La Maladière, dernier-né des stades «multifonctions»
Comme Berne, Bâle, Zurich ou Genève, la ville de Neuchâtel possède désormais son enceinte footballistique moderne, esthétique et multifonctionnelle.
En Suisse comme partout en Europe, le temps des stades aux vertes pelouses, entourées de gradins, est définitivement révolu.
Six bons mètre en dessus du niveau de la rue adjacente, la nouvelle pelouse synthétique du nouveau Stade de la Maladière va être foulée pour la première fois le 18 février.
A l’affiche, le derby du canton qui opposera l’équipe de Neuchâtel, les rouges et noirs de Xamax, au rival «du haut» La Chaux-de-Fonds. L’engouement populaire est là puisqu’en moins de deux heures les 12’000 billets ont trouvé preneur.
Club important sur la scène nationale, reconnu internationalement dans les années 80, Neuchâtel Xamax milite aujourd’hui en seconde division helvétique. Il espère que l’«effet stade» va lui permettre de retrouver l’élite et de juteuses recettes dans un proche avenir.
Terrain synthétique, 12’000 places assises, salles de sport et séminaires, magasins, parking, loges VIP et même la caserne des pompiers: la nouvelle Maladière a tout d’une grande.
Comme ailleurs en Europe
Publiée récemment, l’étude annuelle du cabinet de conseil Ineum consulting («Finances et perspectives du football professionnel 2006») confirme que l’équipement devient la clef du foot business. Mieux adapté au public, il est source de meilleurs revenus.
Succinctement résumée dans un article du Monde du 25 janvier, cette étude met notamment en évidence le fait qu’un total de 41 stades ont été construits ou rénovés en Allemagne, en Angleterre, en France et en Espagne entre 2000 et 2005.
Rien qu’en Allemagne, qui a profité de l’effet ‘stimulation’ induite par la Coupe du monde. Ainsi «un club sur deux de 1er et 2ème division aura bénéficier d’une nouvelle enceinte depuis 2000».
Et ce sont précisément ces nouvelles enceintes modernes et multifonctionnelles qui sont les plus fréquentés et qui atteignent le plus facilement un équilibre financier.
Profit et rendement
Sociologue au Centre International d’Etude du Sport de Neuchâtel (CIES) et ancien collaborateur scientifique au laboratoire de sociologie urbaine de l’EPFL, Christophe Jaccoud estime qu’en Suisse, les problématiques des performances de l’équipe et l’envergure du stade sont aujourd’hui découplées.
«On peut même se demander, dit-il, dans quelle mesure la fonction sportive d’un complexe multifonctionnel est encore dominante dans l’esprit de ceux qui sont du côté de l’économie et du commerce.»
Pour le sociologue neuchâtelois, la tertiarisation de l’économie du sport en général et du football professionnel en particulier (logique du profit et du rendement) est prépondérante dans la planification de ces nouveaux stades.
«Mais c’est aussi une nouvelle façon de penser l’attractivité urbaine; soit ce qui fait une ville grande ou petite, ajoute-t-il. Aujourd’hui, en matière de marketing urbain, un plateau technique sportif de prestige semble être devenu une nécessité. Et malheur à la ville qui ne satisfait pas à ce critère.»
Christophe Jaccoud met encore en évidence la «forte implication des acteurs privés dans un domaine qui relevait par le passé exclusivement de la planification publique. De plus, l’inscription spatiale de ces enceintes est propice à dynamiser certains quartiers de la cité».
Caserne de pompiers et «naming»
A Lausanne, par exemple, la volonté de redynamiser l’ouest de la ville en y construisant un nouveau complexe sportif appelé à remplacer la vieille Pontaise transcende les couleurs politiques et les querelles de partis.
Comme à Neuchâtel, l’objectif est de faire en sorte que la grande partie des travaux soit financée par les propriétaires du centre commercial qui s’y installera. Dans le cadre du partenariat public-privé projeté, la construction d’un bassin olympique sous la pelouse est envisagée. Si le projet suit son cours, les travaux pourraient commencer en 2009.
A Saint-Gall, qui étrennera son nouveau stade l’an prochain, un pas de plus a été franchi. Le club et la ville se sont laissés séduire par le chant des sirènes du «Naming» ou «droit d’appellation». Cette pratique venue d’Outre-Atlantique consiste à vendre le nom de l’enceinte à un grand sponsor.
En Angleterre, Arsenal joue dans l’Emirates Stadium (la compagnie aérienne a déboursé 90 millions d’euros) et en Allemagne, les supporters du Bayern de Munich vont voir jouer leur équipe fétiche à l’Allianz Arena (l’assurance a payé 75 millions d’euros).
En Suisse orientale, l’entreprise de construction AFG Arbonia-Forster-Holding AG va débourser un peu plus d’un million par année pour que l’enceinte s’appelle «AFG Arena».
Pas propriétaire
Reste qu’au vu de leurs assises financières précaires, aucun club helvétique n’a encore essayé de devenir propriétaire de son stade.
A l’heure actuelle, ce sont encore les collectivités publiques qui sont propriétaires des stades qu’elles louent aux clubs. À Neuchâtel, la ville a reçu les installations sportives et civiles en échange de la cession des terrains.
swissinfo, Mathias Froidevaux
Le nouveau stade de la Maladière à Neuchâtel sera inauguré le 18 février (match Xamax – La Chaux-de-Fonds) en présence du ministre des Sports Samuel Schmid et du président de la FIFA Sepp Blatter.
Hormis son terrain synthétique homologué et ses 12’000 places assises numérotées, la nouvelle enceinte de la Maladière est doté de capteurs solaires sur le toit et de caméras de sécurité. Huit buvettes et dix loges VIP ont aussi été prévues.
Le nouveau complexe – pour lequel le groupe Coop et l’entreprise générale Hauser Rutishauser Suter (HRS) ont investi 230 millions de francs – compte six salles de sport au deuxième étage, un centre commercial (plusieurs enseignes), un parking de 930 place et ….une caserne de pompiers.
Un monte-charge a été installé afin d’acheminer le matériel nécessaire à la tenue de concert dans le stade qui pourra accueillir jusqu’à 19’000 fans de musique. Le concert inaugural prévu le 23 juin est celui du chanteur français Patrick Bruel.
Mis à part La Maladière et les quatre stades qui accueilleront les matches de l’Eurofoot l’an prochain (le Stade de Suisse à Berne, le Parc Saint-Jacques à Bâle, le Letzigrund à Zurich et le Stade de Genève), plusieurs enceintes footballistiques sont en cours de réalisation, au stade du projet ou de l’étude en Suisse.
Ainsi, la future AFG Arena verra le jour en 2008 à Saint-Gall.
La ville de Bienne a lancé un grand projet de construction d’un stade et d’une patinoire à l’extérieure de la ville.
Lausanne planche sur le projet d’un futur «Stade du Léman» qui remplacerait le stade actuel de la Pontaise.
L’idée d’un nouveau stade à Martigny voulu par le président du FC Sion Christian Constantin est encore une abstraction.
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