Le Jet d’eau «saigne» pour les victimes du Darfour
Mardi, Journée mondiale de la justice, le signe distinctif de Genève sera illuminé en rouge pour symboliser le sang versé dans les atrocités du Darfour, dans l'ouest du Soudan.
Des associations et les autorités municipales ont voulu ainsi rappeler au monde qu’il faut trouver une solution à ce conflit qui a fait 200’000 morts et des millions de déplacés.
«Cela ne va rien changer sur le terrain mais, symboliquement, c’est très important que la Genève internationale affirme clairement que ces massacres et cette catastrophe humanitaire continuent», indique Philippe Grant, président de TRIAL, une organisation de défense des victimes de crimes de guerre basée à Genève.
Cette initiative, qui prévoit de baigner le jet de 140 mètres de hauteur d’une lumière rouge à la tombée de la nuit, a été proposée par les militants de TRIAL aux autorités municipales.
De son côté, le maire Patrice Mugny a déclaré que Genève, avec sa solide tradition humanitaire, envoyait un «message fort» à propos des événements du Darfour.
Nouveaux massacres
«Les nouvelles de nouveaux massacres de centaines, de milliers de gens, nous parviennent l’une après l’autre, ajoute-t-il. Genève saisit cette occasion pour redire une fois encore que ces actes terribles doivent s’arrêter.»
Mahor Chiche, président de la campagne Sauver le Darfour basée à Paris, ajoute qu’il est crucial de maintenir la pression de la diplomatie et de l’opinion, car le gouvernement soudanais est sensible aux critiques extérieures.
Et de préciser que la Suisse, dont la présidente Micheline Calmy-Rey a visité un camp de réfugiés du Darfour au Tchad ce week-end, a un rôle à jouer dans la recherche de solutions.
Obtenir justice
TRIAL veut aussi maintenir la pression sur le gouvernement soudanais afin que celui coopère avec la Cour pénale internationale (CPI), basée à La Haye, aux Pays-Bas.
Cette cour a émis des mandats d’arrêt contre deux hommes, dont le ministre soudanais des Affaires humanitaires, soupçonnés de crimes de guerre. Mais le Soudan ne reconnaît pas la CPI.
La semaine dernière, TRIAL a demandé au Comité des droits de l’homme de l’ONU, actuellement réuni à Genève, de rappeler au Soudan ses obligations envers les traités internationaux.
«Nous voulons une justice internationale efficace et nous voulons empêcher que de nouveaux crimes soient commis», déclare Philippe Grant à swissinfo.
TRIAL annonce qu’elle va bientôt commencer à travailler avec des victimes du Darfour réfugiées en Suisse afin de les aider à obtenir des compensations devant la CPI.
Discussions en Lybie
La tentative genevoise de rappeler ce drame intervient à l’issue d’une réunion de deux jours en Lybie, lors de laquelle des médiateurs internationaux ont recherchés les moyens de mettre fin au conflit.
L’envoyé de l’ONU Jan Eliasson a été rejoint à Tripoli par des représentants des Etats-Unis, de l’Union européenne, de l’Union africaine et de la Chine.
Les médiateurs ont été critiqués pour n’avoir pas réussi à organiser une rencontre entre groupes rebelles. Après l’accord de paix signé par un seul d’entre eux l’année dernière à Khartoum, ces groupes se sont éparpillés en plus d’une dizaine de factions armées.
Samedi, cinq groupes ont accepté d’unir leurs forces pour mettre fin à ce conflit de quatre ans et appelé les autres à les rejoindre.
A l’issue de la réunion, lundi à Tripoli, Jan Eliasson a déclaré qu’il voyait enfin «de la lumière au bout du tunnel».
swissinfo, Adam Beaumont et les agences
(Traduction de l’anglais: Isabelle Eichenberger)
Dimanche, le Soudan a émis des réserves contre le projet de résolution du Conseil de sécurité de l’ONU, diffusé mercredi et qui autorise le déploiement au Darfour d’une force de paix de 26’000 hommes de l’Union africaine (UA).
Après des mois de discussions, de menaces et de négociations, Khartoum a finalement accepté d’appuyer les 7000 soldats de l’UA déjà sur place. Ils n’ont toutefois pas réussi à mettre fin à la violence.
Selon le projet, la force conjointe devrait être autorisée à utiliser «tous les moyens nécessaires» ainsi que la force pour protéger les millions de civils menacés.
Selon des experts internationaux, plus de 200’000 personnes ont péri et 2,5 millions ont été déplacées dans la région du Darfour depuis 2003, lorsque des rebelles africains ont pris les armes contre le gouvernement soudanais à majorité arabe.
Ce dernier est accusé d’avoir chargé une milice de nomades arabes de lancer des représailles, ce que Khartoum dément.
L’accord de paix, signé il y a un an entre le gouvernement du président Omar al-Bashir et un groupe rebelle, est resté lettre morte car une bonne dizaine d’autres factions l’ont rejeté et continué les combats.
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