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L’existence des prisons de la CIA se précise

Dick Marty a présenté son rapport mardi à Paris. Keystone

Selon l'enquêteur suisse sur les centres de détention secrets de la CIA en Europe, des gens semblent bien avoir été enlevés et transférés dans d'autres pays.

S’exprimant à Paris devant une commission du Conseil de l’Europe, Dick Marty a déploré que le gouvernement américain n’ait fourni «ni informations, ni explications».

«Les enquêtes en cours dans certains pays semblent indiquer que des individus ont été enlevés et transférés dans d’autres pays sans aucun respect des lois en vigueur.»

Tels sont les termes du rapport remis mardi à Paris par le sénateur Dick Marty à la Commission des questions juridiques et des droits de l’homme de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE).

Silence des Américains

Pour le rapporteur suisse de la commission de l’APCE, «les informations récoltées jusqu’ici renforcent la crédibilité des allégations» à ce sujet. Et d’ajouter que les Etats-Unis n’ont jamais démenti officiellement ces allégations.

Lors de sa tournée européenne la semaine dernière, la secrétaire d’Etat américaine Condoleezza Rice, n’a jamais répondu aux questions répétées qui lui ont été posées concernant l’existence ou non de centres de détention secrets dans des Etats membres du Conseil de l’Europe.

La Pologne et la Roumanie ont été désignées comme des sites possibles par l’organisation de défense des droits de l’homme Human Right Watch, basée à New York. Varsovie comme Bucarest n’ont cessé, de leur côté, de démentir ces allégations.

31 avions suspects

Le 25 novembre dernier, Dick Marty avait fait état de mouvements suspects de 31 avions qui appartiendraient à des structures derrière lesquelles se cacherait directement ou indirectement l’agence de renseignements américaine, et qui auraient été utilisés par celle-ci pour le transport de prisonniers dans le cadre de la «guerre contre le terrorisme».

Dans ce contexte, l’ancien procureur du canton du Tessin «demande instamment» au 45 pays membres du Conseil de l’Europe «de s’engager pleinement dans la recherche de la vérité au sujet des vols, survols de leur territoire d’avions ayant, ces dernières années, transporté des personnes arrêtées et détenues en dehors de toute procedure judiciaire».

Les investigations vont se poursuivre

Lundi, le commissaire européen à la Justice Franco Frattini a indiqué avoir demandé à son collègue en charge des Transports , Jacques Barrot, de donner accès à Dick Marty à l’organisation de surveillance aérienne Eurocontrol.

Il donc devrait être possible de répondre à la demande de Dick Marty et d’établir une matrice des mouvements des avions concernés, à comparer avec les informations sur le départ de transports de prisonniers, depuis, par exemple, Kaboul.

De même, des images satellites de bases aériennes du nord-est de la Pologne et de l’est de la Roumanie pourraient être livrées par le centre européen de Torrejon de Ardoz, en Espagne.

Des preuves irréfutables

Mais M. Frattini a répété qu’il n’y avait jusqu’ici aucune preuve de l’existence de centres de détention sur sol européen et que tous les membres de l’UE ont démenti toute implication.

«Nous devons faire confiance à ces gouvernements et ne pouvons mettre en cause leur crédibilité. Toute accusation doit être étayée et on ne peut tirer de conclusions qu’avec des preuves irréfutables», a-t-il déclaré devant la commission.

M. Frattini a ajouté qu’il soutenait totalement l’enquête du Conseil de l’Europe mais s’est dit opposé à l’ouverture d’une autre enquête par le Parlement européen, comme ce dernier le souhaite. «J’y vois un risque de chevauchement et qu’une enquête ne gêne l’autre.»

Donner du poids au Conseil de l’Europe

La Commission des questions juridiques et des droits de l’homme de l’APCE a insisté à plusieurs reprises pour la création d’une commission d’enquête qui donnerait plus de poids politique à l’enquête du Conseil de l’Europe, une organisation qui n’a pas de juridiction directe sur les pays européens.

«Nous sommes favorables à une telle commission d’enquête, pas pour lancer une campagne contre la CIA ou les Etats-Unis, mais parce que c’est la crédibilité de l’Europe qui est en jeu», a notamment déclaré la députée allemande, Angelika Beer.

Le thème sera débattu à nouveau mercredi au Parlement eurpéen.

swissinfo et les agences

– Basé à Strasbourg, en France, le Conseil de l’Europe (1949) est la plus ancienne organisation politique du continent.

– Elle regroupe 46 pays, dont 21 en Europe centrale et occidentale.

– La Suisse y a adhéré en 1963.

– Il s’agit d’une organisation distincte de l’Union européenne (25 membres).

– Le Conseil de l’Europe a pour but de défendre les droits de l’homme et la démocratie parlementaire.

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