront plus seulement de calmer les conjoints. Ils devront poser les bonnes questions afin d’établir un procès-verbal.

Le Centre suisse de prévention de la criminalité vient en effet de lancer une campagne nationale afin d’unifier les pratiques des différentes polices cantonales.

Assurance maternité

Par contre, la Suisse est très clairement épinglée pour l’absence d’une assurance maternité nationale digne de ce nom. C’est en effet le dernier pays européen a ne pas en posséder.

Le dernier projet d’assurance sociale obligatoire, qui prescrivait 14 semaines de congé maternité, a été rejeté par le peuple en décembre 1999.

Depuis, Genève a lancé sa propre assurance maternité. Des projets similaires sont en discussion dans d’autres cantons. Mais ils ne sont pas encore en vigueur.

Cela dit, la plupart attendent de voir si le dernier projet fédéral, lancé notamment par le parlementaire Pierre Triponez, va aboutir.

Il est d’ailleurs en bonne voie puisqu’il a déjà été accepté par une des deux chambres. Il ne sera toutefois applicable qu’aux seules femmes qui travaillent.

Pour l’instant, les mères doivent se contenter des 8 semaines de congé obligatoires, inscrites dans le Code des obligations.

Plus généralement, le comité onusien estime que le fait d’être parent implique une responsabilité sociale des deux conjoints. Ce qui ne semble pas être encore entré dans les mentalités suisses.

Stéréotypes professionnels

Enfin, la Suisse est instamment priée de prendre des mesures pour battre en brèche les idées toutes faites qui plombent encore trop souvent les choix professionnels des jeunes.

«En Italie par exemple, il y a beaucoup de femmes qui font des mathématiques, ce qui n’est pas le cas en Suisse. En France, il y a aussi beaucoup de physiciennes. Mais, nuance Patricia Schulz, du point de vue des stéréotypes professionnels, la Suisse se situe dans la moyenne européenne.»

Le Bureau de l’égalité a justement pour tâche de briser ces caricatures. Il s’y attelle d’ailleurs avec ardeur, puisque 4 des 7,2 millions de francs de son budget, sont alloués à des projets qui concernent le monde du travail.

Plus de 200 projets ont déjà été mis sur pied depuis son existence. Ils vont de micro-projets à d’autres, d’envergure nationale, comme la Journée des filles, – dont le but est de les inciter à suivre un de leurs parents au travail pendant une journée.

swissinfo, Anne Rubin

– La Suisse a ratifié la Convention de l’ONU pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes en 1997.

– Elle a présenté à New York deux rapports qui relatent les progrès faits par la Suisse en matière de promotion de l’égalité.

– La loi sur l’égalité (LEg) est entrée en vigueur le 1er juillet 1996.

– C’est un instrument important de promotion de l’égalité dans les faits entre les femmes et les hommes.

– En attendant, la Suisse est le dernier pays d’Europe à ne pas avoir d’assurance maternité.

– Le projet d’assurance maternité «Dreifuss», destiné à toutes les femmes, a été refusé par le peuple en décembre 99.

– Le projet «Triponez», qui ne s’applique qu’aux femmes qui travaillent, est en bonne voie au Parlement.

– Au niveau des salaires, selon les syndicats, les femmes gagnent toujours 23% de moins que les hommes.

– Une plainte pour violence conjugale n’est toujours pas poursuivie d’office.

– Et pour l’instant, à part dans le canton de St-Gall, c’est la victime de violences qui doit quitter le domicile conjugal

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