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Trafic aérien: l’Allemagne serre la vis

Les nouvelles conditions de survol sont plus sévères que celles prévues par le défunt accord. Keystone Archive

Mardi matin, le parlement suisse enterre l'accord aérien avec l'Allemagne. Dès l'après-midi, Berlin annonce ses mesures unilatérales, particulièrement dures.

Ces nouvelles restrictions au survol du sud de l’Allemagne seront appliquées dès avril.

«Les Allemands avaient toujours dit que, en cas de refus du parlement, ils prendraient des mesures unilatérales», rappelle Daniel Göring, porte-parole de l’Office fédéral de l’aviation civile (OFAC).

Moritz Leuenberger, ministre suisse des transports, n’a pas manqué non plus de rappeler mardi matin aux sénateurs ce qui pourrait arriver s’ils suivaient les députés de la chambre basse et rejetaient l’accord durement négocié entre Berne et Berlin.

Et la réaction de la capitale allemande ne s’est pas fait attendre. Quelques heures à peine après le vote très net (30 voix contre 13) du Sénat helvétique, Iris Gleicke, secrétaire d’Etat allemande aux transports, annonçait la teneur de ces mesures unilatérales.

Des restrictions sévères

En clair, dès la mi-avril, l’interdiction de survol nocturne du sud de l’Allemagne sera prolongée de deux heures. Elle commencera à 21h pour se terminer à 7h du matin. Et les exceptions ne seront tolérées qu’en cas de mauvais temps.

En revanche, les restrictions de survol pour les week-ends et les jours fériés ne changent pas.

Mais il y a plus grave: alors que l’accord – désormais enterré – prévoyait une restriction à 100’000 survols par année du territoire allemand (contre quelque 120’000 actuellement) à partir de 2005, Berlin fixera la limite à 110’000 dès le mois prochain.

Et, dans une année, le nombre de survols autorisés tombera carrément à 80’000. De plus, les altitudes minimales de vol au-dessus du sud de l’Allemagne seront élevées.

Pas de panique

«Cette limitation en deux phases doit permettre à l’aéroport de Zurich de se préparer», annonce Iris Gleicke à Berlin.

Au siège de Unique, société d’exploitation de l’aéroport zurichois, on ne semble pas pour l’heure prendre la chose trop au tragique.

«Les avions peuvent arriver à Zurich en évitant l’Allemagne, explique Sonja Zöchling, porte-parole de Unique, mais cela les oblige à atterrir sur notre piste la plus courte.»

Déjà utilisé durant la nuit, ce couloir aérien arrivant de l’Est le sera donc deux heures de plus sur vingt-quatre. Ce qui va signifier des nuisances supplémentaires pour les riverains de l’aéroport.

«Pour le reste, conclut Sonja Zöchling, nous n’avons plus qu’à attendre l’entrée en vigueur de ces mesures.»

Même sérénité, plutôt déconcertante au siège de l’OFAC. Comme le rappelle Daniel Göring, le gouvernement suisse ne notifiera officiellement à Berlin l’échec de la ratification de l’accord que la semaine prochaine.

Ensuite? On verra bien. Ce qui est sûr, c’est que les Allemands ne sont pas prêts de s’asseoir à nouveau à la table des négociations.

Iris Gleicke est très claire là-dessus: «L’accord dont le parlement suisse n’a pas voulu était un bon compromis. Et Berlin a tout fait pour le sauver», déclare la secrétaire d’Etat.

La voie des tribunaux

A défaut de négociations, c’est par la voie des tribunaux que les adversaires suisses de l’accord entendent faire plier l’Allemagne.

Chef de file de l’opposition, la compagnie aérienne Swiss a déjà saisi une fois le Tribunal administratif de l’Etat de Bade-Wurtemberg. Déboutée, elle entend maintenant recourir à la Cour fédérale allemande. Et n’exclut pas d’autres actions en justice.

«Selon nous, les restrictions actuelles sont déjà contraires à l’accord bilatéral sur les transports entre la Suisse et l’Union européenne», argumente Jean-Claude Donzel.

«Il est encore trop tôt pour dire comment ces mesures peuvent nous affecter, poursuit le porte-parole de la compagnie. Mais nous voyons déjà que durant les week-ends, les retards sont fréquents, à cause de l’engorgement des pistes.»

Et bien sûr, en tant que compagnie basée à Zurich, Swiss en souffre davantage que ses concurrentes.

Skyguide en sursis

Quant à Skyguide, son sort n’est pas définitivement fixé par l’annonce faite à Berlin. Le ministère allemand des transports – qui a menacé à plusieurs reprises de retirer aux aiguilleurs du ciel suisses le contrôle des vols au-dessus du sud de son territoire – laisse pour l’instant la question ouverte.

Pour Skyguide, la perte de cette mission signifierait un manque à gagner annuel de 30 à 40 millions de francs. La baisse du nombre d’avions pris en charge par la société suisse devrait être compensée par une hausse des taxes.

Ce qui rendrait l’espace aérien helvétique moins attractif. Et ne serait bon ni pour l’aéroport de Zurich, ni pour Swiss.

swissinfo, Marc-André Miserez

Dès mi-avril, l’interdiction de survol nocturne du sud de l’Allemagne est prolongée de deux heures
A la même date, le nombre de vols annuels est ramené à 110 000
Dès avril 2004, ce chiffre tombera à 80 000
La compagnie Swiss va saisir à nouveau la justice allemande

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