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Stephan Keller joue en plein rêve australien

Sophie Roselli

Le défenseur Stephan Keller vient de rejoindre le FC Sydney, pour le soleil... Mais si le professionnel affiche un look de vacancier, son jeu démontre le contraire. Avec son expérience du foot européen, il est considéré ici comme un professeur.

Roux aux yeux bleus, le visage doré par le soleil, les pieds emmitouflés dans les Ugg boots australiennes par 23°. C’est sûr, le Zurichois Stephan Keller a déjà tout de l’Australien. Enfin presque, car ce sont plutôt les touristes qui raffolent de ces bottes…

Ce détail lui vaut d’ailleurs les taquineries de ses nouveaux coéquipiers du FC Sydney, et cela l’amuse. Ambiance décontractée dans cette équipe de première division, que le défenseur vient de rejoindre après avoir passé les deux dernières saisons avec le club néerlandais De Graafschap.

Partir près de la mer

Mais pourquoi l’ancien international suisse, aux ambitions voraces, a rejoint une nation encore novice en matière de «soccer»?» «Pour le soleil…», répond Stephan Keller en plaisantant à peine.

«Mon contrat arrivait à sa fin après quatre ans passés en Hollande. Jusqu’à présent j’ai surtout joué dans le Nord: en Allemagne, en Angleterre et aux Pays-Bas. Je voulais partir dans le Sud, près de la mer.» La Grèce et le Portugal lui ont fait une offre, mais aucune n’était assez attractive financièrement. Quant à ses contacts avec la Turquie, ils n’ont pas abouti. Finalement, l’Australie l’a emporté, sur les conseils de l’un de ses meilleurs amis, établi à Brisbane.

Son exil au bout du monde pourrait être perçu comme une voie de garage. «Au début, j’ai pensé que je risquais d’être oublié en quittant l’Europe, mais je ne crois pas que cela arrivera.» Son choix est réaliste. «Est-ce qu’il vaut mieux rejoindre l’équipe n°19 au Portugal ou le club n°1 en Australie? Je veux continuer à jouer au plus haut niveau possible. Mais de toute façon, à 30 ans, il ne faut plus rêver du Real Madrid… Il faut faire le maximum en combinant la vie de famille et le foot.»

Convaincre sa femme

Le plus grand challenge a surtout été de convaincre sa femme de s’installer à 18’000 km de la Suisse. «Je lui ai envoyé des photos, je lui ai dit que la vie était extraordinaire ici. Le climat est parfait. On vit à la fois dans une métropole et à la plage. C’est idéal pour les enfants. Et en plus, il y a tout ce qu’il faut ici pour un joueur comme moi.»

Bref, Stephan Keller a été séduit par le style de vie australien. A lui donc le surf et les bières? «Je n’aime pas aller dans les bars, confie-t-il spontanément. J’ai d’ailleurs été un peu déçu par Sydney en arrivant, car je logeais au cœur de la city, au milieu des immeubles, des clubs, des pubs.»

Il a finalement trouvé la tranquillité à Manly, le paradis des plages du nord de la ville. C’est là que le footballeur a déjà testé la planche et la plongée au tuba. Et après cette interview, il compte bien s’équiper d’un vélo. «Comme ma famille arrive le 20 septembre, je prends le temps de tout tester.» A l’entendre, on le croirait en vacances.

Pas la grosse tête

A le voir sur le terrain, c’est tout le contraire. Après quatre premiers matches, le n°3 impressionne les Australiens par son style direct et sa capacité d’organisation de jeu.

Son entraîneur tchèque, Vitezslav Lavicka, se montre pour le moment satisfait: «Nous avions plusieurs options, mais Stephan était le meilleur. Il est solide, résistant. Il peut être un bon professeur pour les jeunes joueurs. Il nous apporte aussi son expérience du foot européen. C’est très important puisque nous n’avons que cinq années d’expérience en League A.»

L’éloge n’est pas fini. Le coach salue son «bon caractère». En clair, le trentenaire n’a pas la grosse tête. Et même si la presse a annoncé l’arrivée de la «Swiss star», l’entraîneur précise: «la star du FC Sydney, c’est l’équipe toute entière».

