Les prisons suisses ne sont pas faites pour les jeunes
Une étude de l'Office fédéral de la Justice (OFJ) donne une image inquiétante de la situation des jeunes en préventive en Suisse, trop souvent détenus avec des adultes.
Le problème est particulièrement aigu en Suisse romande, où les mineurs sont plus facilement placés en détention préventive qu’en Suisse alémanique.
En 2005, sur 1005 mineurs placés en détention préventive, 726 se trouvaient en prison, 273 dans des foyers spécialisés et 6 dans des hôpitaux.
Or, si dans les foyers, ce sont des pédagogues qui s’occupent des jeunes, en prison, il n’y a que des gardiens. En bref, l’enquête de l’OFJ relève que les institutions de détention préventive ne sont le plus souvent pas en mesure de s’occuper des jeunes correctement.
Et même si les responsables sont conscients du problème, les standards de la nouvelle loi sur la condition pénale des mineurs ne sont, de manière générale, pas respectés.
Il s’agit non seulement de disposer de locaux particuliers mais encore de structures d’occupation adéquates. Les foyers pour jeunes n’ont pas assez de lieux de détention et les jeunes sont ainsi dirigés vers les prisons.
Pour l’Office fédéral, il faudra encore du temps pour que la situation s’améliore.
Emprisonnés avec des adultes
Autre aspect alarmant révélé par cette étude: de nombreux mineurs, que ce soit dans le cadre d’une détention préventive ou après un jugement, côtoient des détenus adultes en prison.
En 2004, 86 jeunes de moins de 18 ans, dont 44 en régime préventif, étaient de ce fait emprisonnés dans un établissement carcéral pour adultes.
L’OFJ souligne que seule une minorité d’établissements de détention disposent d’une séparation sur le plan architectural entre mineurs et adultes et qu’il en va de même pour la gestion au quotidien des détenus.
A ses yeux, le régime de détention carcéral, axé avant tout sur des mesures sécuritaires, n’assure pas aux mineurs le suivi socio-éducatif nécessaire.
Pression sur les cantons
Face à ce constat, la Confédération a décidé de faire pression sur les cantons afin d’accélérer la construction des divisions pour mineurs prévues par les nouveaux standards. Dès janvier 2008, dans le cadre de la péréquation financière, elle va introduire un principe de malus dans les systèmes de construction.
Dès lors, si un canton ne garantit pas une exécution conforme au droit fédéral, des subventions de construction destinées à un autre établissement de ce même canton pourront être réduites, voire refusées.
Contraire aux droits de l’enfant
Réagissant à cette étude, la fondation d’aide à l’enfance Terre des Hommes s’est déclarée inquiète. «Nous prônons un autre type de justice envers les mineurs à l’étranger, alors qu’en Suisse même la Convention des droits de l’enfant et le code pénal des mineurs ne sont pas respectés», a déploré un de ses responsables, John Orlando, sur les ondes de la Radio Suisse Romande.
«Il faut une volonté politique pour que les conventions ratifiées soient appliquées. Nous appuierons les autorités dans leurs actions» a-t-il ajouté.
swissinfo et les agences
La nouvelle loi sur le droit pénal des mineurs, entrée en vigueur en janvier 2007, stipule que la détention avant jugement doit être limitée autant que possible.
Lorsqu’ils sont détenus, les mineurs doivent être placés dans un établissement spécialisé ou dans une division particulière d’une maison d’arrêts, séparés des détenus adultes. Une prise en charge socio-éducative doit en outre être assurée.
L’Office fédéral de la Justice a mené son enquête auprès de 66 institutions dans toute la Suisse, dont 9 foyers pour mineurs, 51 prisons et 6 hôpitaux. Deux tiers des établissements ont répondu.
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