Le gouvernement organise la défense de la «swissness»
Une certaine anarchie règne dans l'utilisation de la croix blanche et de la désignation «suisse». Mais l'exécutif a décidé d'y mettre de l'ordre.
Les milieux concernés – l’économie en particulier – ont jusqu’à fin mars 2008 pour se prononcer sur un projet de révision de la loi sur la protection des marques et provenances.
A l’avenir, pour qu’un produit puisse être considéré comme provenant de Suisse, la part helvétique des coûts de fabrication devrait représenter au minimum 60%.
Les coûts de fabrication, de développement et de recherche seront déterminants, mais pas ceux de marketing, a souligné le ministre de la justice Christoph Blocher. Toutes les catégories de produits seront concernées, qu’ils soient naturels, transformés ou industriels.
Cette valeur-limite risque de donner encore lieu à des discussions. Le secteur des montres, auxquelles s’applique aujourd’hui une part de 50 %, verrait d’un bon œil un taux de 80 %, a indiqué Felix Addor, le vice-directeur de l’Institut fédéral de la propriété intellectuelle.
Pour chacune de ces catégories, il est prévu en outre qu’un critère spécial indique le lien qui doit exister entre le produit et le lieu de provenance. Il serait ainsi possible de tenir compte des diverses méthodes de production.
Plainte pénale possible
Des instruments supplémentaires doivent par ailleurs renforcer la protection des indications de provenance en Suisse et à l’étranger.
A cette fin, l’Institut fédéral de la propriété intellectuelle doit pouvoir déposer une plainte pénale et prendre part à la procédure sur le plan national notamment en cas d’utilisation abusive de la désignation «suisse» et de la croix.
Autre proposition: la possibilité d’enregistrer les indications géographiques également pour les produits non agricoles.
Ces indications de provenance, qui renvoient à une origine géographique à laquelle une qualité particulière, une réputation ou une autre caractéristique du produit est associé, ainsi que les appellations d’origine doivent aussi pouvoir être enregistrées dans le registre des marques à titre de marques collectives ou de garantie.
Aussi pour les produits
Les armoiries officielles de la Suisse (croix suisse placée sur un écusson) sont réservées à la Confédération et utilisées que par celle-ci ou ses unités.
En revanche, une société doit pouvoir afficher le drapeau suisse et la croix suisse en rapport avec des services ou des produits si ceux-ci proviennent effectivement de Suisse. Cela est officiellement interdit aujourd’hui pour les produits.
Le gouvernement espère avec cette révision de loi renforcer la protection du label helvétique et de son symbole tout en donnant plus de clarté et de sécurité juridique.
Toujours plus d’entreprises recourent à des désignations comme «Suisse», «qualité suisse», «made in Switzerland». Or les abus se sont multipliés ces dernières années.
La législation ne tient en effet pas suffisamment compte de la réalité économique et n’est donc plus satisfaisante. Excepté pour les montres, il n’existe pas de critères clairs, déterminant quand l’appellation «suisse» peut être apposée.
Il en va de l’image de qualité de la Suisse, a insisté Christoph Blocher. Et Felix Addor de citer une étude selon laquelle deux tiers des consommateurs sont prêts à dépenser plus pour le label suisse. Une prochaine étape pourrait être d’après lui la protection de symboles associés à la Suisse comme le Cervin.
swissinfo et les agences
Pour le consommateur suisse comme étranger, la ‘suissitude’ évoque «un monde sain, bien ordonné, efficace, qui sous-entend les notions de précision, d’exactitude, de fiabilité et de solidité», lit-on dans le rapport du Conseil fédéral.
La ‘suissitude’ est synonyme d’innovation, de produits exclusifs et de services excellents. Elle fait référence à un pays «riche de cultures variées, cosmopolite et ouvert au monde».
En clair, cette notion est positive et fait vendre. La moitié des entreprises distribuant des articles suisses ajoutent la désignation ‘suisse’ à côté de leur propre marque.
Actuellement, la croix suisse ne peut légalement ni être enregistrée comme une marque ni apposée sur des produits à des fins commerciales. Elle peut l’être sur des services sous certaines conditions.
L’utilisation de ‘suisse’ ou ‘swiss made’ est surtout limitée par la jurisprudence. Jusqu’ici, le gouvernement a fixé des règles claires pour les seules montres.
La réalité montre que ces règles sont fréquemment contournées, voire violées. Et les abus rarement poursuivis, en Suisse mais aussi à l’étranger, notamment parce que la marque ‘suisse’ n’y existe pas au sens juridique.
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