Décrit comme la «pierre angulaire» de la défense des Bleus ciel, présenté comme un joueur au «solide pedigree» et au caractère «imperturbable», l’imposant athlète semble être considéré comme l’un des sauveurs de l’équipe, avec deux autres recrues. Il faut dire que le FC Sydney sort d’une saison décevante après avoir raté la marche pour la finale de la League A.

Vers la prolongation de l’expérience

Comment gère-t-il cette pression? Son visage impassible apporte la réponse. «Je veux me comporter en professionnel, donner le maximum. Et heureusement pour l’équilibre du groupe, je ne suis pas le seul expérimenté. Il y a des plus grands noms que moi, comme l’international slovaque Karol Kisel.» Son but? Finir le plus haut possible. «Je veux voir grandir cette équipe. Nous avons gagné deux matches avec la chance. J’espère que ce ne sera bientôt plus nécessaire».

La recrue a voulu tenter l’aventure une année seulement, comme test. Mais l’expérience pourrait bien être prolongée. Son aveu sonnerait presque comme une annonce de préretraite.

«Non. Je ne sais pas encore où je serai dans quelques années.» Et le Zurichois insiste sur le professionnalisme des Australiens.

«J’ai toujours voulu travailler de cette façon. Je suis trop jeune et ambitieux pour jouer dans un club de vacances.» Le règlement l’atteste. Plus d’un mois après son arrivée, Mister Keller a déjà reçu une amende… pour avoir laissé traîner sa serviette.

L’anecdote le fait sourire: «Les règles ici sont plus strictes qu’en Suisse. Si vous oubliez quelque chose après l’entraînement, vous recevez une amende qui est versée dans la caisse de l’équipe. J’ai dû payer 20 dollars. Mais tout le monde prend ça en rigolant». Stephan Keller a trouvé sa place au soleil.

Sophie Roselli, Sydney, swissinfo.ch

1998-1999: Grasshopper Zürich Suisse
1999-2001: Neuchâtel Xamax Suisse
2001-2002: SC Kriens Suisse
2001-2004: FC Zurich Suisse
2003-2004: FC Aarau Suisse
2004-2005: Rot-Weiss Erfurt Allemagne
2005-2007: RKC Waalwijk Pays-Bas
2007-2009: De Graafschap Pays-Bas

Depuis 2009: Sydney FC Australie

Australie. Le football version européenne (appelé «soccer») monte en puissance en Australie. Bien qu’il soit pratiqué depuis plus d’une centaine d’années, il n’a jamais vraiment été considéré comme un sport professionnel. En revanche, les Australiens sont nombreux à le pratiquer en loisir.

Afrique du Sud. L’intérêt du public pour le «soccer» grandi depuis la qualification de l’Australie pour la Coupe du monde en 2006. La nation a de nouveau obtenu un billet pour l’Afrique du Sud en 2010.

Après le rugby. Le «soccer» est considéré comme le 4e sport national en Australie. Le Rugby League (avec 13 joueurs) et l’Australian football league (une sorte de mélange entre rugby et soccer) arrivent en tête, suivi du Rugby Union (avec quinze joueurs).

«S’il joue comme il parle, la dernière recrue de Sydney FC, l’ancien international suisse Stephan Keller, sera imperturbable». Sydney Morning Herald, le 1er août 2009.

«Stephan gagne tout facilement. Il a l’air à l’aise et ne semble pas déconcerté», a déclaré Simon Colosimo, son coéquipier en défense, dans le Daily Telegraph, le 18 août 2009.

«Avec sa barbe laineuse, sa longue chevelure imposante, son mètre nonante, Stephan Keller semble être sorti accidentellement d’un film sur les hommes des cavernes pour se trouver à la mauvaise place. Après tout, les Fox Studios sont à peine quelques centaines de mètres du stade de football de Sydney. Mais Keller est tout à fait à sa place.» Sydney Morning Herald, 29 août 2009.

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