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Une politique d’asile qui n’a pas fini de diviser

Christoph Blocher est satisfait du durcissement de la politique d'asile. Keystone

Deux ans après la suppression de l'aide sociale aux requérants d'asile frappés d'une décision de non entrée en matière, le ministre de la Justice tire un bilan positif de la situation.

Les défenseurs des réfugiés ne partagent pas l’analyse faite par Christoph Blocher un mois avant la votation populaire sur un projet de durcissement de la loi sur l’asile.

Christoph Blocher reste persuadé que la suppression de l’aide sociale aux requérants d’asile frappés d’une décision de non-entrée en matière (NEM) est une bonne solution.

La crainte que cela fasse augmenter la criminalité ou la clandestinité ne s’est pas réalisée, selon lui.

L’exclusion des NEM de l’aide sociale, en vigueur depuis avril 2004, vise à pousser ces personnes à quitter la Suisse, à réduire les coûts et à diminuer l’attractivité de la Suisse.

Dans cette optique, cette mesure produit les effets escomptés, a estimé le ministre de la Justice vendredi lors de la présentation du deuxième rapport annuel de monitoring.

Contrairement aux inquiétudes exprimées par les œuvres d’entraide et les villes, aucune hausse de la criminalité n’a été enregistrée. Les risques pour la sécurité publique sont «faibles». La crainte que les NEM restent en Suisse tout en disparaissant dans la nature ne s’est pas non plus vérifiée, d’après le ministre.

Des indices clairs

Christoph Blocher se base sur le fait que près des deux tiers des 6685 personnes frappées d’une NEM devenue exécutoire entre le 1er avril 2004 et le 31 mars 2006 n’ont pas sollicité l’aide d’urgence, soit le minimum vital (nourriture et hébergement) garanti par la Constitution. C’est donc, à ses yeux, un «indice clair» qu’elles sont sorties de Suisse.

Le chef du Département fédéral de justice et police (DFJP) a toutefois admis que cela ne constituait pas une preuve. Pour seulement environ 20% des NEM, la Confédération sait avec certitude qu’ils sont partis.

Les critiques concernant l’accès à l’aide d’urgence ou le traitement réservé aux personnes vulnérables, en particulier les femmes enceintes et les mineurs, ont été écartées également. Christoph Blocher a assuré que tous les cas litigieux rendus publics sont examinés.

La réaction de l’OSAR

L’Organisation suisse d’aide aux réfugiés (OSAR) ne partage pas l’analyse de Christoph Blocher.

Selon elle, l’accès à une aide d’urgence pour les réfugiés exclus de l’aide sociale n’est pas garanti partout. De plus, chaque canton adopte une pratique différente en la matière.

L’OSAR s’insurge contre la manière dont certains cantons résolvent le problème des requérants d’asile frappés d’une décision de non-entrée en matière, indique l’organisation dans un rapport vendredi. Ceux-ci sont privés d’aide sociale et la Suisse connaît 26 régimes différents pour la attribution d’une aide d’urgence.

Interrogé par swissinfo, le Responsable du service juridique de l’OSAR Jürg Schertenleib s’insurge contre le discours de Christoph Blocher.

«Il dit que deux-tiers des ‘NEM’ ont quitté la Suisse mais personne ne peut le savoir, enrage-t-il. Au contraire, nous croyons que ces derniers font tout pour rester en Suisse.»

«Deuxièmement, poursuit-il, il affirme qu’il n’y a eu aucun problème avec la suppression de l’aide sociale mais certains cantons ont refusé de donner un abri et à manger à des demandeurs d’asile. Il y avait des enfants parmi eux. C’est tout bonnement inacceptable.»

Des disparités cantonales

Selon l’OSAR, à Glaris, l’aide d’urgence serait même refusée si la personne ne peut prouver son identité. Dans le Jura et à Schwyz, celle-ci n’est acceptée que dans le cas où la personne coopère avec les autorités. Dans les Grisons, l’aide n’est pas attribuée si le demandeur possède plus de 100 francs dans son porte-monnaie, critique l’OSAR.

A Zurich, des personnes malades ou des femmes enceintes dormiraient en compagnie de dealers ou d’hommes violents, selon l’OSAR. Dans les cantons de Bale, Lucerne, Schwytz, Saint-Gall, des Grisons et du Tessin, les centres d’hébergement restent fermés la journée, et ceci même l’hiver.

«Pour moi, il n’y a aucune bonne nouvelle à réaliser des économies sur la dignité humaine», conclut le juriste de l’OSAR.

swissinfo et les agences

Depuis le 1er avril 2004 la Confédération ne verse plus aux cantons les forfaits propres à financer l’aides sociale destinée aux requérants d’asile frappés d’une décision de non entrée en matière. Cette mesure avait été prise dans le cadre des épargnes décidées par la Confédération en 2003.

Les NEM privés de l’aide sociale ont droit à une aide minimum d’urgence (nourriture, logement et autres besoins de base) pour un montant de 21 francs par jour.

En mars 2005, le Tribunal fédéral – la plus haute instance juridique du pays – s’est opposé à la décision du canton de Soleure – soutenu par le ministre Christoph Blocher – de priver de l’aide d’urgence un NEM qui s’opposait à son expulsion.

La Confédération estime que le nombre des demandes d’asile manifestement infondées a baissé de près de 30% en 2005, ce qui a permis de réduire l’effectif des personnes relevant du domaine de l’asile de 12,5%, à quelque 48 200 personnes.

Selon l’Office fédéral des migrations, des économies de l’ordre de 92 millions de francs ont pu ainsi être réalisées. Sur cette somme, 42 millions sont à mettre sur le compte de la suppression de l’aide sociale.

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