Jour de gloire pour Didier Cuche à Val d’Isère
Le skieur neuchâtelois Didier Cuche a remporté mercredi le titre de champion du monde de super-G. Dans les Alpes françaises, cette victoire a été saluée unanimement comme celle de l'apothéose d'une grande carrière. Reportage.
Dans l’aire d’arrivée, Didier Cuche fait virevolter ses skis haut dans le ciel. Les yeux tournés vers le tableau de chronométrage, il sait que cette course ne pourra plus lui échapper.
Une seconde, soit une marge énorme en ski alpin, c’est ce que l’Italien Peter Fill, 2e, devra finalement concéder au héros du jour. Au bas de la Face de Bellevarde, sur une piste extrêmement raide et gelée, les supporters suisses exultent.
Venus en nombre, les fans de Didier Défago ne se formalisent pas de la 8e place de leur protégé et prennent fait et cause pour l’autre Didier. Un skieur romand champion du monde, ça n’arrive pas tous les jours.
Une pensée pour Daniel Albrecht
Entre deux interviews, Didier Cuche prend le temps d’initier une «Ola» avec les membres de son fans-club. Ses premiers mots iront à Daniel Albrecht, toujours dans le coma après sa chute à Kitzbühel il y a deux semaines.
«Il y a très peu de choses qui séparent le succès d’une chute terrible qui peut mettre fin à une carrière. Je suis sûr qu’il aurait aussi été capable de faire la même performance que moi aujourd’hui», affirme en gentleman le nouveau champion du monde.
Patrice Morisod, entraîneur du groupe de vitesse, l’homme qui accompagne Didier Cuche et Didier Défago depuis leur adolescence, ne tient pas en place. «Il n’y a pas beaucoup de mots pour expliquer ce que Cuche a fait ici. C’est simplement de la folie. Il a fait une course de rêve. Avec le palmarès qu’il possède déjà, cette victoire, c’est le couronnement d’une carrière».
Du champagne autrichien
Presque autant sollicité que son protégé, Patrice Morisod peut enfin savourer cette belle victoire après une heure d’interviews non-stop. Le champagne, généreusement offert, et sans rancune, par un entraîneur autrichien, est débouché avant même la remise des médailles.
Astolfo Cagnacci, journaliste français de l’AFP, résume l’état d’esprit qui prédomine à Val d’Isère. «Tout le monde, que ce soient les skieurs d’autres nations, les supporters ou les journalistes, sont unanimes à saluer cette victoire que Didier Cuche méritait depuis longtemps. De plus, ce succès ne souffre aucune discussion. Les conditions météorologiques étaient les mêmes pour tout le monde, ce qui n’est pas toujours le cas dans ce genre d’événement».
Cette victoire d’un skieur francophone à Val d’Isère a-t-elle une saveur particulière pour le public français? «Au-delà de ses origines, Didier Cuche est avant tout un grand personnage du ski alpin. C’est aussi quelqu’un d’étonnant, avec sa boule à zéro et sa formation de boucher. En plus, il vient d’une petite station du Jura neuchâtelois (ndlr: Les Bugnenets) quasiment inconnue, c’est assez atypique», affirme Astolfo Cagnacci.
Hommages unanimes
Marco Büchel, son partenaire d’entraînement qui skie sous les couleurs du Liechtenstein, n’en revient pas de la performance de Didier Cuche. «C’est incroyable ce qu’il a réalisé ici. J’espère que tout le monde a vu la course. Il n’y a personne qui peut skier plus vite que lui. Il attend ce titre mondial depuis si longtemps, je ne peux que me réjouir de ce succès».
Pour Patrick Lang, chef de presse de ces Mondiaux et fils de Serge Lang, le fondateur de la Coupe du monde, Didier Cuche était simplement en «état de grâce» mercredi. «Cette piste est la plus difficile au monde à l’heure actuelle. Il n’y a pas de hasard dans cette victoire. Seuls les costauds sont capables de s’imposer ici».
A 34 ans, l’expérimenté Didier Cuche est désormais le plus vieux champion du monde de l’histoire. Il bat le Norvégien Kjetil-Andre Aamodt de trois jours. «Je suis maintenant presque obligé d’aller défendre mon titre aux Mondiaux de Garmisch en 2011», lance-t-il le sourire aux lèvres.
Pas de doute
Vainqueur du globe de cristal de descente ces deux dernières années, Didier Cuche avait jusqu’à ces Mondiaux connu un début de saison en demi-teinte. «Je faisais toujours une ou deux erreurs en trop, ce qui m’a parfois rendu un peu nerveux».
«Mais Didier n’a jamais douté, affirme Patrice Morisod. J’ai toujours dit qu’il skiait mieux que jamais et que plus personne ne parlerait de crise quand il serait champion du monde!»
Sa victoire, Didier Cuche la met aussi sur le compte d’une équipe de Suisse très performante depuis le début de saison. «Les nombreux podiums réalisés par mes coéquipiers, et notamment les deux victoires de Didier Défago à Wengen et Kitzbühel, m’ont enlevé de la pression. J’ai ainsi pu me concentrer sur cet objectif.»
Place à la descente
Avec cette victoire, qui lance idéalement l’équipe de Suisse masculine dans ces Mondiaux, le skieur neuchâtelois se profile comme le grand favori de la descente de samedi sur cette même terrible Face de Bellevarde.
Mais avant de penser à la prochaine échéance, Didier Cuche a donné rendez-vous mercredi soir à la Maison suisse pour fêter dignement ce titre mondial. La nuit s’annonce longue à Val d’Isère.
swissinfo, Samuel Jaberg à Val d’Isère
Val-de-Ruz. Né en 1974, Didier Cuche vit aux Bugnenets, dans le Jura neuchâtelois.
Coupe du monde. Son palmarès est riche de 8 victoires en Coupe du monde (Descente: Kitzbühel en 1998, Garmisch en 2004, Kvitfjell en 2007, Kitzbühel en 2008. Super-G: Altenmarkt en 2002, Beaver Creek en 2002, Val Gardena en 2007. Géant: Adelboden en 2002).
Globe de cristal. En 15 saisons de Coupe du monde, il est monté 44 fois sur le podium. Il a remporté le globe de cristal récompensant le meilleur descendeur de la saison ces deux dernières années.
Championnats du monde. Didier Cuche a été sacré champion du monde du super-G le 4 février à Val d’Isère. Il compte également une médaille de bronze en géant décrochée lors des Mondiaux d’Are en 2007 ainsi qu’une médaille d’argent aux Jeux olympiques (super-G de Nagano en 1998) à son palmarès.
Vendredi 6: super combiné dames
Samedi 7: descente messieurs
Dimanche 8: descente dames
Lundi 9: super combiné messieurs
Mercredi 11: coupe des nations par équipe
Jeudi 12: slalom géant dames
Vendredi 13: slalom géant messieurs
Samedi 14: slalom dames
Dimanche 15: slalom messieurs
En conformité avec les normes du JTI
Plus: SWI swissinfo.ch certifiée par la Journalism Trust Initiative
Vous pouvez trouver un aperçu des conversations en cours avec nos journalistes ici. Rejoignez-nous !
Si vous souhaitez entamer une conversation sur un sujet abordé dans cet article ou si vous voulez signaler des erreurs factuelles, envoyez-nous un courriel à french@swissinfo.ch.