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Pour la Suisse, l’exécution de Saddam Hussein «n’est pas justifiable»

Les caméras de la télévision nationale irakienne ont filmé l'exécution de l'ex-dictateur. Keystone

Le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) a pris acte de l'exécution de l'ex-président irakien, soulignant cependant que pour la Suisse, la peine de mort «n'est pas justifiable».

L’ancien Raïs, arrêté par les Américains en décembre 2003, a été pendu samedi à l’aube à Bagdad. Il avait été condamné à mort pour crimes contre l’humanité.

«Pour la Suisse, la peine de mort n’est pas justifiable, même pour les crimes les plus graves […] Cette position fondamentale vaut également dans le cas de Saddam Hussein», a indiqué samedi le DFAE dans un communiqué.

L’«insécurité dramatique» qui prévaut en Irak demeure cependant préoccupante, poursuit le texte. Le DFAE souhaite que les Irakiens puissent «surmonter les épreuves du passé» et trouver les bases d’une réconciliation pour parvenir à la paix et construire une société démocratique.

Dernière mise en garde

Saddam Hussein a été pendu samedi avant 06h00 (04h00 heure suisse). Il avait été condamné à mort le 5 novembre dernier pour l’exécution de 148 chiites dans le village de Doujaïl, au nord de Bagdad, dans les années 1980.

«Saddam est monté calmement à la potence, il était résolu et courageux», a raconté à la télévision nationale Iraqia le conseiller à la sécurité nationale, Moaffaq al-Roubaï.

La télévision irakienne a diffusé dans la matinée à plusieurs reprises une séquence d’une vingtaine de secondes de l’exécution. Ces images montrent Saddam Hussein, les mains attachées dans le dos, le visage découvert. Les images ne montrent pas la pendaison elle-même.

Ses dernières paroles, selon le juge Mounir Haddad, ont été: «J’espère que vous resterez unis et je vous mets en garde: ne faites pas confiance à la coalition iranienne, ces gens sont dangereux». Le corps «pourrait être remis à sa famille pour être enterré», a précisé Moaffaq al-Roubaï.

La pendaison du demi-frère de Saddam Hussein, Barzan al-Tikriti, ancien chef des services de renseignement, et de l’ancien président du tribunal révolutionnaire Awad al-Bandar, a été ajournée.

Appel aux partisans de l’ex-Raïs

Les autorités irakiennes ont voulu exécuter l’ex-dictateur avant l’aube, qui marque le début des célébrations de l’Aïd al-Adha, la fête du Sacrifice.

Pour sa part, le Premier ministre irakien Nouri al Maliki s’est félicité de l’«exécution du criminel Saddam». Il a par ailleurs lancé un appel à la réconciliation à l’intention des partisans de l’ancien régime dont «les mains ne sont pas tachées de sang».

A Bagdad, la nouvelle a été accueillie dans une relative indifférence. Seuls quelques tirs de joie ont résonné dans les quartiers majoritairement chiites. La circulation automobile était elle aussi habituelle sur les ponts enjambant le fleuve Tigre, qui coupe la ville du nord au sud.

Réactions contrastées à l’étranger

A l’étranger, la nouvelle de l’exécution de Saddam Hussein a été saluée par George Bush. L’exécution «ne mettra pas fin à la violence en Irak, mais c’est une étape importante sur la route de l’Irak vers une démocratie», a déclaré le président américain dans un communiqué.

Saddam Hussein «a payé», a déclaré de son côté la ministre britannique des Affaires étrangères, Margaret Beckett. Le ministère français des Affaires étrangères a quant à lui appelé les Irakiens à «regarder vers l’avenir et à travailler à la réconciliation et à l’unité nationale».

Tout en précisant que «cette décision appartient au peuple et aux autorités souveraines de l’Irak», Paris a néanmoins réaffirmé son opposition de principe à la peine de mort.

Craintes pour le futur

Pour Israël, «justice a été faite», a déclaré un haut responsable israélien. «Nous parlons d’un homme qui a mis le Moyen-Orient à feu et à sang à plusieurs reprises». L’Iran a également salué l’exécution de l’ancien dictateur comme une «victoire des Irakiens».

En revanche, Moscou redoute que cette exécution ne «provoque une nouvelle spirale» de violence. Elle «va déstabiliser la situation non seulement en Irak mais dans toute la région du Golfe», a déclaré le représentant du Comité des relations internationales de la chambre haute du Parlement russe.

Pour sa part, Amnesty International a estimé que ce dénouement représentait une «occasion manquée» d’obliger l’ancien dictateur irakien à rendre compte de ses crimes. Amnesty a en outre rappelé son «opposition inconditionnelle à la peine de mort».

Enfin, le Conseil de l’Europe a quant à lui condamné les «crimes impitoyables» de l’ancien Raïs mais estimé qu’il ne fallait pas le tuer. «L’Irak a manqué une occasion de rejoindre le monde civilisé», a dit le secrétaire général Terry Davis.

swissinfo et les agences

Saddam Hussein a dirigé l’Irak de 1979 à la chute du régime, en avril 2003.

Le 13 décembre 2003, l’ex-dictateur a été retrouvé par l’armée américaine dans son fief de Tikrit, à l’issue d’une traque de huit mois. Il se cachait au fond d’un trou. Les images humiliantes de sa capture ont fait le tour du monde.

Ses fils Qoussaï et Oudaï ont été tués trois mois plus tard par les forces américaines.

Lors de son procès, Saddam Hussein, 69 ans, est souvent apparu en costume sombre et chemise claire, sans cravate.

Se montrant arrogant et pugnace, il a récusé à maintes reprises le tribunal spécial irakien chargé de le juger.

Saddam Hussein est né le 28 avril 1937 à Awja, dans la région de Tikrit, dans une famille paysanne. Orphelin de père, il a été élevé par son oncle.

Il commence à se faire connaître en 1959 en tentant d’assassiner le président Abdel Karim Kassem, tombeur de la monarchie un an plus tôt.

En 1968, Saddam Hussein participe au coup d’Etat qui porte le parti Baas au pouvoir. En 1979, il cumule les postes de chef d’Etat, de secrétaire général du Baas et de chef suprême de l’armée.

Saddam Hussein multiplie les purges. Terrorisé par l’Iran, l’Occident tolère ses crimes et ouvre les portes de son industrie militaire à l’armée de Bagdad.

En 1990, il tente d’envahir le Koweït, mais est défait en 1991 lors de la guerre du Golfe.

Malgré l’embargo international qui pèse sur son peuple, Saddam Hussein n’a de cesse de défier les Etats-Unis.

En mars 2003, une coalition emmenée par Washington envahit l’Irak sous prétexte que le régime de Bagdad détient des armes de destruction massive et soutient le terrorisme.

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