Naturalisation par les urnes: la démocratie en question à Emmen
Les citoyens de la commune lucernoise d’Emmen doivent décider dimanche s’ils accordent le passeport suisse à 56 étrangers. Un exemple de naturalisation par le peuple qui pose la question du secret de données réputées protégées.
Les citoyens de la commune lucernoise d’Emmen doivent décider dimanche s’ils accordent le passeport suisse à 56 étrangers. Un exemple de naturalisation par le peuple qui pose la question du secret de données réputées protégées.
56 étrangers, en majorité des ressortissants de l’ex-Yougoslavie, attendent avec impatience de connaître le sort que leur réserveront dimanche les citoyens d’Emmen. Si un refus de leur demande de naturalisation est à craindre, la procédure utilisée par la commune lucernoise n’en est pas moins contestable.
Les autorités d’Emmen ont en effet publié une brochure dans laquelle s’étalent non seulement les photos des candidats à la naturalisation, leur parcours professionnel et leur situation familiale, mais encore leur confession, leur revenu ainsi que leur fortune imposable.
Comment se fait-il que l’on puisse rendre publiques de telles données? Sur la question, Confédération et cantons se renvoient la balle. Selon l’Office fédéral des étrangers (OFE), «toutes les questions relatives à la protection des données sont du ressort des cantons, en l’occurrence Lucerne».
Le responsable lucernois de la protection des données a bien tenté d’intervenir. «J’ai demandé que les photos des candidats ne figurent pas sur la brochure, ce qui a été refusé.» Selon Rolf Bündler, c’est Berne qui devrait se demander si une telle procédure n’enfreint pas la Constitution sur l’égalité des droits.
Face aux dérives de vote conditionnées par l’origine, l’Etat ne demeure toutefois pas impuissant. A l’Office fédéral des étrangers, on prépare un projet de loi sur la naturalisation facilitée. Ce texte prévoit entre autres d’accorder un droit de recours aux étrangers dont la demande a été refusée.
Selon le porte-parole de l’OFE, Christoph Müller, l’instauration d’une telle mesure ne manquerait pas d’«augmenter les compétences de la Confédération par rapport à celles des cantons et des communes en matière de naturalisation des étrangers».
Reste qu’une fois agréé par le Département de justice et police et par le Parlement, le projet sera soumis à votation populaire. Aura-t-il alors une chance d’être accepté par le souverain? Rien n’est moins sûr. Car comme le rappelle Christoph Müller, un projet de naturalisation facilitée des étrangers avait déjà subi le test des urnes en 1994. S’il avait remporté la faveur du peuple, en revanche la majorité des cantons s’y étaient opposés.
Claudine Chappuis
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