Ski alpin: un feu d’artifice pour commencer
Le premier géant de la saison à Sölden (Aut) a été survolé par deux extraterrestres. Excellente nouvelle, tous deux viennent de la planète Suisse. Leurs noms: Daniel Albrecht, vainqueur de sa troisième course sur le circuit, et Didier Cuche.
Un simple coup d’oeil aux chronos donne la mesure de leur suprématie. Ted Ligety, troisième, et meilleur géantiste de l’hiver dernier, pointe à 1 »25. Statistique encore plus éloquente: il y a autant d’écart entre le duo Albrecht-Cuche et le troisième, qu’entre ce troisième et le 21e.
«Nous n’avions pas de repères avant d’attaquer cet hiver», a commenté l’entraîneur des Suisses Martin Rufener, avant d’ajouter: «Maintenant, nous avons la confirmation que notre travail durant l’entre-saison fut remarquable».
Remarquable, c’est bien le mot. On prendra juste un exemple. Il y a une dizaine de jours à Saas Fee, Swiss-Ski avait déployé les gros moyens pour préparer une piste artificiellement verglacée. Objectif ? Retrouver les mêmes conditions qu’à Sölden.
Cuche encore à l’heure d’été
C’est ce genre de détails qui finissent par payer. «Nous avons mis tous les moyens de notre côté et nous en récoltons les fruits», a noté Didier Cuche. Reste que le Neuchâtelois ne pensait pas être si tôt dans la saison aux avant-postes: «Je ne m’attendais pas à un top 3. Une place dans les dix aurait suffi à mon bonheur.»
Et comme souvent, le coureur du Val-de-Ruz a évoqué un passé douloureux pour donner plus de relief à sa performance: «En 2005, je revenais de blessure à Sölden et je m’étais raté (23e). Ce jour- là, j’avais été très triste et très abattu. Trois ans plus tard, me voilà sur le podium. Ce résultat me procure beaucoup d’émotion», a dit Cuche qui avait pourtant mal commencé sa journée en se retrouvant seul au déjeuner… le Neuchâtelois n’avait en tête que la course et pas du tout le changement vers l’heure d’hiver.
Presque une «Dream Team»
Moins de vécu pas pas moins de fierté chez le grand gagnant du jour, Daniel Albrecht. «J’ai appris qu’aucun Suisse n’avait gagné à Sölden depuis Steve Locher en 1996. Je suis très heureux d’ajouter mon nom au palmarès. Sans parler du fait qu’après Locher, le Valais reste à l’honneur !», a lâché le skieur de Fiesch.
En tête sur le premier tracé, Albrecht a été mis sous pression par Cuche (3e le matin) lors de la seconde manche: «J’ai entendu qu’il avait réussi un chrono canon. Cela m’a d’abord rendu nerveux. Mais avant de m’élancer, c’est le désir d’en découdre qui l’a emporté». Et d’ajouter: «Rien n’est plus excitant que de se battre contre un compatriote pour la victoire».
Et comme l’équipe de Suisse de géant n’est pas loin de l’appellation «Dream Team», relevons encore la 9e place du petit nouveau Carlo Janka (22 ans) et la 15e du convalescent Marc Berthod (en délicatesse avec son dos). Marc Gini (27e) a marqué ses premiers points dans la discipline et offert à Swiss-Ski une place supplémentaire pour le prochain géant (8 coureurs au lieu de 7).
Seul hic de la journée, Didier Défago. Le Valaisan a chuté lourdement en première manche. Mais sans gravité: «J’ai un peu la tête qui tape, sinon ça va. Je n’étais pas dans le rythme dès le début. C’est une faute d’intérieur qui m’envoie au tapis», a-t-il expliqué.
Le show Lara Gut
La veille, chez les filles, Lara Gut n’a pas raté son entrée en scène. Lors du géant inaugural de l’hiver, à Sölden également, la Tessinoise de 17 ans a pris la cinquième place d’une course remportée par l’Autrichienne Kathrin Zettel. Et comme déjà souvent avec ce pur prodige, il n’est pas usurpé de parler d’exploit.
Un terme qui prend tout son sens quand on relève son dossard, le numéro 37. Question précocité, c’est pas mal non plus: ses 17 ans font presque figure de valeur aberrante dans un top 10 à la moyenne d’âge de 24 ans. Et on ne parle pas de la façon dont ce petit bout de femme (1m60, 58 kg) s’est jouée de la pression et des attentes placées en elle.
«Mes entraîneurs m’avaient dit que la piste se prêtait à l’attaque. Et comme c’est mon point fort, j’ai attaqué», a-t-elle expliqué. Quatrième sur le premier tracé, elle ne s’est pas non plus démontée entre les deux manches: «J’étais quatrième. Qu’est-ce que je pouvais demander de plus ? Alors j’ai continué d’attaquer.»
Difficile de dire si c’est de la maturité ou de l’insouciance. Quoiqu’il en soit, une telle décontraction et un tel esprit de compétition impressionnent. A commencer par Hugues Ansermoz, entraîneur de l’équipe dames: «Beaucoup de filles ont craqué sur le deuxième tracé. Pas elle. Elle est incroyable.»
On rappellera encore que le géant était la discipline noire du ski suisse féminin, avec aucun top 20 l’hiver dernier et aucun top 5 depuis l’ère Sonja Nef au début de la décennie. Avec Lara Gut, la nation semble tenir enfin sa géantiste de proue.
swissinfo et les agences
Samedi: géant dames
1. Kathrin Zettel (Aut) 2’22 »99
2. Tanja Poutiainen (Fin) à 0 »98
3. Andrea Fischbacher (Aut) à 1 »48
4. Denise Karbon (It) à 1 »51
5. Lara Gut (S) à 1 »54
Dimanche:
géant messieurs
1. Daniel Albrecht (S) 2’15 »78
2. Didier Cuche (S) à 0 »14
3. Ted Ligety (EU) à 1 »25
4. Benjamin Raich (Aut) à 1 »30
5. Thomas Fanara (Fr) à 1 »44,
puis les Suisses
9. Carlo Janka à 1 »58
15. Marc Berthod à 1 »88
27. Marc Gini à 4 »56
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