Ostéoporose et alimentation des danseuses
Le Prix de Lausanne surveille de près la santé de ses candidats. Cette année, 80 danseuses participent à une étude scientifique menée par un professeur du CHUV.
Elle porte sur les liens entre l’alimentation et la santé osseuse des danseuses.
Soumis à un exercice intensif dès le plus jeune âge, l’appareil ostéoarticulaire des danseurs est très sollicité.
Au risque de voir des lésions apparaître, «dont certaines aiguës. Elles peuvent carrément handicaper la carrière du danseur», explique le Dr Carlo Bagutti, médecin-conseil du Prix de Lausanne depuis une dizaine d’années.
Cela dit, la sous-alimentation des danseuses est tout aussi inquiétante. C’est le cas de celles qui veulent à tout prix répondre aux exigences esthétiques de minceur voulues par le milieu.
Restrictions quotidiennes
Le cas des danseuses relève rarement de l’anorexie mentale. Ces filles ne souffrent pas de dérèglements psychologiques, selon le Dr Bagutti. Pour arriver à un tel niveau, elles possèdent forcément un mental très fort.
Mais, en s’imposant quotidiennement de petites restrictions alimentaires, elles sont susceptibles de développer des carences. Elles peuvent mener à des retards du développement pubertaire ou à des problèmes osseux.
Alerté il y a quatre ans par l’extrême minceur de certaines candidates, le Prix a donc décidé de passer sous la loupe leur comportement alimentaire.
«Dans la mesure où on récompense le potentiel des danseurs, explique Franz Blankart, cela n’a aucun sens de récompenser quelqu’un qui est anorexique. Et qui, par conséquent met en danger son ossature à 15 ou 16 ans.»
A 25 ans, cette personne ne sera plus utilisable en termes de danse, poursuit le président du Prix de Lausanne.
La méthode de Lausanne
Un an avant leur venue à Lausanne, les candidats reçoivent un questionnaire détaillé adressé au médecin de famille. Lequel sera du même coup sensibilisé à cet aspect.
«Nous pouvons ainsi détecter des retards de développement ou des problèmes diététiques», précise le Dr Bagutti.
Si un problème surgit (3 ou 4 cas par an), la candidate est priée d’améliorer sa nutrition, à moins de se voir exclue du concours. Cette condition se veut didactique puisque dissuasive.
«C’est extraordinaire, renchérit Franz Blankart. Si la mère ou le médecin dit ‘mange’, elle ne mange pas, mais si le Prix de Lausanne le lui impose comme condition à sa participation, elle commence à manger!»
Cette «méthode de Lausanne» a d’ailleurs été adoptée par les grandes institutions internationales.
Mais le suivi médical ne s’arrête pas là. Lors du concours, les danseuses sont soumises à un contrôle. Elles doivent en outre suivre un séminaire consacré à un thème «santé»
Financement indépendant
Côté financement, le professeur Burckhardt regrette de n’avoir pas réussi à intéresser l’industrie alimentaire, notamment la recherche sur les «alicaments» (aliments artificiellement enrichis en nutriments divers).
Devisé à 50’000 francs, le projet a reçu un soutien de la Société académique vaudoise (20%). Le reste provient des caisses de la fondation personnelle du professeur.
Les résultats de l’étude, s’ils sont concluants, devraient être publiés d’ici à une année. Mais il se peut que de trop grandes différences physiques dues à la variété de leurs origines «nous posent des problèmes statistiques, et que nous devions revoir le concept», conclut Peter Burckhardt.
swissinfo, Anne Rubin
Depuis 4 ans, le prix de Lausanne effectue des contrôles médicaux avant et pendant le concours.
Ils examinent le comportement alimentaire des danseuses.
Cette méthode a été reprise par la plupart des grandes écoles de danse internationales.
Une mauvaise alimentation ou des restrictions répétées peut nuire à la santé et à l’avenir des danseuses.
– L’anorexie mentale ne touche qu’exceptionnellement les danseuses, habituellement assez fortes psychologiquement. Certaines vont par contre s’imposer des restrictions alimentaires qui peuvent provoquer des carences.
– Quatre critères définissent l’anorexie mentale: peser moins de 80% de son poids idéal; avoir une peur maladive de prendre du poids; nier sa maigreur; aménorrhée (absence de règles).
– L’ostéoporose se caractérise par une masse osseuse faible. Elle accroît le risque de fractures, surtout chez les femmes ménopausées.
– L’alimentation actuelle est plus riche en sels et plus acide, ce qui favorise l’ostéoporose. Au 19e siècle, elle était plus riche en fruits et légumes, et donc en potassium et bicarbonate, c’est-à-dire plus alcaline.
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