La passion du Tour de France s’exporte aussi en Suisse
Malgré une réputation ternie par les affaires de dopage, le Tour de France reste un événement extrêmement populaire. En Valais, ils étaient des dizaines de milliers de toutes nationalités massés au bord des routes pour assister à la victoire d'Alberto Contador.
Chaque été, le Tour de France draine près de 15 millions de personnes au bord des routes. Dans l’Hexagone, bien sûr, son terrain originel, mais aussi dans tous les pays voisins qu’il traverse régulièrement. La Suisse ne fait pas exception à la règle. Dimanche, sur les routes vaudoise, fribourgeoise et valaisanne, ils étaient certainement plus de 300’000 à s’être déplacés pour voir passer les héros de l’asphalte.
C’est le long de la montée entre Martigny et Verbier, destination finale de cette 15e étape, que la concentration de spectateurs était la plus forte. Sur les 8,8 km de l’ultime ascension, chaque virage a été pris d’assaut, parfois plusieurs jours à l’avance, par des centaines de camping-cars aux plaques belges, françaises, hollandaises, italiennes, espagnoles ou anglaises.
Afin d’héberger les spectateurs itinérants de ce Tour de France 2009, des terrains ont été mis à disposition par les agriculteurs de la région, contre une modique indemnisation de 500 francs par hectare. Tout au long du parcours, des toilettes mobiles et des centaines de sacs poubelles ont été installés pour éviter que les Alpes valaisannes ne se transforment en dépotoir géant.
Deux jours à l’avance
Les habitués du Tour de France, on les trouve surtout dans les derniers lacets de la montée sur Verbier. Il y a ceux qui ne rechignent pas à passer des journées entières à se prélasser sur des chaises longues au bord de la route. Et il y a les autres, ceux qui profitent de la fermeture de la chaussée pour tester leurs mollets et comparer leur performance sur le terrain de jeu qui sera emprunté quelques heures plus tard par le peloton.
Kevin, 13 ans, de Rouen, fait partie de cette catégorie. Fou de vélo, fan de Tom Boonen, il parcourt durant trois semaines les routes du Tour de France en famille. «J’ai mis 40 minutes à faire la montée», raconte-t-il, cuissard et maillot aux couleurs d’une équipe française créée par l’ancien champion hexagonal Jacques Anquetil.
Son père, Olivier, a trouvé un bon emplacement pour son camping-car familial à un peu plus d’un kilomètre de la ligne d’arrivée. «On est arrivés vendredi et ça n’a pas été très difficile de trouver une place. Au Mont Ventoux, par exemple, ça risque d’être plus compliqué. Les meilleurs emplacements sont déjà occupés à l’heure où je vous parle.» Les coureurs, eux, ne graviront le terrible sommet provençal que samedi prochain…
La passion du vélo
Le Tour de France, on aime ou on n’aime pas. Pour les sceptiques, difficile de trouver une explication rationnelle à ce passe-temps qui occupe toutes les vacances estivales. Pour les autres, il y a la passion du vélo, inusable, hermétique aux critiques qui frappent un sport trop souvent confronté aux affaires de dopage ces dernières années.
Mais le Tour de France, c’est bien plus qu’une simple histoire de course de vélo. A 25 mètres de la ligne d’arrivée, Arlette, de Touraine, est bien installée dans une chaise de camping prêtée par Marcel, un voisin de barrière qui fait le pied de grue en sa compagnie depuis les aurores. «Nous sommes arrivés à 7h30 ce matin. C’était impressionnant de voir tous les préparatifs de la course. Bien sûr, la journée sera longue, mais l’ambiance est vraiment très sympa et on fait plein de rencontres extraordinaires.»
Sur les routes du Tour, c’est l’Europe d’en bas qui se rencontre au sommet. Fredy, un Allemand de Saarbrucken, vient échanger quelques mots avec Olivier, son voisin français qui occupe le camping-car d’à côté. Malgré la barrière des langues, la proximité est grande. «Nous avons des intérêts identiques et le même ‘esprit camping-car’. La seule différence, c’est que moi je soutiens Andreas Klöden et lui Christophe Moreau», rigole-t-il.
Les mordus et les autres
A côté des mordus, il y a aussi tous les autres, venus découvrir le Tour de France autrement que devant leur téléviseur. C’est le cas de Jens-Kristian, employé au siège principal de la banque danoise qui sponsorise l’équipe du cycliste bernois Fabian Cancellara.
