La politique d’asile sous le feu de la critique
Les durcissements introduits l’an dernier en matière d’asile vont à l’encontre des droits de l’homme, estime l’Organisation suisse d’aide au réfugiés (OSAR).
L’OSAR critique le projet d’étendre la suppression de l’aide sociale à tous les requérants déboutés ainsi que la réduction drastique du délai de recours.
«La procédure d’asile devient de plus en plus rapide et le risque d’erreur a augmenté», dénonce Jürg Schertenleib, responsable du service juridique de l’OSAR. Qui plus est, le délai de recours a été ramené de 30 à 5 jours ouvrables en cas de décision de non-entrée en matière (NEM), explique ce dernier.
Cette situation rend en pratique un recours quasi impossible. Ceci d’autant que l’accès à une consultation juridique est souvent difficile pour des personnes qui ne maîtrisent pas toujours les langues du pays.
Concrètement, l’OSAR exige que le délai de recours soit porté à au moins dix jours. Et que les personnes concernées aient accès à des conseils et à une représentation juridiques.
«Nous ne prenons pas position politiquement sur ce rapport publié en vue du débat au Parlement de cet automne», indique Dominique Boillat, porte-parole à l’Office fédéral des migrations (ODM).
«Pour ce qui est de l’office, un certain nombre de critiques de l’OSAR sont tout à fait acceptables. Mais certains exemples contenus dans ce rapport sont anciens. Nos décisions ont parfois été corrigées sur la base de celles de la commission de recours.»
Sur la question du délai de recours, Dominique Boillat explique à swissinfo qu’à ses yeux, «5 jours, c’est beaucoup pour quelqu’un qui veut vraiment faire recours. La critique n’est pas vraiment fondée.»
Délais de départ plus réalistes
L’OSAR a d’autres revendications. Parmi elles, des délais de départ réalistes. Une personne frappée d’une NEM a 24 heures pour quitter la Suisse, rappelle l’organisation. D’où l’importance aussi pour cette personne d’obtenir conseils et moyens d’aide au retour. Bien souvent pourtant, ce n’est pas le cas. Si bien que beaucoup disparaissent dans la nature, constate l’organisation.
«C’est une critique en partie justifiée, indique Dominique Boillat. Un projet pilote de six mois a commencé au début de l’année. Il permet d’offrir une aide ciblée au retour pour les personnes qui le souhaitent. Les échos sont bons et si notre bilan est positif à fin août, ce projet sera prolongé pour un an.»
Dominique Boillat assure aussi que «les décisions de NEM sont prises de manière fondée. Quand nous avons un doute, nous prenons le temps. Les NEM sont décidées en cas d’abus manifeste, d’absence de bonne volonté évidente.»
Suppression de l’aide sociale
L’OSAR critique aussi les problèmes d’accès à l’aide d’urgence. Devenu capital avec la suppression de l’aide sociale à toutes les personnes ayant reçu une NEM, le droit à cette aide garanti par la Constitution n’a pas été respecté dans tous les cantons. Il a du reste fallu un arrêt du Tribunal fédéral en mars pour l’imposer. Cela n’empêche pas certains cantons de persister à refuser l’aide d’urgence.
Même après un an, des questions centrales comme l’encadrement et l’hébergement des bénéficiaires de l’aide d’urgence ne sont pas réglées, note aussi Jürg Schertenleib. Les personnes particulièrement vulnérables ne bénéficient pas non plus d’un traitement satisfaisant.
En clair, l’OSAR s’oppose absolument à ce que la suppression de l’aide sociale soit étendue à tous les requérants d’asile déboutés.
Pour rappel, le Conseil des Etats (Chambre haute) a déjà opté pour cette mesure en mars dernier dans le cadre d’une nouvelle révision de la loi sur l’asile. Le Conseil national (Chambre basse) se penchera sur la question lors de la session d’automne. Mais sa commission préparatoire en soutient l’idée.
swissinfo et les agences
Demandeurs d’asile en 2004: 14’250
Recul par rapport à 2003: 32%
Depuis avril 2004, le droit d’asile a été durci. Les demandeurs d’asile pour lesquels les autorités ne sont pas entrées en matière n’ont plus droit à l’aide sociale
– L’Organisation suisse d’aide aux réfugiés (OSAR) est l’organisation faîtière, à l’échelle nationale, des œuvres d’entraide actives dans l’aide aux réfugiés.
– Elle représente les intérêts des requérants d’asile et des réfugiés auprès du public, des autorités et du monde politique.
– En sont membres, Caritas Suisse, l’entraide protestante (EPER), l’Organisation suisse d’entraide ouvrière (OSEO), la Croix-Rouge suisse (CRS) et l’Union suisse des comités d’entraide juive (USEJ).
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