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La politique de détention sous la loupe de l’ONU

Les conditions de détention sont observées attentivement par l'ONU. Keystone

Lundi à Genève, le comité de l'ONU contre la torture a questionné la Suisse sur l'usage de la force dans le cadre de ses politiques de détention et d'asile.

Les dix membres du comité se sont inquiétés, entre autres, des dispositions législatives à l’étude concernant l’usage de pistolets à électrochocs lors de rapatriements forcés.

Dirigée par le vice-directeur à l’Office fédéral de la justice Bernardo Stadelmann, la délégation suisse a présenté devant le comité son quatrième rapport. Une démarche qui est conforme à la Convention contre la torture, ratifiée par la Suisse en décembre 1986.

Ce rapport compte plusieurs points portant sur l’asile et les rapatriements forcés, le respect des droits des gens détenus par la police et le transfert de prisonniers entre cantons suisses.

Plaintes en augmentation

Le rapporteur du comité pour la Suisse, Claudio Grossman (Chili) a demandé à la délégation suisse d’expliquer les raisons pour lesquelles le nombre de plaintes pour crime de tortures ou traitements cruels, inhumains ou dégradants est en hausse dans plusieurs cantons.

De son côté, Amnesty International avait fait état de trois plaintes de requérants d’asile au centre de Kreuzlingen (Thurgovie). Le 14 avril dernier, l’organisation de défense des droits humains avait dénoncé dans sa lettre aux autorités suisses l’impact négatif des dispositions nouvelles en matière de droit d’asile, notamment des délais plus courts pour le renvoi des requérants déboutés.

Deux cas tragiques

A noter que le corapporteur du comité, Sayed El-Masry (Egypte), a évoqué le cas de deux décès lors de rapatriements forcés. En 1999, un Egyptien de 27 ans est mort étouffé à l’aéroport de Zurich. Il avait été ligoté et baillonné par une bande adhésive alors qu’il souffrait de difficultés respiratoires.

En 2001, un Nigérian de 27 ans est mort au centre de détention de Granges (Valais), après avoir résisté à son renvoi. L’autopsie conclut à «une mort par asphyxie».

Peu de plaintes

Très peu de plaintes ont abouti à des condamnations, a fait remarquer la délégation suisse. Le chef de la police genevoise Urs Rechsteiner a indiqué que le phénomène s’explique par de grandes manifestations violentes, type anti-G8.

En outre, de simples contrôles d’identité dégénèrent, en raison du non-respect des prescriptions administratives, a reconnu M. Rechsteiner. Il a mis en cause aussi le manque d’effectifs des polices cantonales.

Instrument de torture

Claudio Grossman s’est également inquiété du nouveau projet de loi fédérale sur l’usage de la contrainte (article 8) autorisant un appareil produisant des chocs électriques.

Le corapporteur Sayed El Masry (Egypte) a estimé que de nombreux pays considèrent cet appareil comme un instrument de torture.

Les pistolets à électrochocs projettent à une distance de 5 à 10 mètres deux électrodes qui s’accrochent aux vêtements et provoquent un choc électrique. Cette décharge a pour but d’immobiliser la personne visée et d’éviter décès et blessures lors de rapatriements forcés.

Une mesure encore provisoire

La délégation suisse a répondu qu’aucune décision n’avait encore été prise. Bernado Stadelmann a précisé que la procédure de consultation a fait apparaître des critiques concernant cette mesure de contrainte.

Le gouvernement devra décider s’il maintient ou non l’usage de ce type d’armes dans le projet de loi soumis au parlement.

Le vice-directeur de l’Office fédéral de la justice a précisé à swissinfo que «toutes mesure approuvée par le parlement serait conforme aux lois internationales protégeant les droits de l’homme».

Une rencontre constructive

Dans l’ensemble, Bernardo Stadelmann estime que la rencontre a été «constructive».

«Nous avons pu répondre à toutes les questions et les membres du comité ont été satisfaits de nos réponses. Il ne reste aucun problème non résolu», a-t-il commenté pour swissinfo.

«Le comité a relevé le bon exemple donnée par la Suisse dans la communauté internationale concernant le respect de la Convention contre la torture et en matière de défense des droits démocratiques et des droits humains», a-t-il ajouté.

Amnesty Suisse reste inquiète

De son côté, la section suisse d’Amnesty International s’est dit déçue que le comité contre la torture ne se soit pas montré plus critique à l’égard de la Suisse, particulièrement à propos de sa politique d’asile.

«La situation actuelle a été dépeinte de manière positive par la délégation suisse alors que ce n’est pas le cas», explique Denise Graf, coordinatrice pour les réfugiés.

Elle a notamment évoqué pour swissinfo le fait que le comité n’avait pas soulevé la question des restrictions à la loi sur l’asile et l’usage d’agences de sécurité privées dans les centres pour requérants.

Denise Graf espère toutefois que le comité se montrera plus sévère lorsqu’il publiera ses recommandations, ce qui doit être fait prochainement.

swissinfo et les agences

La Suisse a ratifié la Convention contre la torture en 1986.
Elle a déposé son dernier rapport en 1997 et celui de 2005 est son 4e rapport.
La Loi fédérale l’usage de la contrainte (LUsC) permet l’usage de menottes et autres entraves.
En revanche, les casques intégraux, les baillons ainsi que l’administration de calmants ne sont plus autorisés.

– Au moins deux requérants d’asile déboutés ont perdu la vie en Suisse lors d’opérations de contrainte policière en vue d’une expulsion.

– En 1999, un Egyptien de 27 ans qui devait être renvoyé meurt étouffé à l’aéroport de Zurich. Il avait été ligoté et baillonné par une bande adhésive alors qu’il souffrait de difficultés respiratoires.

– En 2001, un Nigérian de 27 ans meurt au centre de détention de Granges (Valais), après avoir résisté à son renvoi. L’autopsie conclut à «une mort par asphyxie».

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