La lutte contre le blanchiment est vraiment lancée
Les autorités ont ouvert 245 procédures contre des intermédiaires financiers en 2003, année où le contrôle en matière de blanchiment a vraiment démarré.
Reste à savoir si les mesures prises dans le cadre de la lutte contre le recyclage d’argent sale sont réellement efficaces.
L’an dernier marquait les débuts véritables de l’action sur le marché de l’Autorité de contrôle en matière de blanchiment d’argent.
Dans son rapport publié vendredi, l’organisme indique que la hausse du nombre de procédures ouvertes atteint 57% par rapport à 2002.
Au final, ces actions ont abouti à la liquidation de cinq intermédiaires et la radiation du Registre du commerce de deux autres.
Sept cas seulement ont débouché sur des mesures coercitives. Ce qui fait dire à l’Autorité qu’il s’agit d’un bon signe pour le marché financier suisse, qui fait suffisamment diligence lui-même.
De gros progrès
Responsable du cours post-grade de lutte contre la criminalité économique de l’Université de Lucerne, Adrian Lobsiger va dans le même sens.
«Les chiffres de l’autorité de surveillance ne sont pas l’arbre qui cache la forêt. Progressivement, la Suisse fait de gros progrès dans la lutte contre le blanchiment».
Elle s’en est d’ailleurs donné les moyens puisque son système est dorénavant considéré par beaucoup de pays comme l’exemple à suivre.
«Le Ministère public de la Confédération fournit énormément d’informations aux différents pays où les crimes liés au blanchiment sont commis. La Russie, par exemple», explique encore Adrian Lobsiger.
«Et c’est là-bas que les cas sont traités. Il faut voir aussi que les justices étrangères ne font pas toujours diligence avec les informations fournies par la Suisse.»
Prise de conscience
Adrian Lobsiger note autre chose. «L’autorité de contrôle exerce une surveillance administrative. Qu’elle fasse cesser l’activité de plusieurs intermédiaires est plutôt intéressant. Car pousser à la cessation d’activité n’est pas chose aisée».
Expert de la lutte contre le blanchiment à l’Université de Bâle, Mark Pieth estime, lui aussi, que la Suisse a réellement pris conscience du problème.
«Je n’en considère pas moins que les institutions financières suisses auraient dû notifier plusieurs gros cas. Notamment les cas de personnes exposées politiquement. Ce problème n’est toujours pas pris suffisamment au sérieux».
Mark Pieth va plus loin et pointe l’Angola. «Je pense qu’une banque devrait considérer sérieusement si elle veut gérer un compte pour des gens comme Dos Santos et sa famille».
«C’est ce type de notifications que l’on devrait voir, estime l’expert. Le compte dont je parle a enregistré des mouvements d’environ 400 millions de dollars ces deux dernières années.»
Une mesure difficile
Le Bâlois fait aussi part de la difficulté de mesurer l’efficacité réelle des mesures anti-blanchiment. Et ceci, à l’échelle mondiale.
«Nous constatons que la lutte est sur toutes les lèvres, que les règles foisonnent, et qu’on cherche à établir des règles du jeu généralisées. Mais à ce stade, en mesurer l’efficacité n’est pas possible».
A sa manière, Adrian Lobsiger ne dit pas autre chose: «La proportion entre cas communiqués aux autorités et condamnations effectives est partout dans le monde un peu surprenante».
swissinfo
L’Autorité de contrôle en matière de blanchiment d’argent a pour tâche de surveiller les intermédiaires financiers
Elle a ouvert l’an dernier 245 procédures contre des intermédiaires suspectés d’activités illégales
Ces actions ont abouti à la liquidation de cinq d’entre eux et la radiation du Registre du commerce de deux autres
Est-ce l’indice de l’efficacité des mesures globales contre le blanchiment? La question reste ouverte
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