«J’ai toujours aimé le cyclisme mais c’est la première fois que je vois le Tour de France en vrai. Je ne m’attendais pas à voir autant de monde, l’ambiance est vraiment fantastique».
A quelques centaines de mètres de la ligne d’arrivée, toute la petite famille danoise s’attelle à repeindre la route aux couleurs de la «Saxo Bank». Ou comment transformer le travail en passion dévorante l’espace d’un week-end familial.
La caravane passe, le public s’emballe
La longue attente de tous ces amateurs de vélo sera finalement récompensée. Par les sponsors du Tour de France d’abord. Car la caravane publicitaire est un rituel immuable, auquel la Grande Boucle doit pas mal de son succès.
Et ce ne sont pas seulement les plus grandes entreprises françaises qui sont représentées. Les syndicats Force Ouvrière et CFTC, la gendarmerie française et les sapeurs-pompiers font notamment partie du cortège. Un étonnant mélange des genres. Derrière les barrières, on en vient presque à s’étriper pour un chapeau «Cochonou» ou une main «PMU». Tous repartiront néanmoins de leur séjour en Valais avec une multitude d’accessoires plus ou moins utiles.
Une demi-heure plus tard, c’est l’apothéose avec le passage des coureurs. Alberto Contador s’envole dans la montée vers Verbier, lâchant tous les autres favoris dont l’Américain Lance Armstrong. L’euphorie n’est pas loin de tourner à la catastrophe. L’Espagnol doit jouer des poings pour se frayer un passage au travers de la foule. Finalement, la victoire et le maillot jaune lui sourient. Et dans les annales, on se souviendra peut-être que le Tour de France 2009 s’est en grande partie joué à Verbier.
Samuel Jaberg, Verbier, swissinfo.ch
96e édition. Plus grande course cycliste au monde et 3e événement sportif mondial, le Tour de France 2009 se dispute du samedi 4 au dimanche 26 juillet. Les 180 coureurs des 20 équipes engagées disputent 21 étapes pour un total de 3500 kilomètres.
En Suisse. L’arrivée de la 15e étape s’est disputée le dimanche 19 juillet sur les hauteurs de Verbier, dans le canton du Valais, après avoir traversé les cantons de Vaud et Fribourg. Le départ de la 16e étape sera donné à Martigny, le mardi 21 juillet. Le lundi 20 juillet, un jour de repos est accordé aux coureurs.
Caravane. En plus des coureurs et de tout le staff qui les accompagne, la caravane du Tour de France compte 1200 personnes liées à l’organisation, 2000 journalistes, autant de personnes de la caravane publicitaire, 2270 voitures et motos, 133 poids-lourds et 8 hélicoptères.
Sécurité. 740 policiers, pompiers, militaires, médecins et secouristes sont mobilisés en Valais pour un coût de 460’000 francs. 225 personnes ont été mobilisées dans le canton de Fribourg, 1000 sur les routes vaudoises.
International. D’importantes retombées en termes d’image sont attendues. Le Tour de France est suivi par 2000 journalistes et retransmis dans 186 pays grâce à 90 chaînes de télévision.
15e étape, Pontarlier-Verbier (207 km)
1. Alberto Contador ESP 5h03’58 »
2. Andy Schleck LUX + 43″
3. Vincenzo Nibali ITA 1’03 »
4. Frank Schleck LUX 1’06 »
5. Bradley Wiggins GBR 1’06 »
6. Carlos Sastre ESP 1’06 »
7. Cadel Evans AUS 1’26 »
8. Andreas Kloeden GER 1’29 »
9. Lance Armstrong USA 1’35 »
10. Kim Kirchen LUX 1’55 »
Général
1. Alberto Contador ESP 63h17’56 »
2. Lance Armstrong USA + 1’37 »
3. Bradley Wiggins GBR 1’46 »
4. Andreas Kloeden GER 2’17 »
5. Andy Schleck LUX 2’26 »
6. Rinaldo Nocentini ITA 2’30 »
7. Vincenzo Nibali ITA 2’51 »
8. Tony Martin GER 3’07 »
9. Christophe Le Mevel FRA 3’09 »
10. Frank Schleck LUX 3’25 »
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