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«La vérité interdite», un feuilleton sans fin

L'ouvrage sera distribué dès mercredi aux Etats-Unis. Keystone Archive

Sorti en novembre 2001 en France, et traduit en allemand et en italien, le livre «La vérité interdite» reste interdit en Suisse.

La justice suisse est une bonne justice, mais elle est incroyablement lente en raison des recours. Le livre «La vérité interdite» en est un excellent exemple. Depuis des mois, l’ouvrage est tour à tour interdit, autorisé, bloqué, et à nouveau interdit.

C’est Yeslam Binladin, 51 ans, financier genevois et demi-frère d’Oussama Ben Laden, qui s’oppose à la diffusion en Suisse de ce best-seller écrit par Jean-Charles Brisard, auteur d’un rapport sur «l’environnement économique d’Oussama Ben Laden», et par Guillaume Dasquié, rédacteur en chef de la lettre confidentielle Intelligence Online.

L’ouvrage, tiré à 80 000 exemplaires en France, et diffusé en Allemagne, en Italie, et à partir de demain aux Etats-Unis, évoque des liens entre la société genevoise SICO, dirigée par Yeslam Binladin, et des réseaux islamistes. Or, le financier genevois a toujours condamné les attentats du 11 septembre.

Retour à la Cour de justice

Le 25 janvier dernier, le Tribunal de première instance de Genève interdit la diffusion de «La vérité interdite» et de sa traduction allemande. Mais le 2 mai, la Cour de justice de Genève lève cette interdiction, considérant que Yeslam Binladin n’est pas la cible principale du livre.

C’est un succès de courte durée pour les éditeurs. Dès le 23 mai, le Tribunal fédéral accorde provisoirement l’effet suspensif au recours déposé par l’homme d’affaires. Les juges de Mon-Repos viennent de statuer définitivement sur l’effet suspensif: l’ouvrage reste bien interdit dans la Confédération.

Le Tribunal renvoie donc le dossier à la Cour de justice. «Il y a déjà des semaines que je ne cherche plus à suivre ce qui se passe en Suisse», assure en souriant Jean-Charles Brisard, beaucoup plus intéressé par la distribution aux Etats-Unis de son ouvrage.

Curieux transfert d’argent

On peut comprendre la démarche de Yeslam Binladin, citoyen suisse, indigné par un livre qui ne dirait pas la vérité sur ses sociétés et ses filiales dans des paradis fiscaux.

Mais pourquoi limite-t-il son action au seul territoire helvétique? D’un simple coup d’accélérateur, un Genevois, un Jurassien ou un Bâlois peut se procureur «La vérité interdite».

De plus, cette interdiction a largement contribué à la promotion de cet ouvrage, dont la diffusion en Suisse romande par les éditions parisiennes Denoël n’était que de 4 à 500 exemplaires à l’origine.

Par ailleurs, Yeslam Binladin reste dans le collimateur de la justice française. Le juge Renaud van Ruymbeke enquête sur un curieux transfert d’argent de 200 000 dollars entre l’une de ses sociétés dans les îles Vierges britanniques et l’Arabie Saoudite, via la France.

Le magistrat a procédé en mars à des perquisitions dans la villa à Cannes de Yeslam Binladin, et sur commission rogatoire, dans les locaux de sa société SICO à Genève.

swissinfo/Ian Hamel

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