La Suisse se prépare à une session baleinière houleuse
La délégation suisse est arrivée sur l'île de St Kitts, où s'ouvre la session annuelle de la Commission baleinière internationale (CBI), dans une ambiance tendue.
«C’est le calme avant la tempête», lance le chef de la délégation Bruno Mainini qui se prépare à jouer le rôle de médiateur entre partisans et adversaires de la pêche à la baleine.
Cette 58e session annuelle de la CBI, qui se tient dès vendredi et pour quatre jours sur l’île de St Kitts, dans les Caraïbes, s’annonce houleuse.
Depuis plus de dix ans, l’interdiction de la pêche à la baleine alimente les discussions de la Commission, de plus en plus tiraillée entre les pays défenseurs des baleines et ceux qui pratiquent la pêche.
La CBI cherche à sortir de ce mauvais pas par une procédure de réglementation autorisant des prises, mais à des conditions strictes.
«Tout le monde est presque certain qu’il va y avoir du changement en faveur du bloc des pays qui défendent la pêche, déclare à swissinfo Bruno Mainini. Mais rien n’est joué et nous avons eu parfois des surprises de dernière minute».
Le chef de la délégation suisse juge cependant que cette session ne suffira pas à adopter un nouveau règlement. Pour lui, le sujet est trop complexe et les deux fronts trop déterminés.
A de très strictes conditions
«Tout le monde parle avec nous, nous pouvons négocier avec les deux camps», ajoute Bruno Mainini. Ainsi, la Suisse serait prête à soutenir une pêche strictement limitée à certaines zones géographiques, à condition qu’il soit scientifiquement prouvé qu’elle ne menace ni la survie des espèces ni leur écosystème.
Le règlement en discussion prévoit d’attribuer à chaque pays des quotas pour tous les types de baleines, qu’ils devront eux-mêmes répartir selon leurs besoins commerciaux et scientifiques.
Pour les défenseurs de la baleine, il s’agit surtout d’éviter que les quotas de pêche soient contournés sous le prétexte d’une pêche «scientifique».
L’objectif de la Suisse reste de limiter la pêche à la baleine. «Dans les dix dernières années, le nombre de baleines tuées s’est multiplié par trois, c’est absolument inacceptable», note Bruno Mainini.
Selon lui, il est cependant «parfaitement illusoire» de penser qu’à l’avenir plus aucune baleine ne sera tuée. La Suisse tente simplement de promouvoir une ligne pragmatique, ce qui pour Bruno Mainini implique «moins de pêche grâce à plus de contrôle».
une interdiction totale
De son côté, Greenpeace Suisse rejette fermement la pratique des quotas. «Seule une interdiction peut protéger les baleines», déclare Yves Zenger, porte-parole de l’organisation écologiste. D’après lui, il n’est absolument pas prouvé que l’autorisation d’une pêche limitée puisse stabiliser la population baleinière.
Toujours selon Greenpeace, le respect des quotas de pêche n’est pas vérifiable. Le Japon contourne déjà les dispositions internationales et pratique une pêche industrielle à fins commerciales sous le couvert de recherches scientifiques.
C’est pourquoi Yves Zenger demande que la Suisse «s’engage auprès de la CBI pour une interdiction totale de la pêche à la baleine, qui doit être étendue à tous les petits cétacés».
Greenpeace réclame également des sanctions sévères contre le Japon, qui tente d’acheter le soutien des pays en voie de développement siégeant à la CBI.
swissinfo et les agences
– La Commission baleinière internationale (CBI) a été instaurée en 1946 en vue de la conservation des populations de grands cétacés pour garantir le développement de l’industrie de la pêche à la baleine.
– La Suisse est membre de la CBI depuis 1980. Elle fait partie du groupe qui tente d’exercer une fonction de médiateur entre les pays qui ont un intérêt à pêcher la baleine et ceux qui rejettent cette pêche par principe.
– La délégation helvétique à la CBI est conduite par Bruno Mainini, responsable suppléant de la Conservation des espèces à l’Office vétérinaire fédéral (OVF).
En 1986, la CBI a adopté un moratoire sur la pêche à la baleine à des fins commerciales.
Prévu au départ pour cinq ans, il est toujours en vigueur aujourd’hui.
Le Japon, l’Islande et la Norvège ont toutefois obtenu la permission de continuer à pêcher la baleine à des fins scientifiques.
En 2006, les deux premiers pays nommés ont tué plus de 2000 cétacés, un record depuis 1986.
Pour les organisations écologistes, ces chiffres prouvent, si besoin était, que l’exploitation industrielle de la baleine n’a jamais cessé, malgré le moratoire.
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